source [Boulevard Voltaire]
S’il est une question emblématique et forte de la droite de conviction c’est le Mariage pour tous. Or…
Il l’a dit : « Ces dernières années, notre famille politique a trop souvent mis un voile sur ses convictions profondes en voulant plaire à tout le monde. Avec quel résultat ? La débâcle. Les Français ne veulent pas d’un filet d’eau tiède. […] quand on est de droite, on n’a pas à s’en excuser. […] Je veux aussi que notre parti retrouve une voix claire, une colonne vertébrale solide […] nous y avons perdu bien plus que des élections. Nous y avons perdu notre âme. »
Ainsi s’est exprimé Laurent Wauquiez lors d’un entretien au site Le Politique. C’est bien, il ira loin, ce petit. On sent qu’il a tout compris. Il a tiré les leçons.
Sauf qu’après la contrition doit venir l’action.
S’il est une question emblématique et forte de la droite de conviction, c’est le mariage pour tous. Or, le 19 septembre dernier, on apprenait que Laurent Wauquiez ne désirait plus l’abrogation de la loi, se bornant à vouloir « en redéfinir les contours, notamment sur les questions de la filiation » (Le Figaro). « On ne lâche rien », c’était le slogan des manifestants – dont il était. Cela commence bien. On avait dit droit dans ses bottes, avec une colonne vertébrale solide… et il se contorsionne déjà, façon Barbapapa ?
Poser le diagnostic ne sert à rien si l’on ne met pas en pratique. L’alcoolique a conscience de trop boire, mais le constat ne suffira pas à éviter la cirrhose du foie. Dans Genitrix, terrible roman de Mauriac, Fernand Cazenave, quinquagénaire tenu en laisse – malgré son récent mariage – par une mère abusive, se plaint de sa sujétion, mais n’est pas assez volontaire pour s’en défaire. Ainsi en est-il de la droite avec la gauche, qui vit à l’ombre de son autorité morale, de ses interdits arbitraires, de ses colères noires, de ses indignations factices, de ses injustices patentes, de ses punitions terribles, comme un enfant qui renâcle et pleurniche parfois, mais finit toujours par rentrer dans le rang, effrayé par la menace du martinet.
Lorsque Guillaume Larrivé assure, sur Twitter, le député Ludovic Pajot, agressé dans sa circonscription, de sa « solidarité », en rajoutant « oui au débat, non à la violence », cela ne veut pas dire qu’il se rapproche du FN – il aurait eu le même geste pour un député de La France insoumise – mais signifie qu’il brave, en homme libre, par une réaction courtoise « normale », les oukases irrationnels de la gauche. Lorsque Laurent Wauquiez baisse la garde sur les sujets sociétaux, il fait montre, au contraire, de son appartenance à la droite poil-de-carotte.
« Mon obsession, c’est de rassembler », affirme Laurent Wauquiez, en évoquant pêle-mêle Virginie Calmels ou Christian Jacob. « Nous ne sommes pas d’accord sur tout, mais nous sommes d’accord sur l’essentiel, nous sommes d’accord sur l’ADN de la droite. » Parce que se rassembler, c’est bien. Mais encore faut-il qu’il y ait un terrain, un point de ralliement. Et quel est donc ce point commun ? Quel est cet « essentiel », cet ADN ? À quel moment compte-t-on en parler ?
Les communicants passent souvent du monde de l’entreprise aux officines politiques. Ce qui a fonctionné ici fonctionnera bien là-bas, hein ? Les ressorts psychologiques sont les mêmes. Mais vend-on des convictions comme on vend des sous-vêtements ? Si, dans le privé, on peut faire des segments, auxquels on sert une communication différenciée en fonction de produits dédiés, en est-il de même des idées ? L’amateur de caleçons larges façon grand-papa ne prend pas ombrage de voir sa marque préférée proposer aussi des slips moulants pour les épigones de Franck Dubosc. Quand un politique qui segmente pour « plaire à tout le monde », comme dit Laurent Wauquiez, devient illisible et ne plaît à personne. Sauf, peut-être, comme Emmanuel Macron, quand il a choisi de cibler le centre, c’est-à-dire le désert de la pensée. Mais le créneau est déjà pris.
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