Les sempiternels propos sur la guerre, partout, sur toutes les lèvres, et l'incertitude des lendemains, laissent un drôle de creux à l'estomac et donnent l'impression de marcher sur un sol qui fuit.
Nuit et jour, l'insupportable vacarme emplit le ciel et la terre. La haine, partie à fond de train, broie, mutile, dévore tout ce qui lui tombe sous la dent. Et la tendresse des enfants pleure et prie.
Sur les écrans des télévisions, nous voyons ces bouquets d'enfants entassés dans un hall municipal, une église, une salle de classe ou un abri de fortune. Un tremblement d'être nous saisit et nous fait perdre cœur.
Ces merveilleuses petites fleurs sont coupées du monde, mais pas du ciel. Elles s'éveillent dans le matin sans vie. Dans ce silence des ténèbres, l'amour est leur seule certitude. Elles s'éveillent au-delà de la peur, et leur premier regard est sourire. Elles n'attendent plus rien d'un monde qui a sauvagement détruit leurs jardins de tendresse. Alors pourquoi sourient-elles ? Elles plongent dans la confiance absolue, celle du cœur. Celle qui s'obstine à chanter, lorsque la raison a toutes les raisons de désespérer. Celle qui est incompatible avec la peur. Celle qui reçoit tout en donnant tout, parce qu'elle accueille l'immensité de l'amour. Cet amour qui leur est distillé par les parents, les voisins, les aînés, les secouristes, les Bons Samaritains tabernacles de la Charité de Dieu sur terre.
Qui tendra la main à ces enfants du Jardin des Oliviers ? Ceux du Liban, de Terre Sainte, d'Irak, et des pays en flammes ?
Les enfants de mon pays sont notre raison d'espérer.
Sur leur interminable chemin de croix, ils rencontrent, Dieu merci, quelques Simon de Cyrène. Des chefs d'État et des décideurs.
Je voudrais remercier en particulier le Président Chirac dont l'amitié avec le Liban est comme une étoile scintillante dans notre ciel endeuillé. En bravant tous les obstacles pour être parmi nous en ces heures cruciales, ses envoyés, M. de Villepin et M. Douste-Blazy nous ont prouvé que nous ne sommes pas seuls dans la tourmente et que l'amitié séculaire entre nos deux pays a un arôme qui nous empêche de désespérer.
Le proverbe Libanais stipule que "l'œil du souffrant est étroit". Il voit tout et se remémore tout. Merci à tous ces amis français dont le sang de saint Vincent de Paul circule dans les veines, de nous ouvrir un coin de ciel dans l'enfer où les idéologies aveugles nous ont plongés malgré nous. Dans la nuit, il est impératif de croire à la lumière. L'huile de notre lampe ne sera jamais épuisée grâce à vous, bâtisseurs des cathédrales et réceptacles des larmes des enfants sans enfance.
*Mgr Mansour Labaky est vicaire épiscopal du diocèse de Beyrouth. Il accueille à Mansourieh, dans le foyer Notre-Dame du Sourire, plus d'une trentaine de familles réfugiées en provenance du sud de Beyrouth et du Liban-Sud.■ On peut envoyer des dons à l'association "L'enfant du Liban"
38 rue des Epinettes, F75017 Paris.
Tél. – 01 44 85 04 81
■ Contact : lenfantduliban@voila.fr
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