Appel pour un nouveau catholicisme social

Source [La Vie] Denis Moreau, Tugdual Derville, Joseph Thouvenel, Gaultier Bès, Patrice Obert… dix-neuf intellectuels catholiques, issus d’écoles de pensée différentes, lancent un appel pour un nouveau catholicisme social. Face à la crise des gilets jaunes et la question sociale contemporaine, « plus grave encore que celle du 19e siècle », ils veulent élaborer un carrefour en vue de l’édification des communautés solidaires.

La fracture sociogéographique qui s’est progressivement creusée en France est en train de disloquer notre pays. Aujourd’hui, la « France périphérique » présente un potentiel insurrectionnel parce qu’elle n’en peut plus. Ce peuple de France veut vivre dignement du fruit de son travail et il le fait savoir ; il veut vivre uni dans une communauté de destin, non comme une catégorie reléguée économiquement et culturellement, exclue du récit global du « nouveau monde » financiarisé, où l’idole-argent absorbe le politique.

Cette France périphérique marginalisée par la mondialisation concerne 60 % de la population, selon la classification du géographe Christophe Guilluy et davantage selon d’autres. Elle n’en peut plus de devenir un désert sans bureau de poste, sans maternité, sans médecin, sans usine, sans ferme et sans train ; elle n’en peut plus de payer toujours plus de taxes alors même que les services publics sont démantelés ; elle refuse la marche forcée vers la mondialisation économique ultralibérale et la globalisation culturelle sur lesquelles elle n’a aucune prise et qui se décident sans elle.

Il y a le feu. Notre maison commune France brûle. Cette atmosphère possiblement insurrectionnelle est inquiétante. Pour le gouvernement, l’équation semble insoluble : on ne peut emmener à marche forcée un peuple vers un « nouveau monde » qui le rejette. Devant un tel contexte, la situation pourrait devenir hors de contrôle. Or, dans la révolution, c’est toujours le plus fort qui impose sa loi, pas le plus juste.

Comment instaurer un dialogue social quand il n’y a plus de langage commun entre la sphère financière des mégalopoles et la France des périphéries, entre “les individus de n’importe où“, initiés et mobiles, et “le peuple de quelque part” ? Sur quelle réalité institutionnelle peut s’appuyer un tel dialogue quand les corps intermédiaires ont été sapés et que la représentation politique est décrédibilisée ? Comment trouver un chemin commun quand s’opposent "culture urbaine" mondialisée et culture populaire ?

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