Le Saint-Père a nommé Mgr André Vingt-Trois, archevêque de Paris. Il succède au cardinal Jean-Marie Lustiger, dont le Pape a accepté vendredi la démission, conformément au Canon 401-1 du Code de droit canonique.

 

Nommé à Tours en 1999, Mgr Vingt-Trois est un vrai Parisien. Âgé de 62 ans, il retrouve le diocèse où il est né, où il a été ordonné prêtre le 28 juin 1969 puis évêque auxiliaire le 14 octobre 1988 et dont il a été vicaire général de 1981 à 1999. C'est un "enfant de la Montagne Sainte-Geneviève", la sainte patronne de Paris, a souligné Mgr Lustiger : "Jean Paul II a voulu à nouveau, comme il l'avait fait pour moi-même il y a vingt-quatre ans, nommer archevêque un Parisien qui connaisse l'Église de Paris et qui en soit connu, je m'en réjouis vivement", a ajouté le cardinal dans le texte qui sera lu ce dimanche dans les paroisses de la capitale.

À la vérité, cette nomination n'est pas une surprise. D'après nos sources, elle était acquise depuis six mois, mais la perspective de voir arriver l'archevêque de Tours au siège de Paris se dessinait dans une période de turbulences. La dernière assemblée des évêques de France à Lourdes, en novembre dernier, n'a pu masquer des tensions entre deux générations d'évêques, l'ancienne école et la génération Wojtyla.

Certains médias s'étaient réjouis de voir le nouveau conseil permanent de l'épiscopat "s'ouvrir et se rajeunir" (Le Monde du 11 novembre 2004), entièrement recomposé de "prélats modernistes". En l'espèce, cette confusion entre modernisme, ouverture et jeunesse traduisait un durcissement de l'ancienne école, las de la montée en puissance d'une génération d'évêques "nouvelle évangélisation", plus familiers du contre-courant que du consensus.

Dans le contexte "la vieille garde meurt mais ne se rend pas", la nomination de Mgr Vingt-Trois s'inscrit dans un élan régénérateur où la main du Pape malade et de son fidèle cardinal Jean-Marie Lustiger, est bien présente.

Carré, Mgr Vingt-Trois est connu pour son franc-parler : "Il n'y avait pas quarante postulants en raison de l'âge ou d'autres circonstances, je pouvais être l'un d'eux et c'est moi que le pape a choisi", constate-t-il simplement, dans une déclaration à l'AFP. "Je serai sous le regard d'un certain nombre d'observateurs", reconnaît-il. "Je suis prêt à être moi-même. Si eux m'acceptent tel que je suis, tant mieux, s'ils ne m'acceptent pas, ce sera à vivre !" Sur ce point, on peut être sûr de la franchise du nouvel archevêque.

Briser les silences coupables

Consulteur au Conseil pontifical pour la famille et président de la commission épiscopale pour la famille, Mgr Vingt-Trois est un spécialiste de théologie morale. À l'occasion des trente ans de la loi Veil, il invitait les catholiques à "briser le silence" sur l'avortement, y compris politiquement : " Il n'est pas sain pour une société de vivre avec plus de 200.000 avortements par an et de se donner l'illusion que c'est normal. Il faut qu'on sorte de cette attitude mortifère. " Précisément, l'Église doit "continuer à dire inlassablement que l'avortement est un mal radical qui s'attaque à un être humain et, à travers lui, à l'humanité tout entière."

Pas de complexes chez cet évêque qui n'a pas peur d'appeler les choses par leurs noms et les chrétiens à leur responsabilités : "Il est encore temps de nous réveiller et de dire : assez !"

Pour autant, le futur cardinal qu'il sera sans doute au prochain consistoire, n'oublie pas son propre devoir. Dans une lettre pastorale datée du 21 mai 2004, à la veille des débats parlementaires sur la révision des lois de bioéthique de 1994, l'archevêque n'hésite pas à parler des "silences coupables" qui entourent les actions de ceux qui oeuvrent à la manipulation des embryons humains :

"Notre époque est fertile en procureurs zélés pour dénoncer les coupables silences du passé. Oserais-je vous dire que je m'interroge souvent devant Dieu sur les silences dont on pourra nous accuser dans quelques décennies ou quelques siècles ? Quand je dis "nous", je ne pense pas seulement aux intellectuels éclairés dont les opinions ont si souvent suivi le "politiquement correct" ou le médiatiquement correct. Je pense à nous chrétiens et, premièrement, à nous évêques qui avons reçu mission de guider le peuple chrétien."

La cérémonie d'installation de Mgr Vingt-Trois comme archevêque de Paris aura lieu le samedi 5 mars à 18h30 à la cathédrale Notre-Dame.

 

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