Comment meurt un parti (centriste)

Les sept années de présidence Macron ont été un règne centriste qui n’a comme précédent dans l’Histoire de la Cinquième République que la parenthèse Giscard. Dans trois ans, quand le président rendra son tablier, l’édifice bâti pourrait bien s’effondrer comme un château de cartes.

La nature a horreur du vide et pourtant le vide est au pouvoir depuis bientôt sept années. L’appareil politique créé par Emmanuel Macron est une sorte de synthèse de ce qu’il se fait de pire à droite et à gauche et cela en premier lieu avec le débauchage à droite et à gauche de ce qui se fait de pire. Les petits caporaux de partis qui ne pouvaient pas espérer une telle promotion comme l’actuel ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin ou l’ancien ministre de la Santé Olivier Véran, les carriéristes un peu pressés comme Rachida Dati, Bruno Le Maire ou encore les surprises du chef qui ont bénéficié d’un alignement des planètes à l’image du Premier ministre Gabriel Attal.

Ce pot-pourri de personnalités en mal de reconnaissance a permis une concentration de ce qui humainement se fait de pire en politique. L’ouverture à gauche de Nicolas Sarkozy avait montré la voie avec des individus comme Frédéric Mitterrand et Bernard Kouchner.

 

Le temps de la confusion

 

La présidence Macron a été marquée par une confusion très contemporaine sur laquelle joue le chef de l’État. Reprenant à son compte le mantra « ni droite ni gauche », il impose des réformes sociétales de gauche et des politiques d’abandon des infrastructures nécessaires au développement économique (hôpital, transport…).

Habitué à dire tout et son contraire, le président noie l’auditoire dans une diarrhée verbale qui comble ses soutiens les plus acharnés mais agace de plus en plus de Français. Là où ses deux prédécesseurs auront été incapables de se maintenir deux mandats, il a su manœuvrer pour l’emporter électoralement en plaçant la droite et la gauche parlementaire devant leurs contradictions réciproques.

 

La chute d’un parti libéral-bureaucrate

 

Macron n’aura pas de postérité. La transmission n’est pas inscrite dans ses gènes, comme beaucoup d’hommes de pouvoir, il préfèrera d’ailleurs voir sa place tomber entre les mains d’un adversaire politique plutôt qu’entre celles d’un proche. Sa formation politique, elle, peinera à lui survivre. Au culte du chef qui domine dans la majorité devrait succéder une petite guéguerre des seconds couteaux. Les hémisphères droit et gauche du camp macroniste peineront à insuffler une dynamique après les déceptions causées par le règne du créateur… En Espagne, le parti Ciudadanos qui a percé au milieu des années 2010 en est un exemple frappant.

Jouant, comme Emmanuel Macron, sur la lassitude de l’alternance droite/gauche et sur le rejet d’une classe politique jugée incapable, le parti avait su se faire une place dans le royaume… Comme chez Emmanuel Macron, se définir était aussi un problème pour les centristes espagnols qui en 2017 abandonneront l’appellation « social-démocrate » pour « libéral-progressiste ». Dans le cas d’Emmanuel Macron, sa « mouvance » pourrait être caractérisée de « libéral-bureaucrate », on joue avec les codes du libéralisme économique mais on demeure dans un système obsédé par les règles.

 

Difficile d’imaginer Renaissance (le parti présidentiel) survivre à son maître. Comme en Espagne, le parti pourrait faire le choix de pencher vers une alliance à gauche ou à droite. Un Parti socialiste dépourvu de ses éléments gauchers fera l’affaire, LR sans ses éléments les plus conservateurs également. Sans le feu sacré insufflé par le gourou, la partie sera compliquée surtout qu’Emmanuel Macron devrait rester en arrière-plan et savonner la planche de quiconque tentera de faire quelque chose comme Nicolas Sarkozy avait pu le faire en 2017.

 

Olivier Frèrejacques

Président de Liberté politique