Le retour du projet de loi immigration pour le mois de juillet illustre les multiples revirements de la majorité macroniste sur le sujet. Tiraillé entre la peur de s’attirer l’ire de la gauche et sa volonté de flatter son aile droitière, le président a finalement décidé de faire sa réforme.
Ordre, contrordre et désordre
La question migratoire est un marronnier du règne macronien. En s’attachant les services du transfuge des Républicains Gérald Darmanin à l’Intérieur, le président de la République voulait envoyer un signal à l’électorat de droite. Profil idéal, le ministre n’est pas brillant et ne fera pas d’ombre au président. Pas charismatique et volontiers gaffeur, il représente un sous-modèle de Nicolas Sarkozy et semble plus dangereux du fait de son ambition que pour ses idées.
Très attaché aux lubies sécuritaires et volontiers grande gueule sur la question migratoire, le ministre n’a pour l’heure pas obtenu de résultats favorables mais occupe le terrain de la communication. Vexé de voir son projet reporté à l’automne, il a été ravi de voir le président sommer le Premier ministre Borne de relancer les concertations cet été, avec en ligne de mire un examen parlementaire à l’automne… Le revirement présidentiel semble s’expliquer par la mobilisation massive contre la réforme des retraites. Voulant apaiser les esprits, Emmanuel Macron a fait mine de reculer mais aujourd’hui, le recul des mobilisations et la volonté de la droite parlementaire LR de déposer deux propositions de loi sur le sujet semblent le pousser à se relancer !
Recentrer le parti présidentiel
Faute d’Etat stratège, la France dispose d’un président stratège. Le dossier immigration en est une nouvelle illustration ; la majorité « Renaissance » va en effet pouvoir présenter un projet qui devrait apparaitre comme modéré face aux textes du parti Les Républicains. Quant au Rassemblement National, dont l’immigration demeure un thème de prédilection dans l’imaginaire électoral, il n’aura qu’à contester a minima pour sortir un peu renforcé de cette petite bataille. La coalition des gauches dite « Nupes » pourra, elle, faire bloc contre le texte et satisfaire sa base mais ne pourra pas mobiliser massivement comme pour la réforme des retraites.
S’agissant du fond de la réforme, elle devrait s’articuler autour de deux axes : se montrer plus ferme en matière de procédures d’expulsion et favoriser la venue de travailleurs étrangers pour les métiers dits en tension. Même votée, la fermeté en matière de procédure d’expulsion ne sera pas appliquée. Quant aux métiers « en tension », il s’agit de la manœuvre classique de la gauche libérale puisant dans l’immigration pour tirer les salaires vers le bas. Ce que l’on nomme les métiers « en tension » ce sont les emplois que les Français ne veulent pas exercer par refus de trimer pour être payés comme des srilankais. Les nouveaux arrivants n’auront pas cette gène (et cela se comprend) et le piège migratoire se refermera une nouvelle fois sur les Français avec d’un côté une gauche qui défendra le travailleur immigré et de l’autre le MEDEF qui se régalera des bas salaires…
Si l’on doit reconnaître quelque chose à Emmanuel Macron, c’est bien sa qualité de stratège. Le président ose tout et a su habilement manœuvrer sous couvert d’une fausse franchise en se plaçant comme celui qui ne craint pas d’affronter les questions. Derrière le vernis d’agité réformateur se trouve en réalité un président qui n’a pas franchement changé la donne mais plutôt intensifié le mouvement de vente à la découpe du pays en matière économique tout en intensifiant le recul des libertés…
Olivier Frèrejacques
Délégué général de Liberté Politique
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