Élections législatives obligent, Emmanuel Macron a procédé à des ajustements pour ce qui constituera le deuxième (ou second ?) gouvernement Borne. Comme souvent avec le président, cet aménagement a été l’occasion de menues surprises qui trahissent une incapacité terrible à se renouveler.
Pas les meilleurs, et pour le pire
L'arrivée du gouvernement Borne 2 a engendré le recyclage d’une partie des équipes précédemment en place avec les départs des perdants aux élections législatives et celui de Damien Abad, victorieux transfuge des Républicains empêtré dans des accusations de viols.
Accusations d'ordre (ou de désordre) sexuel qui n'ont pas eu raison du ministre Chrysoula Zacharopoulou, qui elle, restera en place. Un médecin, François Braun, prend la place du ministre de la Santé sortant Brigitte Bourguignon. Un ancien communiste se voit confier le logement et un Modem le numérique. Deux portefeuilles centraux dans la période actuelle qui ne sont confiés qu'à des ministres délégués. Outre quelques mouvements relevant de la cuisine interne, on peut aussi assister au retour de Marlène Schiappa, cette fois-ci à "l'économie sociale et solidaire", chargée également de la vie associative... Un élément qui peut inquiéter sur le risque de voir cette fidèle du président s'attaquer à la liberté associative notamment en conditionnant les défiscalisations de dons.
Quant à la nomination d'Olivier Véran dans un rôle de porte-parole et de ministre délégué au "renouveau démocratique", elle a tout d’une provocation.
Cette manière de faire du neuf avec du vieux témoigne d’une véritable difficulté pour la majorité à se renouveler alors même que son nom pour les élections législatives, "Renaissance", laissait entrevoir un possible changement de ligne, ou tout au moins un renouvellement de façade.
Un début de législature sous menace permanente
La période qui s’ouvre pour ces ministres et pour les députés semble précaire. Ministres et députés sont sous la menace permanente d'une épée de Damoclès suspendue au-dessus de leur tête. De quoi, possiblement, assurer la soumission totale chez les uns et la recherche du compromis chez les autres.
Si le gouvernement n’avance pas, le président pourra procéder à une dissolution. Une telle hypothèse fera deux types de victimes : des victimes gouvernementales et des victimes parlementaires. Ces deux groupes d’élus n’ont aucun intérêt à une dissolution ce qui laisse la voie du consensus envisageable sur plusieurs sujets, notamment celui qui s’opère électoralement à moindre frais : la bioéthique.
Le profil des nouveaux élus d'opposition (essentiellement Nupes et RN) peut également être un atout pour la majorité. Les primo-arrivants au Palais Bourbon, qu’ils soient jeunes ou non, pourraient être tentés de défendre leur siège âprement, faute de pouvoir un jour espérer gagner autant dans le privé ou dans le public qu'avec leur siège de député, plus que pour les convictions au nom desquelles ils furent élus.
Le rôle de la société civile et de l’écosystème associatif est de les rappeler à leurs devoirs et d’user des outils de pression nécessaires pour qu’ils accomplissent leur tâche. Faire gagner demain un député qui partage vos idées est hautement improbable, en revanche faire plier celui qui est en place en faisant signer des pétitions locales ou en mobilisant ses électeurs est possible. Enfin, demain, il sera toujours temps de faire perdre le député "de votre camp" qui n’a pas respecté sa feuille de route. En parvenant à maintenir une pression forte sur les élus, l’épée de Damoclès n’est plus seulement la dissolution présidentielle mais aussi le risque de défaite.
Olivier Frèrejacques, délégué général
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