Article rédigé par La Fondation de service politique, le 10 mai 2002
[Lausanne] Le Rapport 2002 sur la liberté d'enseignement dans le monde apporte une première réponse à un souhait exprimé par l'UNESCO : " Il n'existe pas pour le moment de base de données internationale sur les lois et la pratique juridique des pays en ce qui concerne le droit à l'éducation, sans parler même de la question du choix de l'éducation " (Rapport mondial sur l'éducation 2000, p.
91). Il examine la situation dans 85 pays représentant le 87% de la population mondiale. Il s'agit de la première étude d'une telle ampleur réalisée dans le monde. En 1995 déjà, l'OIDEL avait publié un premier rapport sensiblement plus restreint qui avait eu un grand impact sur l'opinion publique.
L'ouvrage de l'OIDEL se concentre sur les aspects juridiques de la liberté d'enseignement. C'est ainsi que, à propos de chacun des pays examinés, l'étude met en évidence l'existence ou la non existence de dispositions juridiques autorisant la créations d'écoles privées. En raison de l'imprécision de ce terme, le rapport introduit une nouvelle typologie: école publique / école non gouvernementale. En effet la grande majorité des écoles privées sont en réalité issues de la société civile ou des institutions religieuses.
Elle analyse ensuite le type de financement accordé par l'Etat à ces écoles. Ces deux critères font l'objet d'une évaluation chiffrée qui, combinée à des données telles que le taux net de scolarisation et le pourcentage d'enfants scolarisés dans des écoles non gouvernementales par rapport à la totalité des élèves, permet le calcul d'un " indice composite de liberté d'enseignement " selon lequel les pays sont classés.
En introduction, les auteurs du rapport soulignent que leur étude ne représente qu'un premier pas en direction de l'élaboration d'indicateurs plus précis. Dans l'état actuel des données statistiques en effet, l'analyse ne peut s'appuyer que sur les seules données fournies par les Etats et ne peut que difficilement tenir compte de la manière dont les dispositions juridiques sont effectivement mises en œuvre dans les différents systèmes scolaires. La notion même de public ou privé en éducation est difficile à cerner et change en fonction des pays.
En tête du classement établi par l'OIDEL se trouvent des pays mettant en œuvre une politique très favorable au secteur non gouvernemental : Pays-bas, Belgique, Australie. Parmi les " bons élèves " figurent aussi les pays nordiques telles que la Suède, le Danemark ou la Finlande, qu'on aurait attendus intuitivement tout en haut de l'échelle mais qui " perdent des points " à cause du nombre relativement faible d'écoles non gouvernementales établies dans ces pays. Ce phénomène s'explique notamment par le fait que les écoles publiques disposent d'une large autonomie pédagogique et, par conséquent, garantissent une réelle diversité dans les possibilités pour les parents de choisir l'école de leurs enfants.
Le rapport permet de faire un certain nombre de constatations qui vont à l'encontre des idées reçues:
1. Près de 65% des pays étudiés octroient une subvention à l'éducation NG. Près de 39 % subventionnent au moins les salaires des enseignants.
2.En termes de tendance générale, les pays à indice de liberté élevé sont également ceux disposant d'un indice d'instruction élevé selon la définition du PNUD. (Annexe III)
3. Il n'existe aucune corrélation significative entre la qualité d'enseignement en termes de niveau d'instruction et les dépenses en éducation.
4. Le financement de l'enseignement privé n'entraîne pas une augmentation des dépenses publiques en éducation. Les chiffres ne révèlent aucune corrélation.
Le bon classement de la France s'explique, lui, par un corpus juridique très " généreux " envers l'école libre. Il ne fait aucun doute que la situation de ce pays apparaîtra nettement moins favorable lorsqu'il sera possible d'introduire dans l'évaluation des critères relatifs à l'autonomie pédagogique réelle. Dans ce sens, le classement de la France, comme celui de l'Italie, démontre avec évidence qu'un bon système d'indicateurs de liberté d'enseignement devra, à l'avenir, faire une large place aux valeurs d'autonomie et de pluralisme.
> Depuis sa création en 1985, l'OIDEL, (Droit à l'éducation et liberté d'enseignement) travaille à promouvoir le droit à l'éducation et la liberté d'enseignement. Au cours de ces dernières années, l'OIDEL s'est efforcée de susciter, tant auprès des organes de protection des droits de l'homme que des gouvernements et des acteurs directs de l'enseignement, un travail de réflexion sur la portée et les implications de ce droit et plus spécifiquement de la liberté d'enseignement.