Les chrétiens, qu’ils soient d’Orient ou d’Occident, sont aujourd’hui confrontés à des défis communs, qu’il s’agisse de la mondialisation avec ses retombées telles que l’athéisme, la sécularisation, le relativisme religieux et les violations de la loi naturelle, mais évidemment aussi à l’islam, désormais déployé dans le monde entier et plus agressif que jamais. En nous connaissant mieux entre chrétiens, nous saurons nous unir comme des frères dans la foi pour chercher ensemble comment relever ces défis que l’on peut qualifier d’existentiels.
Pour beaucoup, la mosaïque ecclésiale orientale est un maquis bien complexe, avec ses nombreuses dénominations, avec ses communautés aux noms peu familiers de l’univers latin, avec ses rites et ses langues liturgiques si étranges ou mystérieuses, avec ses patriarches dont on ne saisit pas facilement le rôle exact… Avec ses divisions entre Églises unies à Rome — donc catholiques mais non latines — et Églises séparées, appelées communément orthodoxes alors que toutes ne sont pas pour autant unies au patriarcat œcuménique de Constantinople, il y a de quoi y perdre son latin lorsqu’on est un catholique d’Occident.
Pour répondre à cette nécessité, je conseille vivement la lecture du dernier ouvrage d’Henri de Saint-Bon : Le Christianisme oriental dans tous ses états. Chevalier de l’Ordre du Saint-Sépulcre, Henri de Saint-Bon nous offre une sorte de petite encyclopédie très accessible. Après avoir rappelé que le christianisme est né sur les territoires de l’Orient méditerranéen, l’auteur retrace les circonstances historiques qui ont conduit l’Église indivise des débuts à l’éclatement qui perdure jusqu’à présent.
Déchirures et retrouvailles
Des controverses théologiques autour des dogmes relatifs à l’identité de Jésus-Christ ont suscité ces divisions. Mais, et on l’ignore trop souvent, celles-ci ont aussi été causées par des incompréhensions linguistiques, des calculs politiques et des rivalités culturelles. Dès le Ve siècle, les chrétiens se sont ainsi déchirés. Puis, il y a eu, en 1054, le grand Schisme entre l’Orient et l’Occident.
Enfin, à partir du XVIIe siècle, une partie des chrétiens jusque-là séparés de Rome ont fait le choix du retour à l’unité catholique en reconnaissant la primauté du successeur de saint Pierre. Pour eux, les papes ont créé des structures ecclésiales appropriées. Ce sont les six Églises catholiques de rite oriental, qui ont des prolongements bien au-delà du Proche-Orient, réalité que l’on retrouve dans l’orthodoxie qui est elle-même très divisée.
Henri de Saint-Bon a donc raison de nous livrer aussi un panorama complet des Églises du monde slave, de la Russie à l’Europe orientale et septentrionale, ainsi que des pays du Caucase, de l’Inde, de l’Éthiopie, etc., en décrivant les particularités propres à chacune d’elles.
Ainsi, l’orthodoxie connaît le principe de l’autocéphalie, ou Église nationale, aspect étranger aux Églises catholiques. Pour leur part, celles-ci ont conservé l’organisation synodale héritée des débuts du christianisme. Pendant des siècles, la papauté a cherché à uniformiser tous les catholiques selon le modèle latin, mais elle y a renoncé en respectant désormais leurs identités propres.
Vers l’unité
Il ne s’agit que d’un aperçu d’un livre très complet dans lequel Henri de Saint-Bon accorde aussi une large place à l’œcuménisme, montrant les progrès significatifs accomplis au XXe siècle en vue de l’unité de tous les baptisés. Ainsi, la plupart des patriarches non catholiques ont signé avec les papes récents des déclarations christologiques communes aux termes desquelles, des deux côtés, on professe une foi identique en Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme.
Désormais, ces Églises ne peuvent plus être qualifiées d’hérétiques. Par ailleurs, la rencontre de Paul VI avec le patriarche Athénagoras qui eut lieu à Jérusalem en 1964 a permis la levée des excommunications réciproques entre Rome et Constantinople. Parallèlement, des discussions doctrinales se poursuivent au sein d’institutions crées pour cela, afin de résoudre les divergences qui demeurent. Aujourd’hui, le principal obstacle à la restauration de l’unité plénière réside dans le sens à donner à l’exercice de la primauté pontificale qui échoit au pape de Rome.
Je terminerai par cette citation de l’auteur : « Il ne s’agit plus de rechercher l’uniformité et la fusion en une institution unique, mais de tendre vers une communion de tous dans la Vérité selon des pratiques diversifiées, conformes à la Tradition et admises par tous. »
Annie Laurent est docteur d'Etat en sciences politiques, a publié Guerres secrètes au Liban (Gallimard).
Henri de Saint-Bon
Le Christianisme oriental dans tous ses états
Éditions Le Livre ouvert
Déc. 2014, 240 p., 21 €
***
Bonjour, Je découvre ce livre avec beaucoup d'intérêt. Cependant j'ai une question à la page 58, je cite " ...conormes aux décisions du septième conclile oecuménique, celui de Chalcédoine...". Le septième concileest celui de Nicée II (787). Il y me semble t-il une erreur.
Cordialement,
RdV.