L’arrivée aux manettes d’Emmanuel Macron a marqué une rupture dans le rapport à de nombreux emplois et secteurs. Sous couvert de modernisation et de flexibilité, la dérégulation et la perte de repères risquent d’engendrer des conséquences dépassant la seule question économique.

Uber, un symbole prémonitoire

 

A la manœuvre dans la guerre des taxis contre Uber du temps où il était ministre de l’économie, le « Mozart de la finance » a depuis grandi mais ses idées n’ont pas changé. Derrière la figure présidentielle et ses ronflantes promesses de modernisation et de réformes, se cache en réalité une vision du monde du travail en rupture avec la dignité de l’homme.
Le récent mouvement social du personnel de crèche est l’exemple même de cette manière de penser. Un arrêté signé fin juillet autorise le recrutement de personnel non-qualifié pour pallier les manques d’effectifs dans le secteur. Ce type de décisions a pour conséquence principale de dévaloriser le travail des professionnels du secteur qui pourront, demain, être remplacés par des personnes non qualifiées et probablement moins payées.
La raison de cet arrêté est la pénurie de travailleurs dans ce secteur ; une réponse plus juste à ce problème eût été d’augmenter la grille de rémunération du secteur pour susciter un regain d’intérêt pour ce type d’emplois. Payer dignement les personnes qui prennent du temps pour accompagner le développement des plus petits pendant la journée de travail de leurs parents n’aurait certainement choqué personne. Plus généralement, les efforts consentis intelligemment dans des domaines comme le médical, la petite enfance ou l’enseignement font partie d’investissements indispensables pour préserver un peu de cohérence dans une société déjà bien en crise.

 

Redonner la dignité aux travailleurs

 

La réforme de la police qui fait grand bruit du côté des petits hommes en bleu s’intègre dans une même logique. La mobilité des fonctionnaires entre la police, les services fiscaux et la diplomatie est encouragée à l’extrême. Si personne n’est indispensable, il convient néanmoins de ne pas faire ressentir à chacun qu’il est interchangeable. C’est pourtant la tendance insufflée par les équipes Macron qui s’appliquent d’ailleurs cette maxime à leur niveau, n’hésitant pas à quitter le faste des ministères pour les postes du privé dans une consanguinité élitaire parfois déroutante.
Il ne s’agit pas ici de condamner le changement de travail mais de pointer du doigt une dérégulation qui s’accompagne d’une perte de compétences et d’un déséquilibre dans tous les domaines. Demain, une personne non-qualifiée aux métiers de la petite enfance sera incapable d’apporter les premiers secours à un enfant qui s’étouffe en crèche, une personne non-rompue aux pratiques de tel ou tel secteur sera amenée à prendre des décisions d’importance et commettra des erreurs, parfois des « bavures »… À ce déclin en matière des Ressources Humaines, il convient d’ajouter la perte de fierté de l’emploi et de repères pour les travailleurs qui ne sont plus que des variables d’ajustement alors que le travail, outre son rôle économique pour la personne et l’entreprise, a aussi un rôle social et humain…