Source [Le Figaro] Le parti-État qui gouverne la Chine a une responsabilité gigantesque dans cette pandémie. Il cache son véritable bilan humain en Chine et réécrit l’histoire de cette crise sanitaire à son avantage, argumentent Marie Holzman, sinologue, Vincent Brossel, membre du Comité Liu Xiaobo et Alain Bouc du Groupe Chine de la Ligue des droits de l’Homme.
Au compte-gouttes des informations indépendantes commencent à sortir de Chine sur le réel bilan humain du Covid-19. Il est effrayant. Un site chinois réputé Regard froid sur l’économie et la finance va jusqu’à faire état de 59 000 morts pour la seule ville de Wuhan, et de plus de 97 000 pour toute la Chine. Pour contourner la censure, des citoyens de Wuhan ont notamment observé la livraison des urnes funéraires avant la Fête des morts qui a lieu le 5 avril. Depuis le 23 mars, les funérariums de Wuhan distribuent en moyenne 3 500 urnes par jour aux familles des victimes. Plus que le bilan officiel de 3 400 morts… Ces chiffres commencent à circuler dans les médias asiatiques. Qui pouvait croire que la Chine avait été mise à l’arrêt pour un virus qui n’allait causer la mort «que» de 3 200 personnes dans le pays le plus peuplé de la planète? Le nombre de personnes contaminées en Chine dépasserait le million.
Pourtant l’OMS et la communauté internationale acceptent poliment les chiffres officiels chinois qui sont relayés dans tous les médias. Le régime chinois aurait-il encore une fois gagné en imposant un mensonge d’État? Un mensonge qui a des répercussions dramatiques puisqu’il explique en partie le manque de réaction des pays européens au début de la crise.
Le président Xi Jinping a donc une responsabilité colossale dans la pandémie qui frappe le monde. Il a préféré préserver ses intérêts plutôt que la santé de centaines de millions de personnes. En plus de mentir, le régime chinois s’emploie à jeter le doute sur l’origine du virus. Le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Zhao Lijian, a déclaré que l’armée américaine aurait introduit le virus à Wuhan. Peu de temps auparavant, des officiels chinois ont parlé de «virus japonais».
Cette pandémie arrive en effet dans un moment important pour le Parti communiste chinois (PCC). Xi Jinping a relancé des campagnes de propagande et de répression sans équivalent depuis 25 ans, avec l’enfermement massif des Ouïghours et des voix dissidentes. Mais il fait aussi face à des crises plurielles, que ce soient les manifestations à Hong Kong, la réélection à Taiwan d’une Présidente qui résiste aux pressions du PCC ou encore un ralentissement économique.
La pandémie est pour Xi Jinping et l’appareil du PCC une opportunité de relancer sa mécanique de contrôle et d’étouffement de la contestation. Dépeint par la propagande comme le commandant suprême victorieux de «la guerre du peuple» contre le coronavirus, Xi Jinping reprend la main après une crise qui a plongé la Chine dans le doute. Et la presse a été invitée à célébrer l’héroïsme des sauveteurs plutôt que les souffrances des populations ou les négligences de l’administration. La construction d’un hôpital en dix jours a ainsi été un contre-feu médiatique efficace pour masquer les insuffisances du système de santé.
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