C’est officiel, on va ouvrir un Capes de japonais, et madame notre ministre l’a annoncé à son homologue japonais (M. Hiroshi Hase).
Rien comme les chiffres pour justifier une innovation de cette envergure : 5 724 élèves étudient le japonais dans 97 établissements privés et publics, (plus 982 élèves au CNED, total 6 706 élèves). La Nouvelle-Calédonie à elle seule compte 2 090 élèves.
Les chiffres, ça parle. 2090 cela représente plus d’un tiers mais pas tout à fait la moitié des amateurs de japonais, rien que pour la Nouvelle Calédonie. Reste donc 2636 élèves sur tout le reste du territoire national (Guyane, Martinique, Guadeloupe et Mayotte comprises). On va donc organiser un Capes pour un peu plus de 1500 élèves qui font du japonais en métropole. Je me demande combien ça va coûter… J’espère qu’on préviendra les postulants que la plupart d’entre eux devront partir enseigner à Wallis et Futuna.
Je doute par ailleurs qu’en Seine saint Denis l’engouement pour le japonais soit partagé.
A l’heure des ELCO, de la défaite de la pensée, de la culture française et de la langue, à l’heure de la fermeture des classes de latin (celles de grec n’existent plus depuis des lustres), de la conversion forcée des germanistes, de valses de réformes de plus en plus folles, que nous ayons des amateurs de japonais cela ne suffit pas à me réchauffer le cœur.
Infiniment plus palpitant, l’annonce de « la Journée internationale de lutte contre l'homophobie et la transphobie ». En sous titre, « le ministère mobilisé contre les violences et les discriminations ». Vu le nombre de transsexuels que comptent nos établissements, je ne vois pas où est l’urgence, mais je dois manquer de sens prophétique.
Une question quand même. Et si un jour nos (vos) enfants avaient un professeur transsexuel ?
Moi, je les changerais d’établissement. Je m’explique, et qu’on me pardonne d’ouvrir quelques tiroirs de ma mémoire.
A l’âge de 12 ans, je trouvais que mon professeur de français avait de bien jolie fesses rondes ; que le professeur de latin, - un grand dégingandé coiffé à la Du Guesclin - révélait un sourire pleins de dents qui semblaient sens dessus-dessous, - ce qui m’enthousiasmait littéralement ; le professeur de géographie était une vieille rombière qui bramait « quelle bourde », dés qu’on ouvrait la bouche, si bien que j’ai longtemps cru qu’elle nous traitait de « burne » ou de quelque chose d’approchant et je planquais avec soin au fond e la classe en me demandant si c’était ça qu’on appelait une vieille fille ; la prof de sciences naturelles avait des jambes magnifiques et parfaitement assumées. Elle donnait envie à une petite fille de douze ans un peu empruntée de devenir « grande ». Vous l’avez compris, pendant tout le temps que mon esprit vagabondait autour de la plastique des unes et des autres, il est bien clair que je n’écoutais pas grand-chose.
C’est la raison pour laquelle je n’ai jamais montré mes épaules aux élèves, même au Qatar malgré la chaleur, et même quand elles étaient rondes, jeunes et belles, ce qu’elles ne sont plus. L’esprit des élèves est vagabond, nous le savons bien, si nous avons un petit peu de mémoire et d’honnêteté. Les aider à le gouverner fait partie de la responsabilité de l’enseignant. Avec un peu de solide compréhension de leur jeune humanité.
Les élèves ont des yeux pour voir, et ce qu’ils voient, ce sont des corps. Des corps plus ou moins beaux, plus ou moins jeunes, auxquels ils sont sensibles parce que ce corps est le pôle de visibilité de ce que nous sommes. Ils sont capables de deviner la fragilité d’un enseignant rien qu’à sa façon de se mouvoir. Ou sa force aussi. Ce corps est sexué, il n’est pas sexuel. Par et dans ce corps, nous ne nous donnons pas seulement à voir, nous nous donnons à aimer. Cela doit être fait dans la chasteté, qui doit imprégner nos relations, toutes nos relations et tout particulièrement avec des intelligences jeunes, plastiques et ouvertes. L’enseignement impose et implique des échanges régulés, dans l’aimance et dans la raison, dans la liberté et dans la chasteté. Il serait temps de le rappeler.
Toute notre tradition religieuse dit et enseigne que ce corps qui est le nôtre est le lieu de la révélation divine. Il serait temps, là aussi, de s’en souvenir. Détruire la différenciation sexuelle, c’est détruire ce par quoi Dieu se rend « visible ». Car « homme et femme (ish et isha) il les créa ».
Marion Duvauchel
Professeur de lettres et de philosophie
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