[Source: Figaro Vox]
FIGAROVOX/TRIBUNE - Le Parlement portugais vient de valider la possibilité pour toutes les femmes de recourir à la PMA et autorise la Gestation Pour Autrui, à titre gratuit. Pour Anne-Sixtine Pérardel, la GPA est une forme nouvelle de violence faite aux femmes.
Après le manifeste des 130 médecins paru dans Le Monde le 17 mars 2016, nous voici de nouveau confrontés à cette question de la Procréation Médicalement Assistée avec nos voisins portugais. Leur Parlement vient de valider la possibilité pour toutes les femmes de recourir à la PMA. Ainsi les célibataires et les lesbiennes peuvent-elle maintenant avoir recours à cette pratique dans ce pays. Mais surtout, le Portugal autorise désormais la Gestation Pour Autrui, à titre gratuit.
Selon Libération, le choix du Parlement portugais d'autoriser la GPA viserait à aider les couples infertiles, notamment hétérosexuels, à avoir un enfant.
Mais pouvons-nous accepter que dans ce but «altruiste», nous utilisions le corps d'une femme pour produire un enfant, et cela sans la moindre contribution pour les 9 mois de grossesse «commandés»?
Par cette autorisation, le Parlement portugais s'installe officiellement dans ses illusions: pour lui, il n'y a pas utilisation de la femme comme «container», ni marchandisation d'enfant, parce qu'il n'y a pas d'argent en échange des 9 mois de grossesse et du bébé. Avec cette gratuité du geste (le geste est plutôt un long mouvement!), être enceinte passe pour être une pure partie de plaisir, et nous recevons l'idée qu'aucun lien n'est tissé entre la mère et l'enfant durant la grossesse, et donc qu'une séparation à la naissance n'aura aucune conséquence.
GPA: nouvelle forme de violences faites aux femmes
Mais qui irait «travailler» 9 mois et donner le fruit de son «travail» sans un salaire en échange? Cette manière de procéder est pire que s'il y avait de l'argent échangé. Aucune rétribution: c'est de l'exploitation! Nous avons là une forme de traite d'humains, légalisée sous couvert de gratuité et d'altruisme. Un esclavage moderne encadré par la loi.
Et qui pourrait dénigrer la détresse exprimée par de nombreuses mères porteuses? Beaucoup finissent par s'attacher aux bébés qu'elles ont porté en elles pendant des jours et des jours, et on leur arrache à la naissance - dans le «meilleur» des cas, car dans certains contrats, une période d'allaitement est demandée en plus des 9 mois de grossesse. Nous sommes face à des formes de maltraitances psychologiques, qu'il est urgent de dénoncer.
Prostitution et GPA: une même mentalité
Une personne est respectée dans sa dignité humaine lorsqu'on la prend en compte dans sa totalité, qu'on la voit selon toutes ses dimensions (Corps, cœur, esprit), de manière unifiée. De même qu'il est profondément dégradant et violent de traiter une personne comme un objet purement sexuel (prostitution), regarder une personne seulement pour ses fonctions reproductrices est tout aussi irrespectueux de sa dignité. Autoriser la GPA «altruiste», c'est reconnaître la légitimité d'une pratique qui utilise une femme seulement pour sa dimension «reproductrice». Comment penser que ceci est un Progrès? Comment ne pas voir que cette conception de la femme comme «container» ou «porteuse» est une régression de la société?
Multiplier le nombre d'enfants issus de dons de gamètes anonymes: un choix responsable?
Que ce soit pour la GPA ou pour les PMA (surtout celles de lesbiennes et de célibataires), il est nécessaire d'avoir recours à un don de gamètes. Nous savons les difficultés qu'ont les adoptés quand ils ne peuvent connaître leur origine, nous avons maintenant du recul par rapport à la même quête d'origine chez les enfants nés de donneurs anonymes. Pourquoi continuer à développer des pratiques qui, on le sait pertinemment, amènent à des problématiques complexes d'identité et de filiation. En multipliant les PMA et en légalisant la GPA, on multiplie les possibilités que des enfants soient blessés par une ignorance quant à leur origine, et obligés de vivre toute leur vie avec ce questionnement si difficile à vivre parfois. Nous cherchons à pallier l'infertilité d'hommes et de femmes, mais nous aboutissons une situation injuste pour les enfants. Il est important de mesurer les conséquences de ce type de lois… La fin ne peut justifier les moyens.
Et si l'on arrêtait les dons de gamètes anonymes? Pas d'ovocytes ou spermatozoïdes, pas de PMA/GPA. Pas de PMA/GPA, pas de bébés. Pas de bébés… Pas de bébés. Et retour à la case départ: le désir d'enfant. Comment y répondre au mieux? Ces cigognes modernes, GPA/PMA, vont-elles vraiment aider les couples infertiles?
Nous savons les difficultés qu'ont les adoptés quand ils ne peuvent connaître leur origine, nous avons maintenant du recul par rapport à la même quête d'origine chez les enfants nés de donneurs anonymes.
En tant que conseillère en vie affective et sexuelle, il me semble qu'est minimisé un problème très important pour toutes ces personnes qui ne peuvent avoir un enfant naturellement et qui ont recours à une PMA ou à une GPA. La science et la loi leur permettent d'obtenir un bébé. Mais dans la quasi totalité des cas, aucun accompagnement n'a été fait envers ces personnes blessées par leur condition d'infertilité. Des bébés sont donc donnés à des parents qui n'ont pas fait le deuil de leur fonction procréatrice naturelle, qu'elle soit défaillante ou simplement inapte en raison des pratiques homosexuelles d'un couple. Or quand ce deuil n'est pas accompli et que les besoins profonds sont niés, le bébé vient remplir ces besoins si importants. Il devient alors le médicament de ses parents, qui sans forcément en être conscients, agissent avec égoïsme. Il est absolument fondamental que la blessure liée à l'infertilité soit reconnue, accompagnée et pansée. Le bébé ne pourra désiré pour lui-même que dans ce contexte de deuil accompli. Il est donc urgent de développer un accompagnement pour ces couples infertiles afin d'écouter leur souffrance, et ce avant même de leur proposer une technique pour pallier à leur manque. Faire une PMA ou une GPA n'est pas anodin, et croire que le bébé obtenu pourra être une réponse adéquate à la complexité des difficultés, émotions, souffrances qui se posent quand on ne peut pas avoir d'enfants naturellement, est une illusion. Sur le moment, cet enfant «réussira» peut-être à être une réponse. Mais une souffrance enfouie est une souffrance dont on prend le risque qu'elle ressurgisse un jour…
Le business exploitant la souffrance des hommes n'est pas prêt de s'arrêter. L'abrogation internationale de la GPA est la seule solution pour endiguer ces trafics de femmes et d'enfants. Le Portugal veut aider les couples infertiles hétérosexuels? Qu'il développe les naprotechnologies!
Anne-Sixtine Pérardel
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