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Penser le présent – Chroniques d'actualité 1997-2010

Penser le présent – Chroniques d'actualité 1997-2010
  • Auteur : Chantal Delsol
  • Editeur : François Bourin éditeur
  • Année : 2011
  • Nombre de pages : 439
  • Prix : 24,00 €

L'électeur est parfois lecteur de bonne presse ; le lecteur est souvent un électeur. Du Figaro à La Croix, en passant par des Valeurs actuelles qui se confondaient autrefois avec celles de la Bourse, bien des tribunes, éditoriaux et autres chroniques induisent tout bonnement ce lecteur en erreur. L'air de rien, ces pensées-là surfent sur l'air du temps. La plupart du temps, pour l'encenser ; quand elles entendent redresser ses torts, pas de chance, c'est à coup sûr à tort. Chantal Delsol sort de ses rangs là : elle ne se rend pas au monde. Elle le regarde avec pitié, passion, distance.

Pondéré, attentif, son verbe, en sa forme, rassure. Le lecteur qui a déjà songé aux choses de la vie s'y retrouve. Une lecture superficielle s'irriterait parfois d'un ton plus démocrate-chrétien que chrétien, d'un centrisme, d'une pondération qui pourraient se confondre avec la modération. Certes, Madame le Professeur Delsol est-elle, dans le plein sens du mot, un sage. C'est là son apparence, qui est aussi réalité. Une certaine mansuétude envers son époque la caractérise ; elle n'est pas sévère, ni n'en a l'air. Si elle ne monte pas le ton, ses commentaires toutefois détonnent, et somme toute en bien, au milieu de la pensée commune. L'Europe : la philosophe a finit pas comprendre qu'elle faisait fausse route, qu'elle ne parviendrait jamais à ce fédéralisme souhaité. Surtout, finit-elle par admettre que son contenu ne méritait plus qu'on bataille pour son avènement. Aurait-elle lu Hureaux et consorts, la chose lui serait apparu depuis longtemps. En la matière, il aurait fallu être plus catholique que chrétien ( voir Camdessus, Lamy, Delors, Rocard etc). En matière de morale, en ce qui regarde les sujets de société, elle estime que le principe de subsidiarité devrait s'appliquer. Là, elle se fait plus libérale que conservateur, laissant la liberté de conscience (et ses conséquences pratiques à risques) prédominer sur la nécessité de transcrire les Tables de la Loi dans le marbre de la loi positive. Sa pensée apparaît donc pratique, pragmatique, applicable, tout en ne cachant rien de ce qui serait pourtant l'idéal. Mais elle sait que la Jérusalem céleste ne saurait en ce bas monde s'identifier avec la Jérusalem terrestre. Autrement dit, nullement sophiste, d'une parfaite foi et bonne foi, Chantal Delsol pourtant compose. Elle fait la part des choses, rendant à César (qu'elle n'aime pas, et d'abord par principe) ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu. Sa laïcité peut être qualifiée de ‘‘saine'' (selon ce Pie XII) et de ‘‘positive'' (selon Nicolas Sarkozy). Ce qui ne l'empêche pas d'appeler un chat un chat, et Sarkozy un voyou. Notez-le : elle peut le dire, mais point l'écrire. L'article dans lequel elle le qualifie de la sorte est un des deux qu'elle n'a pas pu publier dans la presse. L'autre a pour titre Pédophilie et institutions et nous exhorte de ne pas jeter le bébé (l'Eglise) avec l'eau du bain (les mœurs de certains clercs).

Nous aimerions une autre fois décortiquer ses attaches et ses nuances intellectuelles avec d'autres commentateurs/contempteurs de notre époque (Philippe Béneton, Pierre Manent, Jean-François Mattéi etc). Tous ont en commun, quelque soit le domaine traité, un propos intemporel, sur lequel les affres du temps n'ont pas prises. Rien d'étonnant à cela. A l'analyse, voilà des doctrines toutes anti-oxydantes. Comme si ces intellectuels, à l'image de Valéry, avaient à cœur de nous rappeler que l'Occident ne méritait d'éclairer le monde qu'à la condition que ses feux ne cessent de se nourrir à ces combustibles naturels qui ont pour noms Rome, Athènes et Jérusalem.

 

HdC

 

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