Le 15 juin dernier, les députés européens ont approuvé à une faible majorité un programme de 50 milliards d'euros pour la recherche (7e PCRD, 2007-2013). Ce Programme Cadre Recherche et Développement consacre 2 milliards d'euros aux biotechnologies et sciences du vivant.
Ce point a fait l'objet de longs débats car il s'agissait de décider si l'Europe devait ou non financer la recherche embryonnaire.
Trois positions se sont dégagées autour des amendements déposés :
1/ Le soutien au financement de toute recherche sur les cellules souches humaines, adultes et embryonnaires (le prélèvement de cellules souches sur l'embryon entraîne sa destruction). Cette position était conduite par Philippe Busquin, ancien commissaire chargé de la Recherche, membre de la Commission industrie et recherche (socialiste, Belgique).
2/ Le refus de financer toute recherche qui utiliserait des embryons humain, soutenu par Peter Liese (PPE-Allemagne) et Hitrud Breyer (Verts-Allemagne).
3/ La position dite de compromis consistant à limiter le financement sur des lignées embryonnaires obtenues avant le 31 décembre 2003 et qui ne nécessite pas de nouvelles destructions d'embryons. Certains considèrent cette position comme le moindre mal. Mais est-il éthiquement acceptable de limiter dans le temps l'utilisation des embryons humains ?
Avant le vote final en session plénière, plusieurs commissions ont été saisies pour avis : la Commission des droits de la femme (Femm) qui a rejeté tout financement de la recherche portant sur les embryons, en février dernier. La Commission juridique (JURI) qui selon les règles du Parlement européen est compétente pour les questions éthiques en matière de nouvelles technologies : elle a adopté le même avis, en avril. Enfin, la Commission industrie et recherche, compétente sur le fond, qui a suivi les recommandations de M. Busquin, au mépris de l'avis précédents et sans ambiguïté des deux autres commissions.
Acharnement
Sur le plan technique, l'utilisation des cellules souches embryonnaires ne donne aucun résultat, ni chez l'homme ni chez l'animal. D'ailleurs, les scientifiques n'avancent plus l'objectif thérapeutique, mais parlent bien de recherche. On peut alors s'interroger sur cet acharnement à vouloir financer ces travaux. Plusieurs hypothèses peuvent être avancées : 1/ la fascination du développement de la vie et la volonté de la maîtriser ; 2/ l'utilisation de matériau gratuit — les embryons surnuméraires, comme objet de recherche. Trop petit pour exprimer son désir de vivre, l'embryon s'en remet au " projet parental " qui décide de sa vie ou de sa mort ; 3/ enfin, les pressions des industries pharmaceutiques qui ont beaucoup investi, sans résultat, alors que les centres de recherches portant sur les cellules souches adultes obtiennent des résultats au-delà de leur espérance.
L'objectif de la recherche embryonnaire n'est plus de soulager la souffrance des malades atteint de maladies incurables, en trouvant de nouvelles thérapies mais de poursuivre la recherche scientifique. Est-ce bien le rôle de l'Union européenne, alors que les fonds sont très largement insuffisants ?
Le vote du jeudi 15 juin au Parlement européen n'est que la première étape d'un long processus de décision. Fin juin, les ministres européens de la Recherche se réuniront pour décider quel type de recherche financer. Plusieurs États membres ont fait savoir qu'ils s'opposaient à la recommandation des députés européens (Autriche, Malte, Pologne, Portugal, Slovaquie...). Ils refusent de financer une recherche qu'ils interdisent sur leur territoire. Puis le Parlement européen se prononcera, en seconde lecture, à l'automne, avant une codécision définitive.
En application du principe de subsidiarité et dans le respect de toute vie, fut-elle embryonnaire, l'Europe renierait ses valeurs fondatrices en autorisant le financement de la recherche embryonnaire.
Il est encore possible de réagir auprès des États membres et des députés européens...avant qu'il ne soit trop tard !
*Elizabeth Montfort est ancien député européen, présidente de Fémina Europa
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