Dimanche dernier, l'Église attirait l'attention, la réflexion et la prière des fidèles sur la situation des migrants. C'est un sujet explosif à bien des égards, en cette période où l'Europe se trouve confrontée à un mouvement considérable de populations venues de régions pauvres et où beaucoup de responsables se demandent comment maîtriser de pareils flux.

De là à reprocher à l'Église son idéalisme, voire son irresponsabilité lorsqu'elle plaide en faveur de la compassion, de l'accueil et de la fraternité, il n'y a qu'un pas aisément franchi. Il est vrai qu'il y a un fort contraste entre l'attitude des autorités politiques, qui n'hésitent pas à construire des murs, à établir des barrages et parfois opposer la force des armes à l'immigration déferlante, et l'attitude de l'Eglise. N'a-t-on pas entendu, en quelques jours, Benoît XVI recommander à notre pays de veiller à la meilleure intégration possible des immigrés et Mgr André Vingt-Trois, archevêque de Paris, s'insurger dans Le Parisien contre les conditions faites aux sans-papiers ?

Ce contexte s'explique sans doute par la différence des missions. L'autorité politique et l'autorité spirituelle obéissent à des impératifs qui s'accordent souvent mal aisément. Les contraintes matérielles, économiques, sociales des uns ne recoupent pas forcément les injonctions morales et spirituelles des autres. Il serait, toutefois, dramatique que cela débouche sur l'incompréhension mutuelle, car ce serait au prix du renforcement du cynisme des uns et de l'inefficience pratique des soucis charitables des autres. Plutôt qu'un compromis hasardeux entre deux points de vue hétérogènes, c'est à une explication en profondeur qu'il conviendrait de parvenir, sans écarter les justes interrogations, les inquiétudes légitimes qui peuvent s'exprimer du côté de simples citoyens qu'il est trop facile de condamner, alors qu'ils souffrent directement des conséquences d'une immigration mal organisée.

Notons aussi qu'il est périlleux de ne pas répondre à certaines objections sérieuses qui concernent la cohabitation des familles spirituelles et des cultures. Lorsqu'on laisse des questions aussi graves que celles posées par l'islam sans réponses autres que dilatoires, on prend le risque de creuser les incompréhensions et d'attiser les réflexes primaires d'autodéfense. Ajoutons que les sociétés les moins accueillantes à l'étranger sont celles qui sont déstabilisées moralement et dépourvues de confiance en l'avenir.

Sans doute, le sujet est-il éminemment délicat. Mais c'est aussi la situation de faiblesse des communautés chrétiennes en Europe qui ajoute à la méfiance devant l'arrivée d'autres traditions religieuses. Certes, on oublie l'apport non négligeable des chrétiens venus d'autres continents, et qui contribuent à la vitalité de nos paroisses. Mais il faut en revenir d'abord au problème général de développement équilibré de la planète qui ne fera pas l'économie d'une régulation des mécanismes de globalisation économique en faveur des pays qui ne profitent pas de l'essor des nations dites émergentes.

*Editorial à paraître dans le prochain n° de France catholique

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