M. Blanquer, « n'attendez pas qu'un mort survienne parmi nos rangs »

Dans une lettre du 18 mars, les enseignants d'un collège de Saint-Denis (93) lancent un cri d'alarme à la suite de l'agression d'un des leurs.

Monsieur le Ministre,

Nous sommes enseignants au collège La Courtille, à Saint-Denis (93).

Le vendredi 22 février, notre collègue d'histoire-géographie s'est fait agresser devant l'établissement par quatre jeunes. Ce jour-là, une rencontre sportive (tournoi d'ultimate prof-élève) avait lieu. Il est arrivé légèrement en retard, en même temps qu'un élève qui essayait de rentrer dans le collège pour assister au tournoi. Cet élève était en train de se faire malmener par ces quatre individus. Notre collègue a vaillamment décidé de s'interposer pour le faire rentrer dans l'établissement. Cette attitude n'a pas plu aux quatre assaillants, qui se sont empressés de le rouer de coups : son visage était complètement tuméfié, son pouce cassé, et ses côtes fêlées. Le collègue qui l'a retrouvé ne l'avait, de prime abord, même pas reconnu. Pour ceux d'entre nous qui étaient là ce jour, nous en ressortons choqués et marqués à vie. Cet après-midi, veille de vacances scolaires, était censé être un moment de partage avec nos élèves, et s'est transformé en cauchemar. Nous avons libéré les élèves et essayé d'apporter tout notre soutien à notre collègue. Il s'est littéralement fait passer à tabac, alors qu'il venait de Paris pour jouer avec ses élèves, et qu'il a fait preuve de bravoure en voulant en défendre un. Il a été hospitalisé, et seulement deux de ses agresseurs ont été interpellés. Aujourd'hui, il remarche à peine et ne reviendra plus enseigner dans notre établissement.

Les vacances n'ont pas su atténuer notre colère. Depuis lundi 11 mars, jour de la rentrée, la totalité de l'équipe enseignante (37 personnes), exerce son droit de retrait, et l'établissement connaît une mobilisation sans précédent. (...) Le premier jour, la DSDEN 93 nous a fait savoir qu'ils n'accepteraient pas notre droit de retrait, au motif qu'ils avaient déployé une équipe de sécurité mobile devant l'établissement, et prévenu le commissariat, et que « le danger n'était pas imminent ». Dans tous les communiqués que nous avons publiés, nous revenons sur cette décision et expliquons pourquoi elle nous paraît inappropriée. Une des multiples raisons est que, alors que l'équipe de sécurité mobile était sur notre établissement le mardi 12 mars matin, l'établissement voisin, le lycée Paul Eluard, a été le théâtre de violences sans précédent : une quinzaine d'individus, armés de marteaux, de battes de baseballs, et de bombes lacrymogènes, se sont introduits dans l'établissement pour s'en prendre à d'autres élèves. Le lycée a été fermé l'après-midi même par la préfecture de police. (…)

Nous avons honte. Nous avons honte de recevoir tous les jours 400 élèves dans des locaux délabrés, insalubres, mal chauffés, aux odeurs pestilentielles, et surtout, nous avons honte de ne pas pouvoir assurer la sécurité de nos élèves, et la nôtre. (…)

Ce même vendredi (13 mars, NDLR), nous sommes allés à un rassemblement en soutien au Cocci Market, le magasin de la cité où nous allons faire nos courses, car les gérants ont été tabassés par des jeunes le vendredi 8 mars, trois jours avant la rentrée. À ce rassemblement, nous avons croisé un des quatre individus qui avait agressé notre collègue, et se promenait en toute impunité devant nous.

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