Source [insolent.fr] Avouons d'abord que le positionnement politique précis du candidat Lassalle nous échappait en grande partie déjà en 2017 et nous semble encore peu compréhensible 5 ans plus tard. En cela même, cet indépendant exprime une sorte de protestation qui peut mériter sympathie, tant qu'elle demeure non-violente. Il semble même avoir apporté ces dernières années des occasions de sourire parmi ses collègues de l'Assemblée nationale.
En tout cas cet élu rural atypique a obtenu au premier tour de scrutin 3,13 % des suffrages exprimés, soit plus que le candidat du parti communiste, plus que le score de la maire de Paris, ce qui pourrait symboliquement nous rappeler que la France des villages attire plus la sympathie que la France des grandes villes.
Or, nous apprenions ce 25 avril que le Conseil constitutionnel envisage de le sanctionner pour avoir légèrement contrevenu aux règles du Code électoral sans évidemment pourtant ka moindre fraude, la moindre entrave aux libertés d'autrui, la veille lors du second tour. Il avait en effet osé mettre en scène son abstention. Cette protestation devant le bureau de vote de sa mairie visait à l'évidence la fin de partie biaisée et la médiocrité du débat
Il savait, nous assure-t-on gravement, qu’il se “mettait en danger” en se déclarant “abstentionniste devant l’urne”. Les retombées n'ont pas tardé : la Commission nationale de contrôle de la campagne électorale en vue de l’élection présidentielle a cru bon de saisir le Conseil constitutionnel, tombant d'ailleurs dans le panneau de cette petite provocation qui serait sans cela passée inaperçue.
Avant le second tour, Jean Lassalle avait d'abord annoncé qu’il voterait blanc. Puis, il a changé d’avis.
Le jour venu, l’ancien candidat à la présidentielle s’est filmé devant l’urne où, au moment de glisser son enveloppe, il décide finalement de s’abstenir.
“Je me suis dit que le vote blanc n’était plus à la hauteur”, explique-t-il.
Or, cette mise en scène contrevient en effet au Code électoral.
Seulement voilà : si 13 millions de citoyens se sont abstenus, bien qu'inscrits sur les listes électorales, ce qui résulte d'une démarche volontaire, et n'est pas le cas de tous les Français en âge de voter, on doit rappeler que le vote blanc ou nul n'est toujours pas comptabilisé comme un suffrage exprimé.
Ce 24 avril, en effet, 3 millions d'électeurs ont fait l'effort de se déplacer pour mettre dans l'urne un bulletin blanc ou un bulletin nul mais que personne, dans les médias, ne semble désireux de s'intéresser à leur démarche protestataire.
Ceci contrevient, en fait, à l'esprit de la Loi de 2014 qui prétendait reconnaître les bulletins blancs. Loi mal rédigée, et insuffisante, car en les séparant des bulletins nuls, elle amoindrit de façon artificielle leur portée statistique. Il s'agit des gens qui, effectivement, jugent insuffisante l'offre politique de nos démocraties. Et, à cet égard, un bulletin "nul" marque en général une dissidence plus forte… On doit le tenir pour encore plus parlant qu'un bulletin "blanc". Pour être réputé blanc celui-ci doit être "de même format" que ceux des candidats. Mais on ne dispose pas de tels spécimens sur la table des bulletins… et il faut être informé du fait qu'une enveloppe vide suffit. Oui, Lassalle a raison le bulletin blanc "n'est plus à la hauteur".
Pour l'instant, nous en sommes réduits à déplorer que 3 millions de Français, plus de 8 % des votants effectifs, soient tenus pour quantité négligeable, servant tout juste à diminuer en apparence le nombre des abstentions comptabilisées.
Si demain une sanction quelconque punissait le lanceur d'alerte Lassalle, cela confirmerait dans l'esprit de nombre de nos compatriotes, que le régime envisage plus généralement de réprimer les dissidents.
Envie de réprimer ? Le président Macron employa même un jour un mot bien plus grossier pour désigner un désir qui le taraudait.
Son prédécesseur Pompidou était plus sage qui conseillait à ses collaborateurs de cesser d'enquiquiner les Français.