[Source : La Tribune]

Les crédits gelés du programme 146 (Equipement) s'élèvent au total à 1,858 milliard d'euros en crédits de paiement, soit environ 18 % de ce budget.

Depuis le 12 octobre, le ministère de la Défense est en rupture de paiement, selon le Délégué général pour l'armement (DGA), Laurent Collet-Billon. Pourquoi ? "Le niveau sans précédent des gels de crédits conduit aujourd'hui même à une rupture de paiement, c'est-à-dire que depuis ce matin, les demandes de paiement que nous émettons vers le comptable ne sont plus couvertes en crédits de paiement", a expliqué le 12 octobre Laurent Collet-Billon lors d'une audition à l'Assemblée nationale. Cette année, cette situation "arrive un peu précocement, car, l'an dernier, nous n'étions dans cette situation qu'à la fin du mois d'octobre".

1,85 milliard d'euros gelés

Comme le rappelle le délégué général pour l'armement dans son audition, "le risque principal de la gestion du programme 146 tient à l'incertitude du devenir des crédits gelés". La réserve de précaution du programme pour l'année 2016 atteint près de 800 millions d'euros, mais le gel ne se limite pas à cette réserve. En effet, explique-t-il, "la direction du budget a décidé de reporter 590 millions d'euros de crédits de paiement ouverts par la loi de finances rectificative (LFR) de décembre 2015 en 2016, puis a gelé ce montant au printemps dernier".

Par ailleurs, un "surgel" supplémentaire, de 470 millions d'euros de crédits de paiement en 2016, a été appliqué au titre de la contribution de la mission Défense au financement d'un projet en faveur de l'emploi. "Les crédits gelés du programme 146 s'élèvent au total à 1,858 milliard d'euros en crédits de paiement, soit environ 18 % de la ressource", constate le délégué général pour l'armement. Une épée de Damoclès qui pèse également sur le budget 2017.

Un report de charges de 3,2 milliards d'euros fin 2016?

Si tous les gels étaient levés (gel, surgel et mise en réserve), le report de charges dépasserait légèrement 1,3 milliard d'euros en 2016, mais si tous les crédits gelés étaient annulés ou reportés, le report de charges pourrait approcher 3,2 milliards d'euros, a évalué Laurent Collet-Billon. Ce qui serait énorme. Beaucoup trop. D'ailleurs ce montant compromettrait "l'équilibre de la Loi de programmation militaire" (LPM), estime Laurent Collet-Billon. Car la LPM initiale et ses actualisations successives ont prévu de contenir le report de charges à 2,8 milliards d'euros d'ici à la fin de l'année 2019.

Compte tenu de l'augmentation des besoins de paiement attendue en 2018 et en 2019, "ce résultat ne pourrait être obtenu que si la totalité des crédits actuellement gelés pouvaient être consommés", précise le DGA. Selon ce dernier, la réserve va être libérée pour être reversée dans la réserve interministérielle, qui ressortira un milliard pour le surcoût OPEX.

"La question, pour nous, c'est de savoir à combien nous aurons droit, rappelle-t-il. Nous ne souhaitons pas des reports de charge supérieurs à 1,8 ou deux milliards, compte tenu des perspectives actuelles de la LPM de manière à être certains de pouvoir respecter les 2,8 milliards indiqués comme la condition de bonne exécution de la LPM à la fin de 2019. Le gel est une décision de gestion de Bercy. L'enjeu à présent, pour nous, est d'obtenir la libération de ces crédits".

Crédits amont, une réserve de 65 millions d'euros

L'exécution des crédits destinés aux études amont (programme 144 Environnement et prospective de la politique de défense) est conforme, en engagements et en paiements, aux objectifs de la LPM, selon le DGA. Si la réserve d'un montant de 65 millions d'euros était levée, le ministère de la Défense pourrait retrouver un peu plus de 700 millions d'euros de paiements, dont 50 millions au profit du régime d'appui pour l'innovation duale (RAPID) à destination des petites et moyennes entreprises (PME) et des entreprises de taille intermédiaire (ETI) innovantes, précise le Délégué général pour l'armement.

"Le report de charges prévisionnel, dépenses obligatoires comprises, devrait atteindre 150 millions d'euros à la fin de cette année pour les études amont. Les devis et les délais sont globalement maîtrisés", estime Laurent Collet-Billon

Les principales études lancées en 2016 portent sur la poursuite des travaux relatifs à la préparation du renouvellement des missiles balistiques et des sous-marins nucléaires lanceurs d'engins (SNLE), et une nouvelle campagne d'essai du démonstrateur européen de drone de combat (nEURon). Parmi les résultats d'études marquant en 2016, figure la fin de la phase de faisabilité du futur drone aérien de combat (FCAS-DP) réalisée en commun avec les Britanniques.

 

  

Michel Cabirol