Des médecins estiment que le passe sanitaire pourrait aggraver l'épidémie

Source [Le Figaro] Alors que le gouvernement conditionne l'abandon des gestes barrières au passe sanitaire, le médecin urgentiste et directeur médical de Doctissimo s'inquiète des conséquences sanitaires de ces nouvelles mesures.

Gérald Kierzek est médecin urgentiste et chroniqueur santé, Directeur médical de Doctissimo, et auteur notamment de Coronavirus, comment se protéger? (Éditions de l'Archipel, mars 2020).

FIGAROVOX. - Jean Castex a annoncé 18.000 nouvelles contaminations en 24 heures le 20 juillet. Doit-on craindre les effets sanitaires d'une quatrième vague ?

Gérald KIERZEK. - Le Premier ministre est même allé plus loin en parlant d'ores et déjà de quatrième vague. Il est nécessaire de savoir à quoi correspond ce terme de vague très anxiogène pour le grand public. Les trois premières vagues étaient des vagues correspondant à un système hospitalier en tension. Mais comprenons-nous bien : à aucun moment des patients n'ont pas pu être pris en charge en France. Il n'y a jamais eu de saturation totale des hôpitaux et les vagues successives n'ont pas du tout eu le même impact au même moment partout en France. Si la première a concerné les régions Grand-Est et Île-de-France, les autres régions ont été quasi totalement épargnées. Lors de la deuxième, des régions épargnées jusqu'alors ont connu un phénomène d'augmentation des cas et des hospitalisations chez des patients âgés, fragiles et donc vulnérables au virus. La médiane d'âge des décès est de 85 ans, le taux de mortalité de 0,15% en population générale et 95% des patients hospitalisés pour des formes graves ont plus de 65 ans.

Dès lors, ce sont ces patients qu'il faut protéger pour éviter une quatrième vague dans laquelle nous ne sommes pas. Il y a deux moyens insuffisamment développés : vacciner les plus fragiles et doper l'hôpital. Or, le Premier ministre lui-même a reconnu que trois millions de personnes vulnérables n'étaient encore pas vaccinées ; elles sont à cibler en extrême priorité car ce sont elles qui sont susceptibles d'engorger les réanimations et tout n'a pas été fait pour leur apporter le vaccin (équipes mobiles, ciblage par l'Assurance maladie comme pour la vaccination antigrippale,…). Sur le volet hospitalier, je suis effaré qu'un an et demi après le début de la crise, aucune remise en question structurelle de notre système de santé ne soit faite. On continue de fermer des lits, des hôpitaux de proximité ne sont pas mis en place pour accueillir précocement les patients et éviter la réanimation par un scanner et une prise en charge rapide (oxygène, anticoagulants, corticothérapie, antibiotiques,…), tout cela dans un contexte chronique de pénurie de lits et d'engorgement des urgences par exemple, indépendamment du COVID. Partout en France, les lits manquent comme au centre hospitalier de Saint-Brieuc (Côtes-d'Armor) confronté, en ce mois de juillet 2021, à une grosse activité de son service des urgences avec des lits d'hospitalisation qui ont dû être rajoutés en catastrophe. Ces phénomènes ont lieu chaque été et chaque hiver avec de véritables pertes de chance pour les patients et un épuisement des équipes.

Alors que l'on encourage les Français à se faire vacciner et que le passe sanitaire introduit des mesures strictes, risque-t-on un nouveau confinement à la rentrée ?

Si on suit le nombre de contaminations et non le nombre de malades ou d'hospitalisation, tout est possible ! Sauf que suivre une épidémie de courbes et de tests positifs, et des modèles mathématiques projectifs, n'a pas beaucoup de sens... Y répondre par un confinement, même si les hospitalisations augmentent, n'en a pas non plus. Le confinement a été une mesure d'urgence en mars 2020 devant un phénomène inconnu et une panique médicale et politique. Ce virus n'est plus un mystérieux virus chinois dont on ne connaît rien. Ses cibles sont connues, ce qui permet de les protéger par la vaccination et qui change la donne. Ses modalités d'action le sont aussi, permettant une prise en charge précoce des malades ; et enfin ses modes de propagation se sont éclaircis (transmission en lieux clos essentiellement) offrant la possibilité de mesures préventives adaptées (ventilation des espaces, masque en intérieur,…). Le confinement ne paraît donc plus du tout adapté à l'incertitude du printemps 2020 et aux connaissances actuelles. Son efficacité est par ailleurs douteuse sur le plan scientifique alors que ses effets délétères prouvés y compris sur le plan psychologique. Les Français sont à bout. Les menaces d'un confinement qu'on sait irréalisable et inutile ajoutent à la détresse psychologique.

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