Source [Causeur] : Dorénavant, les célébrités satisfont leur narcissisme (inhérent à la société actuelle) en étalant leur vie et leurs états-d’âmes dans des “oeuvres”. La production artistique ne découle plus de l’artiste mais incarne l’artiste même, dont le sujet doit déchainer les passions.
Il paraît que musiciens, présentateurs et comédiens se livrent de plus en plus sur leur vie intime, dans des livres, des chansons ou sur scène (Le Parisien).
Pour quoi faire ? Pourquoi, aujourd’hui, l’exhibition est-elle devenue non plus une tare mais une obligation ?
Je me demande si cette présentation sans fard de soi ne démontre pas la pauvreté de l’imagination, le caractère relatif du talent, qui a besoin de disposer d’un capital personnel pour s’exprimer.
Mais aussi le narcissisme de certaines personnalités qui s’imaginent que leur “je” est universel et va intéresser bien au-delà de leur cercle immédiat…
J’admets que chaque subjectivité a ses préférences, ses dilections. En ce qui me concerne, il y a des êtres qui sont placés dans la lumière qui ne m’intéressent absolument pas parce que, à tort ou à raison, je suis persuadé qu’ils ne m’apporteront rien, qu’aucune de leurs pensées, aucun de leurs sentiments ne m’enrichiront. Non pas qu’ils soient forcément médiocres mais plutôt à cause de l’intuition qu’il y a des artistes, des vedettes dont la réputation n’est pas à la hauteur de ce qu’ils croient devoir nous transmettre, qui oscille souvent entre le banal ou l’insignifiant.
Le paradoxe est que la grande littérature – par exemple celle d’Annie Ernaux – est de plus en plus centrée sur l’auteur, son univers, et que le commun s’imagine qu’après tout il est infiniment simple de se montrer, de se décrire et de se proposer comme modèle. La conséquence en est que nous vivons dans un monde appauvri parce que les richesses dont on nous gratifie ne sont pas de qualité et que pour une artiste ou un chanteur brillant, passionnant, on doit en subir tant qui ne méritent pas le détour.
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