Jacques Célérier, officier mécanicien navigant et pilote, cumule 21.650 heures de vol. Il analyse le crash de l’Airbus A320 de Germanwings : la réduction de l’effectif des équipages, pratiquée dans de nombreuses compagnies, est en cause dans la plupart des accidents.
LA TRAGEDIE aérienne de l’A320 de la compagnie Germanwings survenue le 26 mars rappelle le sujet brûlant de la composition des équipages des avions de ligne pour lequel les officiers mécaniciens navigants se sont tant battus il y a plus de vingt ans.
Aujourd’hui comme hier, soyons sûrs que cet aspect de la question ne sera pas évoquée.
Dans la notion de progrès, volontairement ou pas, les décideurs s’égarent parfois, lorsque dans l’interface homme-machine, ils privilégient outrancièrement les automatismes au détriment du rôle humain. C’est le cas du pilotage des avions de ligne où l’on a simultanément et dangereusement sur-automatisé celui-ci et dégradé notoirement la formation des pilotes au nom d’un excès de confiance irresponsable… ou d’un mercantilisme industriel sans âme.
Les équipages les plus sûrs
Quant à la composition d’équipage de deux ou trois membres, le sujet est vaste et beaucoup plus profond qu’il n’y paraît.
S’il se résume à la seule justification par les charges de travail, la question n’est plus crédible. C’est l'équipage à deux qui l’emporte, parfaitement faisable.
En revanche, s’il est fait état des fiabilités respectives, c’est l'équipage à trois le plus sûr.
La signature ultime de cette évidence se trouve, une fois encore, dans le drame de l’A320 de Germanwings.
Sinon, entre autres dispositions prises par certaines compagnies, pourquoi celles-ci exigeraient-elles la présence obligatoire dans le cockpit d’un PNC (Personnel navigant commercial) lors de l’absence momentanée... et inévitable de l’un des deux pilotes ?
Parce que l’équipage à deux, potentiellement réduit au pilotage à un seul pilote dans certains cas, est alors fatalement fragilisé dans sa prestation, comme nous venons de le constater.
Les leçons du passé
Enfin, il ne faut jamais oublier les leçons du passé. La compagnie Air Inter qui, sur son réseau, comportait le plus de phases critiques de vol (atterrissages et décollages) au monde, n’a connu, en trente deux années d'exploitation, que quatre accidents…avec quatre équipages à deux.
Et, si Air Inter fut classée compagnie la plus sûre au monde après la compagnie australienne Ansett, nous pouvons penser que ses équipages à trois, majoritaires, et donc ses officiers mécaniciens navigants, y étaient pour quelque chose...
Jacques Celerier
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Ce genre d'accident est infiniment moins fréquent que ceux dus à une faute de pilotage, il est rarissime et on ne peut en tirer aucune conclusion.
Je me vois obligé de m'inscrire en faux contre cet article corporatiste. En effet, les faits sont les faits. La plupart des accidents d'avion sont dus aux pilotes et très rarement aux avions eux-mêmes. Typiquement, le niveau de sécurité d'un avion globalement aujourd'hui est de 1/1 million de chances d'accident grave par passager et heure de vol quand la probabilité d'erreur d'un pilote est de l'ordre, au mieux, de 1/1000. Si, donc, on voulait rendre service aux passagers, il faudrait supprimer les pilotes et transformer les avions en drones. Cela ne se fait pas uniquement sous la pression des lobbies politico-mafieux formés des pilotes, de la DGAC, FAA, EASA, etc., et des constructeurs d'avions.
Voir le commentaire en entierL'argument de l'équipage à 3 ne tient pas. Dans le vol Rio Paris AF447, il y avait 3 pilotes, ce qui ne les a pas empêché de faire des erreurs que même un débutant sur un avion d'aviation générale ne ferait pas. Etre 3 ne garantit pas par ailleurs un comportement digne dans un cockpit et je n'en dirai pas plus sur ce sujet.
Prendre l'opportunité d'un suicide, si tel est le cas, pour réclamer du personnel en plus me semble assez pitoyable. Franchement, s'il n'y avait pas eu de pilote et si l'avion avait été dronisé, il n'y aurait pas eu d'accident.
Vouloir des pilotes est une vision d'un autre âge. D'abord, sur un vol transatlantique, environ 35% du coût du billet sont pour le pilote. Dans une économie concurrentielle, il est normal de se poser la question de la suppression de ce dernier. Par ailleurs, avec la complexification des systèmes, le pilote n'est plus un pilote à proprement parler, mais un gestionnaire de système complexe. Dans ce cadre, le pilote automatique étant actuellement enclenché en quasi-permanence, lorsqu'un incident se produit, le pilote est un peu comme une poule qui a trouvé un cure-dents. Il est perdu, ce, d'autant que événement est rare. Demain, pour des économies d'énergie, les avions seront même conçus pour être instable. Là, l'intuition du pilote ne pourra être que néfaste.
En conclusion, il faut au plus vite faire sauter les verrous politico-mafieux qui gouvernent l'aéronautique pour enfin offrir une vraie sécurité au passager ou tout au moins celle qu'ils méritent.
Exactement. Avec la porte fermée et un malaise, l’équipage à deux, potentiellement réduit au pilotage à un seul pilote dans certains cas, est alors fatalement fragilisé dans sa prestation, comme nous venons de le constater.