L’idéologie du « gender » inspire déjà plusieurs législations occidentales. Elle est chez nous au cœur du débat des présidentielles.
« La mode est au genre… Depuis une quinzaine d’années, le genre remplace le sexe dans les textes officiels, les programmes scolaires et universitaires, en France comme dans les instances internationales (ONU, Conseil de l’Europe, Parlement européen, Unesco…).On pense volontiers qu’il ne s’agit que d’un changement de mot, plus tendance et plus moderne. En réalité, le genre est l’outil redoutable de la théorie du même nom, la théorie du gender, qui avance masquée sous les traits de la lutte contre les discriminations et pour l’égalité. »[1]
Vers un nouveau droit de la famille
Ainsi, de ce nouveau terme procède de nouvelles classifications juridiques. Sylviane Agacinky nous en explique les ressorts :
« On ne semble pas remarquer que la revendication du « mariage homosexuel » ou de « l’homoparentalité » n’a pu se formuler qu’à partir de la construction ou de la fiction de sujets de droits qui n’ont jamais existé : les « hétérosexuels ». C’est en posant comme une donnée réelle cette classe illusoire de sujets que la question de l’égalité des droits entre « homosexuels et hétérosexuels » a pu se poser. Il s’agit cependant d’une fiction, car ce n’est pas la sexualité des individus qui a jamais fondé le mariage, ni la parenté, mais d’abord le sexe, c’est-à-dire, la distinction anthropologique des hommes et des femmes. »[2]
Les gender feminists élaborent en réalité la « déconstruction de nos repères par la création de droits abstraits »[3]. Elles rejettent la norme majoritaire hétérosexuelle au profit d’une « politique d’identités genrées »[4] fondée sur une orientation sexuelle choisie. Elles fustigent la famille classique, terreau du déterminisme sexuel et stratégie masculine de l’oppression, pour un cercle polymorphe, plus propice à l’épanouissement de chacun dans le genre qu’il se détermine. Elles renâclent devant la toute naturelle dépendance qu’engendrent la grossesse et la maternité pour privilégier l’enfant « programmable » en fonction de son désir et des nouvelles innovations techniques.
Pour imposer leurs vues aux Etats, les partisans de la théorie du gender rôdent dans les couloirs des Nations Unies pour faire inscrire le « droit des couples au mariage », le « droit au désir d’enfant » ou le « droit à la maternité » à la déclaration des droits de l’homme.
Malheureusement, cette théorie s’attaque à deux institutions pérennes de la société : le mariage et la filiation.
« L’institution du mariage n’est pas la consécration d’un amour, mais l’engagement de deux personnes et l’institution juridique en vue de garantir la stabilité et la durabilité du couple et la protection des enfants issus de ce couple. »[5] Le mariage, juridiquement et socialement, ne repose pas sur une orientation sentimentale et sexuelle mais sur la liberté du consentement, l’aide mutuelle entre les époux et la protection des enfants. Il s’agit de l’union d’un homme et d’une femme en vue de fonder une famille, ce que rappelle la Convention européenne des droits de l’homme dans son article 12 : « Àpartir de l’âge nubile, l’homme et la femme ont le droit de se marier et de fonder une famille. » À cette condition, le mariage peut-être un soubassement solide de la société. Le lobby gay est donc en train de vider le mariage de sa substance quand il parle de droit à l’amour – lequel est une assise bien subjective – et de droit à l’égalité des couples (alors que le droit ne reconnaît pas les couples mais seulement les sujets singuliers).
En réalité, si les queers veulent du mariage, qu’il considère para illeurs comme ringard et comme l’héritage d’une humanité archaïque, c’est pour pouvoir adopter des enfants. Puisque le genre est une invention, une construction sociale, disent-ils, ce serait même rendre service à l’enfant de ne pas lui imposer un référent éducatif masculin (autrement dit, un père) et un référent éducatif féminin (une mère) : il serait ainsi plus à même de se déterminer librement sexuellement. Ils oublient que « seul un homme et une femme peuvent être, ensemble, ses parents. »[6] Les progrès techniques n’y font rien : le réel résiste, il faut toujours un gamète mâle et un gamète femelle, il faut toujours qu’un homme et une femme se complètent. Alors, le mot parentalité a été inventé. Quand la parenté fait référence à un engagement des corps qui se poursuit dans l’engagement au service de l’enfant qui en naît ; la parentalité « met l’accent, presqu’exclusif, sur le rôle éducatif. »[7] Les partisans du gender donne ainsi du sens à l’homoparentalité et donc à l’adoption par les couples homosexuels. Les éléments de la filiation (biologique, juridique ou sociale) sont dissociés pour pouvoir être choisis à la carte.
« Par exemple, on pourrait parler de « parentalité sociale » pour la compagne de la mère biologique d’un enfant, ou de filiation intentionnelle pour des couples d’hommes, dans les cas de mères porteuses. Pour être « parents », il suffirait de manifester son intention de l’être. »[8]
D’ailleurs, c’est que l’Association des Parents Gays et Lesbiens demande :
« Nous souhaitons baser le droit de la filiation sur l’éthique de la responsabilité, en valorisant l’établissement volontaire de la filiation et en fondant celle-ci sur un engagement irrévocable. […] Un parent n’est pas nécessairement celui qui donne la vie, il est celui qui s’engage par un acte volontaire et irrévocable à être le parent. »
Dans ce nouveau cadre de pensée, « le droit à l’enfant », l’Assistance médicale à la procréation (AMP) avec donneur (sans en connaître le nom puisque la filiation biologique est secondaire) et l’autorisation de la pratique de la « gestation pour autrui » ou mères porteuses sont revendiquées, au mépris de l’enfant lui-même. L’exemple de l’Espagne devrait pourtant nous alerter : la loi sur le mariage et l’adoption d’enfants par des couples du même sexe y a entraîné une refonte complète du droit de la famille : les « conjoints » y remplacent les « mari et femme » ; les « parents », les « père et mère ». Une société hétérophobe voit le jour…
La position des candidats
A droite, parmi les grands partis, seuls le Front National et le Parti Chrétien Démocrates se revendiquent résolument contre le mariage homosexuel. Debout la République évite la question dans son programme.
La position de l’UMP est beaucoup moins nette. Ce parti héberge la droite populaire comme des activistes homosexuels (Jean-Luc Romero en fut le secrétaire national). Si le bilan du quinquennat de Nicolas Sarkozy n’est pas dramatique au vu des projets socialistes sur le même thème, il y a principalement deux points à déplorer. L’Elysée est à l’origine d’un projet sur le statut du beau-parent (2009), dispositif facilitant l’intervention d’un tiers dans la vie d’un enfant – ce tiers pouvant finalement être le compagnon homosexuel d’un des parents. Le Président de la République a du y renoncer devant l’opposition des parlementaires de sa majorité. Néanmoins, il a permis le travail de sape intellectuel orchestré par Luc Chatel, son ministre de l’Education Nationale : depuis septembre dernier, la théorie du genre est enseignée aux élèves de première scientifique et économique et sociale, et pris comme argent comptant.
Au centre, François Bayrou, qui ne sait sur quel pied danser, se prononce pour l’homoparentalité, « un droit logique et de bon sens », car il estime qu’elle existe déjà dans les faits et qu’il faut donner un statut à celui qui n’est pas parent biologiquement ; mais contre le mariage homosexuel car il estime qu’il s’agit d’une « union d’un homme et d’une femme ». Les personnes homosexuelles doivent, elles aussi, accepter la différence.
Enfin, à gauche, François Hollande se monde maximaliste, selon le mot de Fabrice Madouas[9]. Il souhaite même endoctriner les enfants : « dès leur plus jeune âge l’éducation devra faire une place aux questions du genre et d’orientation sexuelle pour changer la perception sociale de l’homosexualité». Le candidat socialiste veut aussi faire punir les discriminations à ce sujet et légaliser le mariage donc l’adoption homosexuelle. En revanche, s’il se montre favorable à l’AMP, il s’oppose aux mères porteuses.
Jean-Luc Mélenchon plaide depuis longtemps la « cause » homosexuelle et Eva Joly, dans son enthousiasme, a participé à la Gay Pride parisienne, en juin dernier. Leurs programmes vont vers une libéralisation complète de cette question. Le programme de Europe Ecologie Les Verts (EELV) l’annonce : « mêmes droits, mêmes lois » ; et même plus : en effet, EELV veut lutter contre les discriminations, dépsychiatriser la transidentité et surtout, pousser François Hollande, s’il l’emporte, à faire voter ces lois en moins de 100 jours.
Le clivage entre une gauche revendicatrice et une droite qui ne s’assume pas n’a jamais été si prégnant que sur la question du genre.
Retrouvez les autres articles de la présidentielle sur la famille dans le dossier :
[1] Élizabeth MONTFORT, « Le gender comme révélateur d’une société à bout de souffle », Liberté politique, revue n°55, éditions Privat, décembre 2001.
[2] Le Monde, 22 juin 2007
[3] Élizabeth MONTFORT, Le Genre Démasqué, Peuple Libre, 2011, p. 61.
[4] Élizabeth MONTFORT, Le Genre Démasqué, Peuple Libre, 2011, p. 63.
[5] Élizabeth MONTFORT, Le Genre Démasqué, Peuple Libre, 2011, p. 69.
[6] Aude Mirkovic, Les conséquences de la théorie du gender sur la filiation, Colloque sur le Gender, OSP, Toulon, 17 septembre 2011.
[7] Jean-Pierre Winter, Homoparenté, Albin Michel, 2010.
[8] Élizabeth MONTFORT, Le Genre Démasqué, Peuple Libre, 2011, p. 72.
[9] Valeurs actuelles, Mariage, adoption, genre : Hollande maximaliste, 22 décembre 2011.
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