Les difficultés rencontrées pour mettre en place des mesures pourtant anecdotiques dans le cadre de la loi immigration illustrent une donnée essentielle du combat politique des années à venir. Partout où la gauche et son idéologie reculent, les tenants de l’ordre établi se cachent derrière l’État de droit, la Constitution et in fine derrière des tribunaux souvent acquis à leur cause.

En déclarant que des mesures négociées avec LR étaient contraires à la Constitution, le gouvernement a non seulement désavoué son propre travail mais s’est surtout abrité derrière le « juge suprême » pour ne pas endosser le vote d’une loi sans grande importance pratique mais à la teneur symbolique forte et frappée du sceau de l’infamie par la gauche.

 

Une gauche « suprémaciste »

 

Les gauches Insoumise, socialiste, écologique et communiste se sont insurgées contre un texte qui serait en rupture avec l’histoire récente du pays. En jouant le drame et en agitant le monde associatif, mais aussi les écoles de commerce qui savent l’intérêt de faire venir de la main d’œuvre à bon marché, les forces « progressistes » ont montré qu’elles avaient toujours une mainmise idéologique forte sur le pays. Pourtant, une fois détricoté et lavé de ses mesurettes vaguement droitières, le texte penchera plutôt à gauche en facilitant des milliers de régularisations.

 

Elément piquant de ce petit mélodrame, la gauche considère le principe de préférence nationale comme inadmissible… Et pourtant il est appliqué dans tous les pays du monde. Seule la France se trouverait être le phare des nations et disposerait d’un système humaniste. Une vision bien chauviniste du pays, suprémaciste diront les plus taquins.

 

Les garde-fous de la République contre le peuple

 

En prenant un peu de recul sur ce texte sans intérêt et sur les réactions surjouées des acteurs en présence, on peut tirer quelques conclusions sur ce qui nous attend pour les années à venir.

Lorsqu’un texte est considéré comme « trop dur » le juge constitutionnel l’écarte s’adjugeant un pouvoir législatif sans mandat. Parallèlement, des « contre-pouvoirs » se mettent en branle.

Le maire de Paris Anne Hidalgo affirme vouloir « rentrer en résistance » contre l’Etat si la loi immigration est votée et prend pour exemple les grandes villes polonaises comme Varsovie et Gdansk où ses collègues s’opposaient au gouvernement conservateur. Des grandes villes étasuniennes avaient également suivi cette voix contre Donald Trump. Par ailleurs, les 32 départements de gauche que compte le pays refusent de restreindre l’allocation autonomie et la patronne de la CGT Sophie Binet a appelé à la « désobéissance civile ».

 

Le président de la Commission des lois Sacha Houlié a déclaré à propos de l’opinion majoritaire des Français contre l’immigration : « Je ne pense pas qu'il faille satisfaire toutes les demandes populaires », témoignant du décalage entre les élites institutionnelles et les aspirations des Français et laissant comme une impression de déjà-vu entre d’un côté un pays légal privilégié et de l’autre un pays réel opprimé.

 

Le pouvoir des juges et les prémices d’un combat métapolitique

 

À ces « résistances » s’ajoute le poids culturel avec les universités, les écoles de commerce, les administrations et le monde associatif qui poussent contre les mesures hostiles à l’immigration.

Surtout, les juges demeurent les plus fidèles gardiens du temple migratoire dont le pouvoir de nuisance est majeur bien que ceux-ci ne bénéficient pas d’un mandat reçu des électeurs.

Le risque de voir émerger un gouvernement des juges pour préserver les normes culturelles défendues par la gauche n’est pas nul et pourrait constituer un des derniers verrous à faire sauter pour mettre en place une politique migratoire audacieuse. Si le Rassemblement National se félicite d’une « victoire idéologique » avec le vote de la loi immigration, il ne s’agit ici que d’une bataille, celle de l’opinion. Gagner des élections est une chose mais il reste tout un environnement à conquérir, c’est pourquoi, aujourd’hui, aucune force de droite n’est en mesure de changer la donne.

 

Préparer les conditions de la mise en place de mesures d’envergure notamment en matière migratoire est un travail de longue haleine qui se joue également hors des urnes.

En matière de presse, des changements d’importance ont eu lieu notamment avec l’émergence des médias alternatifs et le développement de la galaxie Bolloré qui a apporté un peu de pluralisme dans les grands médias. Le développement des sphères associatives à droite a également été favorable mais du côté des tribunaux, de l’Education nationale et des administration le compte n’y est pas du tout.

 

Olivier Frèrejacques

Président de Liberté politique