Source [Roland Hureaux] De manière légitime, nos sociétés luttent contre toutes les formes de discrimination raciale.
Comment ne pas voir pourtant que l’instauration pour les femmes seules ou en couple de femmes d’un droit à la procréation médicale assistée ouvrira la porte à une nouvelle forme de discrimination raciale ? Les femmes qui voudront en avoir le bénéfice seront en effet amenées à choisir non seulement le sexe (ce qui pose d’autres problèmes), mais aussi la couleur de la peau du père anonyme.
Cela existe déjà, dira-t-on, dans la PMA pour couples stériles, mais les effectifs concernés, soumis à la double condition de la conjugalité et de la stérilité, restent limités. Or le dispositif qu’instaure le projet de loi bioéthique ne sera pas seulement ouvert aux femmes liées par un mariage homosexuel, dont l’effectif est et restera très réduit ; il le sera aussi à toutes celles qui ne seront liées par aucun contrat, y compris celles qui pourraient avoir des enfants par les moyens naturels, ce qui représente au moins la moitié des femmes de France.
On peut élargir la question à celle du transhumanisme. Ceux qui imaginent - ou craignent - que l’instauration d’une PMA pour toutes conduise à légaliser des expériences destinées à augmenter le potentiel de l’humanité, voire à une large commercialisation de la génération humaine, doivent regarder en face le lien intrinsèque entre les pratiques en cause et la discrimination raciale.
Choisir, c’est discriminer
La femme qui effectuera un choix entre les donneurs (ne faudrait-il pas dire étalons ?) dont le sperme est en réserve, sera nécessairement amenée à marquer sa préférence pour telle ou telle couleur de peau, tout comme l’institut de recherche qui sera amené à croiser les lignées, voire à manipuler les génomes, sera ipso facto conduit à intégrer la considération raciale.
On pourrait certes imaginer une société tellement indifférente aux questions de race qu’une femme puisse choisir selon la seule couleur des yeux, sans considération de celle de la peau, mais il en faut pas rêver : même en France, pays moins racialisé que les Etats-Unis, jamais la considération raciale ne sera devenue si indifférente qu’elle n’entre pas en ligne de compte dans une opération d’une telle portée existentielle. Et ce n’est pas l’obsession antiraciste que nous avons importée d’outre-Atlantique qui va « déracialiser » notre société, bien au contraire.
La question d’est pas marginale : c’est à toute une culture de la discrimination qu’ouvrira la porte l’ouverture large à la procréation assistée. La plupart des femmes seront nécessairement amenées à effectuer, de pair avec le personnel hospitalier, un choix selon la couleur de la peau de leur futur enfant C’est toute la société qui se trouvera ainsi entrainée dans une culture de la discrimination qui, aujourd’hui, quoi qu’en disent les militants antiracistes, est peu répandue.
On peut trouver le rapport paradoxal : dans la structuration symbolique actuelle de la vie politique, la PMA pour toutes passe pour être de gauche et est même présentée, comme le montre le nom qu’on lui a donné, pour une mesure de non-discrimination, alors que la discrimination raciale passe, elle, pour venir de l’extrême droite. Pourtant ce ne sera pas la première fois que les extrêmes se rejoignent. Chacun sait d’ailleurs quel régime fut le premier à introduire l’objectif d’une sélection par la race dans le champ politique.
La solution serait que la loi interdise aux Cecos toute mise en mémoire de l’origine raciale ou même nationale du sperme conservé, à tout le moins toute communication de ces données aux utilisatrices. François Hollande ne voulait-il pas introduire dans la constitution le ban de toute considération raciale quelle qu’elle soit ? Mais il ne semble pas avoir été question d’un tel interdit dans le débat sur la procréation assistée : c’est dommage.
Il faut se rendre à l’évidence : on ne peut à la fois prétendre lutter contre le racisme et ouvrir largement la porte à la procréation artificielle.
Roland HUREAUX
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