C'est à hurler. La réponse du monde politique au message du 29 mai est accablante. Le pays est à cran, les électeurs se cabrent et sous nos yeux, les ministres s'accrochent désespérément à leur maroquin : qui refuse de céder sa place, qui implore un ministère régalien, qui exige des femmes au gouvernement.

Les éléphants réclament leur dû sur les restes décomposés d'un pouvoir qui, insensiblement, glisse dans la rue.

Droit dans ses bottes, le vieux monarque s'engage à l'opposé de la direction indiquée par son peuple. Il soliloque avec des concepts dont les Français n'ont cure. Il place ses hommes et son favori, le moins populaire, le plus caricatural, le plus cloné.

C'est Louis-Philippe en 1848. Il n'a rien vu parce qu'il ne veut rien voir.

Il ne veut surtout pas voir que les Français ont dit non à la logique d'un traité incompréhensible, qui se pare des mérites de l'unité mais que chacun interprète à sa guise, État ou citoyen. Une logique de l'efficacité façon circulaire Bolkestein. Une logique de souveraineté partagée avec un pays musulman étranger à notre culture et à notre civilisation. Une logique sociale qui bâtit l'Europe comme le prolongement d'une économie globalisée. Une logique démocratique qui attribue des pouvoirs centraux à un organe technocratique anonyme.

Et nos ministres se battent comme des chiffonniers pour conserver leur place. C'est pathétique. Ils dansent sur un volcan, ces somnambules de la politique, éclatants de compétences tant qu'ils ne sont pas aux prises "avec cet animal ondoyant et divers dont les fonctionnaires ont horreur, l'homme que des catastrophes ramènent à l'état sauvage..." (Lartéguy). Que penser quand un désaveu aussi cinglant ne les arrête pas une seconde, sinon pour réfléchir sur les moyens de contourner l'obstacle ?

On peut s'attendre à des heures inquiétantes, très inquiétantes. Le gotha politique fonctionne comme si la France n'était qu'un territoire, et trop petit pour l'envergure de ses compétences. C'est de folie et d'audace dont l'Europe a besoin, et d'abord du dévouement des Français pour leur propre pays. Ce n'est pas une crise économique mais une crise spirituelle que traverse notre nation. Le remède n'est ni technique, ni financier, ni extérieur, il est en nous. Comment réformer avec une élite conservatrice si dépourvue de la plus élémentaire générosité qui s'appelle l'esprit de sacrifice ? Pour se sacrifier, il faut croire...

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