Source [Conflits] : C’est ce qu’affirme Ghislain Benhessa dans son nouvel ouvrage paru en novembre. Après avoir détricoté le triomphe de la légalité sur la légitimité dans son Totem de l’État de droit, l’avocat, philosophe et docteur en droit strasbourgeois signe un essai saillant déplorant l’évacuation progressive du demos dans les prises de décisions publiques de ces cinquante dernières années.
Ghislain Benhessa, Le référendum impossible, éd. L’artilleur, Paris, 2023, 270 pages
Le référendum impossible de Ghislain Benhessa est avant tout une histoire et une réflexion sur la Ve République au regard de l’implication du peuple dans le jeu politique. De manière inévitable, l’auteur remonte donc jusqu’à la partition Sieyès / Rousseau qui structure le paysage politique français depuis le XVIIIe siècle :
« D’un côté, la souveraineté de la nation, qui délègue à ses représentants l’exercice de la volonté générale. […] De l’autre, la souveraineté du peuple, et avec elle le suffrage universel, le référendum, le mandat impératif ou le droit de révocation des élus. »
« Un officier d’état civil un peu spécial »
Benhessa ne s’en cache pas un seul instant, son travail se place dans le logiciel du général de Gaulle, qui a su en 1958 opérer à un mariage de raison entre souveraineté populaire et souveraineté nationale.
Contre la IVe République et le « système des partis », de Gaulle veut rendre la parole au peuple et ne conçoit pas l’exercice de son pouvoir sans être en contact direct avec lui, et fait du référendum, emblème de la démocratie directe, « le bras brionique de la Constitution de 1958. » Selon Benhessa, « à compter du 4 octobre 1958, le référendum est libéré de ses chaînes. »
Et pour cause, de 1958 à 1969, de Gaulle va utiliser quatre fois son arme de prédilection, « soit pour sortir de la crise et remettre au peuple les clefs de son destin — c’est le sens des consultations sur l’Algérie —, soit pour associer les Français aux métamorphoses institutionnelles qu’il appelle de ses vœux — de l’élection du Président au suffrage universel direct jusqu’à la régionalisation et la rénovation du Sénat. » C’est d’ailleurs sur ce dernier sujet qu’il tombera, laissant derrière lui un chantier inachevé, celui de la participation, destiné à faire entrer les forces vives de la nation dans les plus hautes sphères de l’État.
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