La progression spectaculaire du Front national au premier tour des élections régionales est aussi une réponse aux effets irresponsables de la politique migratoire de l’Allemagne.
LA MONTEE qui semble inexorable du Front national aux élections françaises résulte sans doute de données de fond : chômage, récession, lourdeur de la fiscalité, immigration, insécurité, réformes brouillonnes et déstabilisatrices (ainsi les différentes réformes territoriales toutes plus absurdes les unes que les autres ayant en commun d'accroître les dépenses et d'affaiblir les repères). Mais les événements récents ont joué un rôle d'accélérateur du processus aux élections régionales de 2015 : les tragiques attentats du novembre, et plus encore l'irruption d'un flux massifs d'immigrés (dont certains sont des réfugiés) arrivant par dizaines de milliers en Europe en provenance de Libye d'abord, et, depuis l'été, de Turquie.
Alors que les attentats ont eu pour effet de resserrer le lien national et même, ô paradoxe, de renforcer la position de François Hollande, l'annonce de l'arrivée des migrants a profondément déstabilisé les esprits (cf. enquête IFOP rapportée par le Figaro). Certains y ont vu la réalisation de la prophétie de Jean Raspail dans son célèbre roman de 1975, Le Camp des saints. À tort, car il décrivait un mouvement spontané alors que celui-ci est organisé.
Une vague migratoire organisée
Même si la France n'était pas la première destination de ces arrivants, elle s'est sentie menacée. Bien plus qu'un attentat, même horrible, qui ne touche qu'à la sécurité physique, la perspective d'un changement de civilisation provoquée par une immigration de masse a jeté le trouble dans un peuple français à qui l'omniprésence de la thématique islamique et raciale avait déjà mis les nerfs à vif. Pour beaucoup, le vote FN au premier tour des élections régionales a été non seulement un mouvement d'exaspération, mais aussi une sorte d'avertissement adressé aux responsables de cette immigration imposée.
Imposée par qui ? L'affaire demeure confuse quant à ses commencements. Un tiers des réfugiés vient d'une Syrie en proie à une guerre civile atroce que les Occidentaux ont nourrie en aidant les djihadistes pendant quatre ans. Il ressort que, contrairement à la version officielle, la plupart des exilés ne fuient pas le régime mais la guerre, les islamistes ou tout simplement la crise économique aggravée par les sanctions de l'Union européenne.
Ils sont aidés par des mafias qui vont les chercher jusqu'à Damas pour leur extorquer le prix exorbitant du passage. Les plus pauvres ne peuvent donc pas partir. D'autres viennent de l'Afghanistan, aussi en guerre, ou tout simplement de Bosnie, du Kosovo ou d'Albanie, pays qui ont pourtant fait l'objet, depuis la guerre de 1999 menée par l'OTAN, des petits soins de la communauté occidentale.
Et n'oublions pas le flux venant de Lybie plus ancien de quelques mois, composé d'Africains, et qui se poursuit.
Les arrivées se comptent par milliers tous les jours et, contrairement à ce qui avait été annoncé, elles ne semblent pas se ralentir en hiver.
L'appel d'Angela Merkel
Mais s'il y a des départs, c'est qu'il y a une perspective. Un tel flux n'aurait pas eu lieu si Angela Merkel n'avait dit clairement au début de l'été que l'Allemagne était prête à accueillir un million de réfugiés.
On peut s'interroger sur les motivations de la chancelière — qui vient d'être élue personnalité de l'année pour le Time. A pu jouer la demande du patronat allemand désireux de tenir les salaires à la baisse du fait de la prospérité de ce pays qui contraste avec l'atonie de l'économie des autres pays de la zone euro. Également le calcul des démographes de l'ONU et de l'Union européenne qui depuis au moins 25 ans vont répétant que, compte tenu de la faiblesse du taux de natalité européen, un afflux de plusieurs millions de personnes sera nécessaire pour équilibrer les régimes de retraite. Calcul grossier qui ne repose que sur une approche purement quantitative ne tenant pas compte de la qualité de la main d'œuvre (les employeurs allemands viennent de découvrir que les arrivants ne correspondaient pas tout à fait à ce qu'ils espéraient), mais surtout des risques de choc culturel considérables que cette immigration brutale emporte.
Il est étonnant qu'Angela Merkel qui, il y a peu, déclarait que le multiculturalisme était un échec en Allemagne, n'ait pas pris la mesure de ce choc.
Il est encore plus étonnant qu'une femme de cette expérience, tenue jusqu'à ces décisions désastreuses pour une des consciences de l'Europe, ait pu pousser l'irresponsabilité jusqu'à déstabiliser ainsi gravement à la fois l'Allemagne et l'Europe.
Est-il nécessaire de dire que dans les mystérieuses motivations de la chancelière, les considérations humanitaires ne tiennent aucune place ? Son comportement peut être même jugé monstrueux. N'est-ce pas un rapt de population que d'aller chercher de la main d'oeuvre qualifiée dans des pays qui, la paix revenue, en auront besoin pour se reconstruire ? Et si vraiment elle souhaitait faire venir ces gens, ne lui suffisait-il pas de leur accorder des visas et de leur permettre de prendre l'avion ? Ils auraient payé 300 € pour acheter un billet au lieu des milliers d'euros versés à des passeurs mafieux qui les emportent sur des embarcations précaires. Angela Merkel peut être tenue pour responsable de la mort d'Aylan !
Quelles victimes ?
Si les premières victimes sont les réfugiés vrais ou supposés et en tous les cas moins attendus que ce qu'on leur avait promis, les secondes sont les petits pays qui bordent à l'est l'Allemagne. Après avoir créé un immense appel d'air, celle-ci s'aperçoit tout à coup que la population allemande n'est pas si enthousiaste à les accueillir et ferme ses frontières, laissant à ses voisins la responsabilité de gérer le problème. Contrainte de se débrouiller seul pour veiller à l'entrée dans l'espace Schengen comme le traité l'y oblige, la Hongrie doit en plus essuyer l'opprobre des bonnes consciences de l'Europe de l'Ouest.
Mais c'est toute l'Europe qui se trouve ébranlée par ce flux inattendu et massif dont on ne sait pas encore ce qu'en sera l'aboutissement ni s’il se tarira jamais.
Il fut un temps pas si lointain où quand la chancelière d'Allemagne avait parlé, notamment sur les questions économiques et financières, le dernier mot était dit : l'Europe avait parlé par sa voix.
Mais à présent, ce n'est pas la chancelière allemande qui a parlé, c'est le peuple français. Par son vote de dimanche, il a marqué son refus de la politique d'Angela Merkel. Comme en 1789, en 1848, en 1968, sa voix forte a ébranlé l'Europe. Le peuple français avait parlé aussi le 29 avril 2005 en refusant, à la surprise générale, le projet de Constitution européenne. Et c'est précisément parce qu'on n'en avait pas tenu compte que l'Europe en est arrivée à la situation de désespérance actuelle.
Alors que la France, malgré la politique antifamiliale de Hollande, maintient de justesse sa natalité au seuil du renouvellement, celle de l’Allemagne, prise d'un vertige suicidaire, s'effondre. Il y a d'ores et déjà plus d'enfants en France qu'en Allemagne. En conformité avec ce différentiel, la France, plus que la plupart de ses voisins, veut encore, comme dit Spinoza, persévérer dans l'être.
C'est de bien des manières que l'Europe institutionnelle est passée outre à la volonté des peuples. Mais nul n'était allé aussi loin qu’Angela Merkel quand elle a décidé que l'Europe qui, jusque-là, avait tenté de contrôler ses frontières devait désormais, seule au monde, être un espace ouvert. L'attitude d’Angela Merkel est l'aboutissement d'un immense mouvement de dessaisissement des peuples européens sur leur destin.
Quoi que l'on pense par ailleurs des idées de Marine Le Pen, dont assurément certains aspects sont discutables, sa percée est l'effet direct des décisions irresponsables de la chancelière allemande. Danke schön Frau Merkel.
Roland Hureaux
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Le référendum concernant le projet de constitution s'est déroulé le 29 mai 2005.