L’industrie militaire et la guerre. Entretien avec Pierre Conesa.

Source [Conflits] : Pierre Conesa fut membre du Comité de réflexion stratégique du ministère de la Défense et professeur à Sciences-Po Paris. Auteur d’une œuvre abondante, notamment son célèbre La fabrication de l’ennemi (2011), il analyse dans Vendre la guerre. Le complexe militaro-intellectuel (Éditions de l’Aube, 2022), la façon dont les médias et les commentateurs conditionnent l’opinion pour leur faire accepter les guerres. Entretien réalisé par Étienne de Floirac.

Dans votre dernier ouvrage, vous affirmez l’existence d’un « complexe militaro-intellectuel » belliciste et propagandiste, à l’instar de celui « militaro-industriel » déploré par le président Eisenhower. De qui parlez-vous exactement ? 

Avant le discours du président Eisenhower faisant le lien avec le complexe militaro-industriel, le processus de déclenchement des guerres dans les démocraties n’a jamais fait l’objet d’analyse, partant du principe qu’une démocratie serait par nature pacifique. Pourtant France et Grande-Bretagne avaient colonisé la quasi-totalité de la planète. La guerre froide et la course aux armements a semblé donner raison à Eisenhower.

Avec la disparition de l’URSS qui avait structuré la pensée stratégique occidentale pendant soixante-dix ans, et la victoire éclair (en cent vingt heures) de la guerre du Golfe, première guerre sous mandat onusien, vécue en live sur les écrans de télévision, l’Occident animé par un certain nombre d’acteurs du complexe militaro-intellectuel s’automandate « gendarme de la planète » : les interventions militaires ne sont plus destinées à faire la guerre, mais de la police militarisée : interposition (Sarajevo), humanitaire (Somalie), maintien de l’ordre (crises africaines), sauvetage de réfugiés, toutes opérations sans aucun enjeu stratégique. La pression de différents acteurs pousse à la guerre, mais il faut un massacre manifeste pour déclencher le bombardement de la Serbie (1999).

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