Naguère farouches partisans du libéralisme bioéthique le plus transgressif, les socialistes prennent conscience des dérives mercantiles de la chosification de la personne humaine. Plusieurs personnalités socialistes, parmi lesquelles Michel Rocard et Lionel Jospin, mais aussi le porte-parole du PS Benoît Hamon, ont signé une tribune contre la légalisation de la gestation pour autrui (GPA), publiée lundi 23 novembre par la fondation Terra Nova.
La tribune intitulée Mères porteuses : extension du domaine de l'aliénation, prend le contrepied des conclusions d'un groupe de travail du PS en faveur de cette pratique, et du rapport Accès à la parenté : assistance médicale à la procréation et adoption, signé par Geneviève Delaisi de Parseval et Valérie Sebag-Depadt, que Terra Nova avait publiés au printemps.
Pour les signataires, le recours aux mères porteuses participe d'une logique profondément réactionnaire pour les droits des femmes, en ce qu'elle implique une instrumentalisation du corps féminin . Parmi eux figurent le professeur René Frydman (gynécologue) et Olivier Lyon-Caen (neurologue), la philosophe Sylviane Agacinski, l'ancien ministre Élisabeth Guigou, le député Alain Clayes et le président du groupe socialiste à l'Assemblée Jean-Marc Ayrault.
C'est la marchandisation du corps de la mère porteuse qu'ils condamnent : Partout où elle a été légalisée dans le monde, la pratique des mères porteuses se traduit concrètement par une nouvelle exploitation, radicale, au sens où il s'agit de la prise de contrôle sur la vie d'une femme pendant neuf mois. C'est ainsi que se met en place une relation généralement inégalitaire entre commanditaires aisés et mères porteuses défavorisées .
Contrairement aux précédentes recommandations du Parti socialiste et du rapport Delaisi de Parceval, ils estiment que l'idée d'un encadrement de la pratique par sa légalisation est une chimère : La détresse des parents qui souhaitent, mais ne peuvent avoir des enfants, doit être entendue. La réponse passe par un discours responsable qui rappelle qu'il n'existe pas de "droit à l'enfant", mais aussi par une amélioration des conditions de l'adoption.
Si cette mise en cause de la légalisation des mères porteuses ne défend pas le droit de l'enfant au sens strict et la dimension universelle de la dignité de la personne humaine, elle défend justement la dignité de la femme et sa critique du droit à l'enfant constitue un véritable progrès à gauche.
Le bureau national du Parti socialiste doit prendre position sur le sujet le 30 novembre prochain.
[Sources : Tnova.fr, AFP]
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