Source [Les 4 vérités] En ce temps de pandémie, le débat européen a repris de plus belle. Les tenants du « plus d’Europe » prônent à chaque crise d’intégrer encore davantage l’Union européenne, mettant son échec sur le compte d’une insuffisance d’Europe fédérale.
La figure de proue de cette thèse est aujourd’hui le Président Macron qui ne manque jamais d’appeler à une « souveraineté européenne » qui supplanterait les souverainetés nationales des États membres.
Lors des dernières élections européennes, il a ainsi envoyé à tous les médias une lettre, véritable épître à la manière de saint Paul, appelant à une Europe fédérale. Cette missive a fait un flop et suscité de la colère parmi de nombreux Européens qui n’ont pas apprécié d’être chapitrés par le président français.
Ce « toujours plus d’Europe » est, en réalité, une fuite en avant idéologique bien éloignée des réalités.
Le monde politique allemand, quant à lui, n’a eu de cesse de prendre le contre-pied des positions exprimées par Emmanuel Macron : demande du partage de notre siège au Conseil de sécurité des Nations unies, abandon de Strasbourg comme siège du Parlement européen, lettre ouverte d’Annegret Kramp-Karrenbauer (AKK) en réponse à Emmanuel Macron prônant le retour à plus de coopération intergouvernementale en Europe.
Le 5 mai dernier, la Cour constitutionnelle fédérale allemande a rendu un arrêt qui a provoqué une certaine panique dans le monde technocratique.
Elle critique fermement la politique d’achat des OAT (bons du Trésor) par la BCE. La Cour relève que la politique d’achat de la BCE est de nature à mettre en échec la responsabilité du Bundestag en matière budgétaire. En conséquence, la BCE est tenue d’expliquer sa politique d’achat des bons du trésor.
Le 18 mai dernier, un pré-accord a été conclu entre la chancelière Merkel et le Président Macron pour permettre un emprunt de 500 milliards d’euros par la Commission de Bruxelles.
Les fameux 500 milliards d’euros « lâchés » par Merkel ne sont, en réalité, que l’acceptation d’avoir un budget doublé dans les trois ans à venir, financé par l’emprunt, mais il reste à déterminer qui bénéficiera de cette manne, quelles politiques de l’UE seront bénéficiaires et quelles seront les conditions d’attribution.
Les pays qui recevront ces fonds devront-ils respecter des conditions de réforme et être de fait placés sous la tutelle de la Commission ? Tous les États de l’UE seront-ils d’accord ?
Au demeurant, le débat se portera d’abord en Allemagne car les traités n’autorisent pas les emprunts par la Commission. Les braves juges de Karlsruhe vont sans doute rappeler que l’article 125 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) interdit à l’Union « de répondre des engagements des administrations centrales ». De plus, nombre de députés allemands sont hostiles à ce processus d’emprunts.
Mais une chose est certaine, cet emprunt s’inscrit dans le cadre financier pluriannuel (CFP) 2021-2027 du budget ; il ne s’agit pas de créer un budget de la zone euro dont la fragilité s’accroît. Les prétendus « engagements allemands » pour un budget de la zone euro que le Président Macron croit déceler dans des propos de la chancelière relèvent de l’autosuggestion.
Sur ce point majeur, l’Allemagne refuse de payer, on ne peut nourrir aucun doute à ce titre.
L’alternative est simple : poursuivre une Europe chimérique ou construire une Europe des coopérations, à la carte, tout en conservant un marché intérieur plus adapté avec l’abandon du « tout concurrence » et la mise en place d’une politique industrielle pour protéger nos entreprises.
Quant à la zone euro, elle est née avec le handicap congénital de ne pas reposer sur une zone économique optimale. Portugal, Italie, Grèce et Espagne – auxquels il convient d’ajouter la France – subissent une monnaie trop forte, alors qu’elle est trop faible pour l’Allemagne. C’est la quadrature du cercle.
La réalité éclate désormais : le Traité de Maastricht (1992) a créé une UE artificielle et non viable ; les règles qu’il a instituées sont autant de carcans économiques inadaptés aux temps de crise. Les États devraient décider de se libérer de ces règles obsolètes, en rétablissant, par exemple, les avances gratuites et perpétuelles des banques centrales aux États pour financer les investissements et relancer l’économie sans emprunter, comme cela existait avant 1992, n’en déplaise à l’Allemagne !
À défaut, l’UE est dans une impasse mortifère.
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