[Source : Nouvelles de France]
Face au meurtre ignoble du père Jacques Hamel qui endeuille non seulement la communauté catholique, mais sans doute la plus grande partie de la communauté nationale, il convient de souligner que sans un réarmement spirituel profond de notre nation, notre système immunitaire qui a été mis totalement à plat depuis des lustres par toutes sortes d’idéologies mortifères, n’aura aucune chance de gagner les batailles contre le type d’ennemi auquel nous faisons face.
Certes les réponses sécuritaires, abondamment débattues, sont au cœur de la question. Cependant, comme le soulignent nombre de commentateurs, cet ennemi ne sera pas vaincu par une réponse purement sécuritaire, aussi essentielle soit-elle. Il faut lire à cet égard la transcription de l’audition devant la Commission de la défense nationale et des forces armées, le 10 mai 2016, du directeur de la DGSI, Patrick Calvar.
Ce que les commentateurs désemparés ont le plus souvent en vue semble se résumer à quelques psychologues ou psychiatres qui pourraient traiter médicalement les cas, considérés comme cliniques, de « radicalisés » musulmans. D’autres (comme Alain Finkielkraut) prônent le débat d’idée, quelque ultime avatar des « Lumières » en dérive, peut-être une esthétique de la désespérance ou du pessimisme miraculeusement capable de transformer des pulsions de mort en expression de joie profonde et durable. Mais dans tous les cas, les pathologies, les carences sont celles des agresseurs, c’est là, nous dit-on, qu’il convient d’apporter des réponses autres que sécuritaires. Qu’en est-il donc du côté de la société dans son ensemble? N’y a-t-il donc en son sein aucune pathologie ou carence dont il faille s’occuper?
Disons-le ici sans ambages et sans crainte: pour ceux qui se réclament d’un héritage chrétien ou de la civilisation judéo-chrétienne, un réarmement spirituel nécessaire et vital passe avant tout par un retour et une étude sérieuse de la Parole de Dieu incarnée en Jésus-Christ, que la plupart se targue de jauger et de juger, mais que bien peu connaissent véritablement (en particulier sur la question de l’État, sa nature, son rôle, la vocation et responsabilité des autorités publiques, thèmes pourtant abondamment abordés dans la Bible). S’en détourner et amalgamer les “religions” sans aucun esprit critique en jetant tout dans le même sac pour continuer à rejeter en vrac toute approche sérieuse de l’Écriture Sainte (approche qui ne constituerait au final qu’un vecteur de haine et de division), c’est d’abord feindre d’ignorer que l’homme est un être religieux dans sa nature même, quel que soit l’objet, l’être ou les idées en qui il place sa confiance. Chacun, sans exception, exprime plus ou moins distinctement des idéaux qui relèvent du domaine de convictions données sur la nature humaine, la place de l’homme dans le monde, le but ou la finalité de l’existence, l’origine et la nécessité de la moralité. Sans même parler des moyens légitimes pour atteindre les objectifs censés être en phase avec cette finalité qu’on envisage et recherche. Ces convictions de base sont proprement “religieuses”, car ancrées au plus profond de l’esprit et du coeur humains. Elles sont de l’ordre de l’a priori, de présuppositions qui gouvernent et orientent les pensées afin de leur offrir un cadre qu’on croit cohérent. Or bien souvent ce cadre ne l’est guère, en fait il ne tient pas debout et s’avère n’être rien d’autre que des sables mouvants dans lesquels on s’enlise peu à peu. Ainsi, limiter le domaine du “religieux” à quelques entités historiquement et sociologiquement reconnues car visibles aux yeux de tous de par leur organisation (judaïsme, christianisme, islam, bouddhisme etc. – ) relève du plus grand aveuglement, surtout d’ailleurs quand cette limitation provient de groupes semi-occultes (tels la franc-maçonnerie) qui prétendent se prévaloir d’un tout autre statut, non religieux quant à lui, qui plus est neutre, objectif et bienveillant, donc supérieur en tous points aux autres. Je passe donc sans commentaire sur l’antinomie imaginaire entre « croyants et non–croyants, laïcs et croyants [sic !], athées et chrétiens », que vient de nous servir un ministre du gouvernement dans son appel à l’unité nationale et à la solidarité en ce temps de grave crise.
Quant à vouloir effacer ce qui fait la différence fondamentale entre le christianisme et l’islam en les réduisant aux éléments que l’on souhaite retenir et amalgamer (l’on est d’ailleurs assez sidéré de voir d’où proviennent de telles tentatives d’amalgame) cela relève au mieux de la duperie intellectuelle, au pire de l’acharnement contre l’évidence.
Contrairement à ce que tant de clercs bien-pensants appartenant à toutes les chapelles veulent faire accroire (tributaires en cela d’idéologies anti-chrétiennes qui ont réussi à reformater en la déformant toute velléité d’expression chrétienne authentique) le domaine du spirituel et du temporel ne peuvent être divorcés, car ils s’interpénètrent à chaque instant, même s’ils demeurent distincts l’un de l’autre dans leur expression. Toute activité humaine amène à se poser la question de sa finalité, son mode d’organisation et ses règles de conduite, dans le cadre d’une vision du monde donnée qui tente de percevoir et exprimer ses liaisons internes et de se relier à un tout global, justement celui du monde: ces liaisons sont d’ordre essentiellement religieux (ce qui relie). Si l’Église et l’État sont des entités bien distinctes qui n’ont pas à être inféodées l’une à l’autre, la première s’occupe également de choses temporelles et matérielles (par le biais du diaconat compris selon son institution originelle au chapitre 6 du livre des Actes), tandis que l’État, en administrant la justice publique, ne peut le faire correctement que sur la base d’une compréhension spirituelle de ce que sont la justice et l’équité. La question se pose donc immédiatement de savoir à quelle source de sagesse il se réfèrera et sur quelle conception de l’homme il s’appuiera pour l’exercice de cette justice publique. Or cette source et cette conception ne peuvent manquer d’être de l’ordre du « religieux », quoiqu’on veuille bien prétendre. C’est parce qu’on a systématiquement voulu effacer la notion claire de cette complémentarité dans la distinction qui existe entre le spirituel et le matériel, entre le profane et le sacré (qu’un Socrate lui-même n’a jamais nié, bien au contraire!), qu’on en est arrivé au niveau de confusion qui est le nôtre actuellement. L’ultime expression de cette confusion étant d’ailleurs celle qui nie la complémentarité dans la distinction des genres masculin et féminin, avec toutes les répercussions que cela peut avoir sur la notion de famille, sur la transmission de la vie etc. Et pourtant cette négation des genres relève elle-même de l’ordre de la croyance, du « religieux » : pour ses tenants elle n’est ni plus ni moins qu’une croyance particulière en ce qu’est la liberté de choisir, et en ce que le genre humain devrait devenir idéalement (c’est-à-dire de plus en plus indifférencié afin d’aboutir si possible à l’égalitarisme complet et à l’abolition de toute différence).
Le réarmement spirituel qui s’impose nécessite aussi de bien comprendre que l’islam en France ou ailleurs (islam au sens d’instances musulmanes) n’a pas la capacité – en dépit de tous les musulmans sincèrement pacifiques et horrifiés par les événements qui blessent la nation – de neutraliser la violence latente d’un nombre croissant de ses adeptes. Il ne l’a pas tout simplement en raison de sa matrice même : le Coran, ou, pour le dire autrement, le Coran selon le Coran, tout bonnement celui que prêchent nombre d’imams en France et ailleurs. Cette matrice, ravivée par les déboires de la politique des Croisés (non pas des chrétiens) occidentaux en Afrique du nord, au Proche et au Moyen Orient depuis bientôt quinze ans, se trouve d’autant plus aiguisée que l’asservissement financier progressif de la France envers les pays de tradition wahhabite (Qatar et Arabie Saoudite) semble en démontrer la validité à long terme.
L’hébétude matérialiste-hédoniste qui a peu à peu envahi l’horizon de l’Occident, nous a fait croire en une réalité virtuelle politico-religieuse qui n’a d’équivalent que la toute récente propension à s’adonner frénétiquement au jeu de Pokemon Go. Faut-il s’étonner d’apprendre que nombre de nos politiques, vivant justement dans la réalité virtuelle, s’y mettent eux aussi ? Verra-t-on sous peu quelques députés parcourir les travées de l’Assemblée Nationale les yeux rivés sur leur portable ou leur tablette, à la recherche de petits êtres malfaisants, sans le moins du monde identifier ou comprendre les véritables maux qui assaillent notre société et les combattre par des lois justes et sensées ? Scénario improbable et caricatural, sans doute. En attendant, nous risquons fort d’être rappelés chaque matin à la triste réalité d’une actualité sanguinaire non virtuelle cette fois, sans que nous ayons les armes spirituelles et intellectuelles pour y faire face de manière lucide et engagée, afin de reprendre pied, en payant un prix fort s’il le faut, mais avec la certitude de reconstruire patiemment ce qui a été progressivement détruit et abîmé.