Recherche sur l’embryon : 10 raisons de dire non

Le 28 mars, les députés vont débattre de la proposition de loi levant l’interdiction de la recherche sur l’embryon humain. Or ce texte porte une révolution juridique et éthique sans fondement scientifique. Les citoyens ayant été privés d’un débat sur la question, voici les dix principales raisons de s’y opposer.

Sur le plan scientifique

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1/ La thérapie cellulaire est déjà une réalité grâce à certaines cellules souches non embryonnaires : les cellules souches adultes et celles du sang de cordon.

2/ Les cellules souches reprogrammées (IPS) du Pr. Yamanaka (prix Nobel de Médecine 2012), offrent des perspectives plus prometteuses en matière de thérapie cellulaire que les cellules embryonnaires. La rapidité du lancement du premier essai clinique sur la DMLA, et les investissements massifs qui se portent – à l’étranger – sur les iPS marquent l’importance du potentiel de cette recherche. S’agissant de la modélisation des pathologies et du criblage de molécules, les iPS peuvent déjà être utilisées comme alternative à l’embryon.

3/ Le principe d’interdiction de la recherche sur l’embryon humain ne limite pas les travaux sur l’embryogénèse  qui se développent grâce à la recherche sur l’embryon animal.

4/ L’argument diminuant l’importance des iPS (qui conserveraient 1 mémoire de leur tissu d’origine) ne tient  plus scientifiquement : le problème des altérations épigénétiques est résolu.   

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Sur le plan juridique

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5/ La protection de l'embryon humain est garantie par l'article 16 du code civil, la constitution, et le droit européen.

6/ Passer d'un régime d'interdiction de principe à un régime d'autorisation de principe constitue un changement de paradigme inédit au terme duquel le principe fondateur de la protection de l'être humain deviendra une exception à la règle nouvelle de sa non-protection.

7/ Avant d'envisager d'autoriser la recherche sur l'embryon, enjeu majeur qui concerne autant les citoyens que les experts, les responsables politiques doivent organiser des états-généraux, rendus obligatoires depuis la révision de la loi bioéthique de 2011.  

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Sur le plan éthique et politique

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8/ L'embryon est un membre de l'espèce humaine, ce n'est pas une conviction ni une opinion mais un constat scientifique. Or le respect de tout être humain, particulièrement les plus fragiles, est constitutif du pacte républicain et au fondement de notre civilisation. Autoriser la recherche sur l'embryon nous fait quitter le pacte républicain et abandonner nos valeurs fondatrices.

9/ Les responsables politiques sont garants de l'intérêt général. L'enjeu de la recherche sur l'embryon ne relève pas de l’intérêt général mais de l’intérêt particulier - et financier - de l’industrie pharmaceutique qui considère l’embryon humain comme un moyen simple et peu onéreux de modéliser des pathologies, et cribler des molécules alors que les cellules iPS peuvent rendre ce service.

10/ Avant d'engager une telle révolution juridique et éthique la moindre des choses est d’exiger de l'Agence de la biomédecine qu'elle honore son obligation légale de présenter au Parlement un bilan comparatif de la recherche sur les cellules souches. Les responsables politiques doivent se réapproprier leur responsabilité en matière d'enjeux bioéthiques que l'Agence de la biomédecine a captés depuis sa création (2004). Et ce alors même que dans ce domaine de la recherche sur l'embryon l'ABM est juge et partie [1].

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Source : Philippe Gosselin

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[1] Depuis 2004, l’ABM a délivré 173 autorisations relatives à la recherche sur l’embryon, pour seulement 9 refus. 71 concernent des protocoles de recherche, 24 la conservation de cellules souches embryonnaires et 46 l’importation de lignées de cellules souches embryonnaires.