C'est le droit de ne pas avorter qu'il faut choisir !

A été soumise au Parlement une proposition de loi tendant à inscrire le « droit » à l’avortement dans la Constitution. Quoique le Sénat l’ait rejetée, elle reste dans le circuit.

Notons d’emblée que cette proposition est rigoureusement contraire à la position de Simone Veil, laquelle a répété à plusieurs reprises que l’avortement ne saurait être un droit, seulement un recours d’exception pour faire face à certaines situations notamment « de détresse ».  La loi qu’elle avait fait voter le 17 janvier 1975 affirmait le droit à la vie à l’article 1 . La gauche a depuis lors largement dénaturé cette loi, en supprimant toute mention du droit à la vie, la notion de détresse et le délai légal a été remonté à la sauvette par la loi du 2 mars 2022, promue par Macron, de 12 à 14 semaines. Ce qui restait du délai de réflexion, 48 heures, a été abrogé par la même loi. Il ne suffit pas d’élever de statues à Simone Veil, encore ne faut-il pas tourner le dos à ses idées.

Derrière la constitutionnalisation, on voit poindre la suppression de toute condition, jusqu’au 9e mois  (avec l’horrible chirurgie à laquelle il donne lieu quand l’enfant est à terme, qui ont a longtemps pratiquée et continue de l’être aux Etats-Unis. ) . On peut aussi craindre la suppression de la clause de conscience du personnel hospitalier, comme elle a été supprimée pour les pharmaciens.  

 

Une campagne mondiale

 

Ces projets : constitutionnalisation, remise en cause toute restriction et de la clause de conscience n’ont pas été inventés par les Français.  Ils figurent dans l’agenda de différentes organisations internationales comme l’ONU (division de la population) ou l’OMS, noyautées par des groupes de pression comme le Planned Parenthood World-Population et appuyées par des   magnats comme George Soros ou Warren Buffet, qui partagent les objectifs malthusiens de tous ceux qui veulent réduire la population mondiale.   C’est sur l’ impulsion des mêmes que Macron a instauré en 2018,  en catimini,  des séances d’éducation sexuelle (on se doute laquelle) aux enfants du primaire. Sur ces sujets, les Français ne sont plus que des exécutants.

Ce courant a été profondément atteint par la récente décision de la Cour suprême des Etats-Unis qui remet entre les mains des Etats le droit de règlementer à leur guise l’avortement, comme c’était le cas avant 1973. Il se peut que la proposition en débat (bien entendu inspirée par Macron) ait été sous-tendue par le désir de prendre leur revanche sur   la décision de la Cour suprême en prenant pour cible un pays significatif comme la France.

Quand promoteurs de la loi, parlent de faciliter l’accès à l’avortement, ils brandissent des restrictions qui existeraient encore. Encore le spectre de   la morale classique, dite naturelle, dont les promoteurs sont présentés comme de méchants souriciers à la Walt Disney dont la bigoterie le disputerait à la méchanceté.  Cette image, vieux fantasme d’un féminisme obsolète, n’a plus aucun sens depuis presque cinquante ans.

 

Une majorité d’avortements sous pression

 

Dans une société « libérale avancée » comme la France, c’est exactement le contraire : on peut penser que la majorité des avortements n’y sont pas volontaires .

La femme enceinte est rarement bien vue surtout si elle a déjà des enfants.  Un modèle de couple à un ou deux enfants s’est imposé. Ceux qui s’en écartent semblent des excentriques, voire des irresponsables.

Il est rare que des femmes enceintes ne fassent pas l’objet de pressions ou de reproches .

Si elles ont moins de vingt ans, on leur dira qu’elles sont trop jeunes. Spécialement les parents (d’où l’absurdité des bien-pensants qui s’indignent qu’une autorisation parentale ne soit plus requise )  ; devant l’annonce d’une grossesse qu’elles n’auront pas planifiée elles-mêmes, certaines mères ou belles-mères peuvent être féroces

Les plus portés aux pressions sont cependant   les pères de l’enfant à naître ,  maris ou concubins, affolés par la nouvelle responsabilité que la grossesse implique et à laquelle rien ne les a préparés : plus que de la liberté des femmes , l’avortement est, en bien des cas, l’indicateur de la lâcheté des hommes.

Aussi féroce est le monde du travail. Quoiqu’un licenciement pour motif de grossesse soit illégal, il sera rarement affiché comme tel mais la jeune femme pourra , plus que d’autres, craindre de se trouver dans le prochain train de licenciements , voire de faire l’objet d’un harcèlement professionnel . Les pressions ne viennent pas que des employeurs mais aussi des collègues qui peuvent craindre une surcharge de travail pendant le congé de maternité et qui supportent mal un comportement qui parait de plus en plus déviant. Ces pratiques montrent le caractère obsolète de la devise  «  Travail, famille-patrie ». Dans le monde réel,   le travail ( disons l’entreprise) est bien souvent le principal ennemi de la famille – et de l’enfant.  Chez certains grands consultants, une femme cadre , au mépris des lois, n’est reçue comme partner que si elle s’engage à ne plus avoir d’enfants .

Pour se donner bonne conscience, les harceleurs diront que les femmes enceintes mettront au monde un pollueur de plus et agissent donc contre l’intérêt de la planète. Sans considérer que ce n’est pas vraiment la natalité qui menace l’Europe.  

Si les pressions directes sont exceptionnelles il y aura des remarques déplacées, des moqueries, des pointes sournoises qui feront craindre à certaines femmes s’avouer leur grossesse, voire de s’y engager .

Le monde médical qui devrait protéger la femme enceinte est souvent le lieu où on la décourage surtout si la femme est trop âgée , a déjà , juge-t-on, trop d’ enfants ou a un enfant qui pourrait être handicapé.  

Une anecdote récente : une aide soignante enceinte descendant l’escalier d’un grand hôpital parisien. Derrière elle deux pontes qui disent assez fort   pour qu’elle entende : « Les femmes enceintes, il faudrait les pousser dans l’escalier, pour quelles ne viennent plus perturber les tableaux de service ». On se permet aujourd’hui à l’égard des femmes enceintes, ce que la société ne permet plus vis-à-vis des homosexuels, des gens de couleur, ni de personne. Un renforcement de la protection juridique des femmes enceintes est plus qu’urgente.  

Les comportements que nous dénonçons sont d’autant plus lâches que la femme enceinte est dans une période de vulnérabilité physique et morale.

Il est absurde et faux d’opposer les pro-life et les pro-choice car la décision d’avorter, ne résulte pas dans bien des cas d’un choix libre mais de la pression, de l’entourage ou de la nécessité financière.  Toutes les femmes n’ont pas la capacité de résister à des pressions indiscrètes.

 

L’importance de l’entourage

 

Une femme dont tout l’entourage accepte la future naissance n’avortera pas et , à l’inverse, bien peu auront la force de résister si tout leur entourage désapprouve leur grossesse.  Ce genre de pressions est sans doute une des pires violences faites aux femmes que l’on se garde bien de dénoncer.

Ce dont nous parlons, ce sont des réalités, de la femme réelle, de l’enfant réel.

Pour les ultraféministes (distinctes des féministes qui se préoccupent vraiment du bonheur des femmes), la femme est une entité purement idéologique. La liberté qu’elles revendiquent est purement abstraite.  Le résultat est, selon l’expression de Hayek qui vaut pour toutes les démarches idéologiques : « un effet contraire au but poursuivi ». Des femmes plus libres en principe, moins libres et souvent soumises à d’odieuses contraintes dans la réalité.

Cela vaut pour tout ce qui est idéologique. Un grand malheur de notre temps est que les réformes, en tous domaines, sont faites à partir d’idées abstraites : par exemple en matière d’éducation, le projet d’une égalité abstraite qui conduit à une plus grande inégalité concrète.

N’hésitons pas à le dire, la proposition de loi que soutient le gouvernement sur l’avortement, à mille lieux du pragmatisme de la loi Veil, est contraire aux intérêts des femmes, des femmes réelles.

 

Roland HUREAUX