Le vote de la constitutionnalisation de l’avortement par le Congrès réuni à Versailles est riche en enseignements. Cet épisode législatif constitue un revers pour les défenseurs de la vie ; il montre également la perte d’influence de l’Église catholique d’où provient l’essentiel des bataillons pro-vie. La lâcheté de certains élus n’est quant à elle qu’anecdotique. En revanche, l’américanisation de notre vie politique se confirme.

L’immense majorité des Français est favorable à l’avortement, il n’y a jamais eu autant d’avortements en France mais les députés et les sénateurs ont cru judicieux d’inscrire ce « droit » dans la Constitution. Joujou macabre en forme de béquille sociétale, en attendant l’euthanasie, la constitutionnalisation de l’avortement ajoute un verrou à la législation existante en matière d’« interruption Volontaire de Grossesse ».

Un verrou qui place par ailleurs l’avortement sous le haut patronage des vieillards du Conseil constitutionnel et devrait rendre toute modification en faveur de la vie plus compliquée à court et moyen terme.

 

La volonté de constitutionnaliser ce « droit » est une pure réaction au recul de la législation en la matière aux États-Unis. En voyant la Cour Suprême étasunienne permettre aux États de revenir sur l’IVG, le personnel politique français s’est jeté sur l’occasion pour affirmer haut et fort son progressisme.

Réflexe pavlovien pour parlementaires incompétents, ce texte nous vaut une salve d’autosatisfaction d’élus incapables de redresser le pays (la majorité) et incapables de renverser la majorité (opposition). On signalera ici la courageuse opposition d’une poignée de députés et l’amendement de suppression du sénateur Ravier.

 

À l’heure où le président parle de « réarmement démographique », on rappellera qu’en la matière il n’a jamais usé de la gâchette. On encourage au contraire un peu plus l’élimination d’enfants dans le ventre de leur mère.

Avec plus de 200 000 enfants avortés par an, le « problème démographique » pourrait pourtant être réglé plutôt que de miser sur l’importation de populations que l’on déracine… Pour cela, il faudrait du courage et favoriser l’accueil de la vie par des politiques sociales audacieuses comme le font certains pays comme la Pologne ou la Russie. Par ailleurs, une politique familiale n’implique pas nécessairement un recul du travail des femmes. Aidées par un système social avantageux et protégées par la société, celles-ci peuvent poursuivre leur carrière professionnelle.

 

Ceux qui pestent contre l’immigration mais défendent l’avortement sont inconséquents. Une civilisation existe par la vitalité de sa population. Une population qui ne veut pas se reproduire est condamnée à mourir, à être remplacée. Refuser l’élan vital et le risque qu’il implique sont le lot d’une société qui meurt et qu’il convient peut-être même d’achever.

La question de l’avortement est le plus grand tabou de notre temps. On l’a vu avec la polémique CNews où un journaliste a exposé simplement les chiffres de l’avortement et s’est vu condamné par l’ensemble de ses collègues. Ceux qui hier pleuraient sur la liberté d’expression pour avoir été rappelés injustement à l’ordre par l’Arcom ont appliqué à leur collègue ce que la gauche progressiste leur infligeait. Ils ont trouvé la ligne à ne pas dépasser. Il est plus facile, aujourd’hui sur CNews, de nier les massacres israéliens en cours à Gaza que de s’exprimer contre l’avortement.

 

La liberté d’expression sera probablement la grande perdante de cette constitutionnalisation de l’avortement. En sanctuarisant cette pratique, le législateur pourra facilement donner les armes de la censure contre les détracteurs de l’IVG. La clause de conscience sera aussi menacée comme l’a évoqué le sénateur Bruno Retailleau. Ce dernier en sait quelque chose puisqu’il a lui-même mis sa conscience catholique de côté lorsqu’il s’est dit « personnellement pour la loi Veil ».

 

Olivier Frèrejacques

Président de Liberté politique