Il y aura toujours des situations de nécessité matérielle, pour lesquelles une aide est indispensable, dans le sens d'un amour concret pour le prochain. L'État qui veut pourvoir à tout, qui absorbe tout en lui, devient en définitive une instance bureaucratique qui ne peut assurer l'essentiel dont l'homme souffrant – tout homme – a besoin : le dévouement personnel plein d'amour.

Nous n'avons pas besoin d'un État qui régente et domine tout, mais au contraire d'un État qui reconnaisse généreusement et qui soutienne, dans la ligne du principe de subsidiarité, les initiatives qui naissent des différentes forces sociales et qui associent spontanéité et proximité avec les hommes ayant besoin d'aide.

Benoît XVI, Deus caritas est, 28

 

 

 

 

 

 

 

COMME JESUS se trouvait à Béthanie, chez Simon le lépreux, une femme s'approcha de lui, avec un flacon d'albâtre contenant un parfum très précieux, et elle le versa sur sa tête, tandis qu'il était à table. À cette vue les disciples furent indignés : À quoi bon ce gaspillage ? dirent-ils ; cela pouvait être vendu très cher et donné à des pauvres. Jésus s'en aperçut et leur dit : Pourquoi tracassez-vous cette femme ? C'est vraiment une "bonne œuvre" qu'elle a accompli pour moi. Les pauvres, en effet, vous les aurez toujours avec vous, mais moi, vous ne m'aurez pas toujours.

Cette onction de Béthanie , transcrite ici selon Matthieu (26, 6-12), se retrouve chez Marc (14, 3-9) et, avec d'autres précisions, chez Jean (12, 1-8). Elle engendre une certaine perplexité, particulièrement si l'on adopte une attitude calculatrice – ce qui fut le cas des apôtres : la femme n'aurait-elle pas manifesté encore davantage d'amour en vendant ce produit coûteux au profit de ceux qui sont dans le besoin ? Mais Jésus est cohérent avec ce qu'il avait dit au début de sa vie publique, citant le Deutéronome : L'homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu (Mt 4, 4). Son message de Béthanie, à l'approche de la mort, est à nouveau une réfutation puissante de l'approche matérialiste des problèmes, et particulièrement de la pauvreté. Il a été repris par les petits frères des pauvres dont la maxime est : Les fleurs avant le pain. Il nous incite à examiner les politiques de lutte contre la pauvreté en usant non seulement de critères relatifs à leur efficacité matérielle, mais aussi d'une compréhension de ce qui se passe en profondeur dans l'âme humaine, celle des pauvres et celle de ceux qui les aident.

Il convient aussi de ne pas oublier que tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil n'est pas une parole d'évangile : dans la version johannique de l'onction de Béthanie, le trésorier, Judas, proteste contre le gaspillage, non par souci des pauvres, mais parce que c'était un voleur et que, tenant la bourse, il dérobait ce qu'on y mettait . Il n'est pas rare qu'une soi-disant lutte contre la pauvreté soit menée en réalité pour servir des intérêts autres que ceux des hommes, des femmes et des enfants touchés par la misère ; la valeur d'une politique de lutte contre la pauvreté doit aussi s'apprécier à l'aulne de sa capacité à ne pas se laisser détourner au profit de Judas contemporains.

Rappelons enfin, avec le Compendium de la doctrine sociale de l'Église (n. 68) que l'Église, avec sa doctrine sociale, n'entre pas dans des questions techniques et ne propose pas de systèmes ou de modèles d'organisation sociale : cela ne relève pas de la mission que le Christ lui a confiée . Il appartient donc à chacun de nous de se faire son opinion relativement aux systèmes et modèles mis en œuvre ou proposés par des gouvernants ou des aspirants au gouvernement du pays, en s'aidant le cas échéant d'expertises, en s'informant et en dialoguant. Les quelques analyses et réflexions qui figurent ci-dessous sont une modeste aide à la décision : pas plus que l'Église, l'économiste de service ne saurait se substituer au jugement individuel, à la responsabilité personnelle du citoyen.

 

 

 

Ie RECOMMANDATION

 

Servir les personnes en détresse, ne pas instrumentaliser la pauvreté

 

Les personnes en détresse sont assez souvent en situation de pauvreté matérielle, mais pas toujours. Une prostituée, même si des souteneurs lui soutirent une grande partie de ses gains, peut disposer d'un budget conséquent, porter des vêtements de luxe et fréquenter de bons restaurants : sa détresse tient alors à sa dépendance, l'espèce de servage dans lequel elle se trouve vis-à-vis de maîtres qui la tiennent sous leur coupe. Pour mieux dominer leur gagneuse , ils peuvent avoir joué la carte de la drogue. Parfois, c'est l'addiction aux stupéfiants qui déclenche la prostitution, puis la prise en main . Les petites frappes, les dealers, sont souvent aussi pris dans un engrenage : ils ont de l'argent, des moyens , mais pas le moyen de sortir de la bande, du réseau. Une partie notable des délinquants sont des personnes en détresse, même s'ils roulent en BMW et claquent en une semaine l'équivalent de ce qu'un travailleur honnête gagne en un mois.

 

 

 

[Fin de l'extrait] ...

 

Pour lire le texte complet, commandez le Guide de l'électeur chrétien 2007 (Liberté politique n° 36) en cliquant ici

 

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