Article rédigé par Philippe Oswald, le 23 juillet 2011
Après tout, s'il y tient, Kadhafi pourrait peut-être rester en Libye, dit-on à Paris (avec l'accord de Washington)... C'est qu'il y tient mordicus, le bougre, et le fait savoir avec fracas ! Entre deux communiqués de victoire, les rebelles piétinent et comptent leurs morts : notamment dans le port pétrolier de Brega, au sud-ouest de leur fief de Benghazi, dont ils ne parviennent toujours pas à chasser les forces kadhafistes, ainsi qu'à Zlitane, à 160 kms à l'est de Tripoli, où les gouvernementaux les ont cernés avec l'appui de chars d'assaut au terme d'une violente contre-attaque.
Manifestement, les armes fournies par la France aux insurgés en sus des frappes de l'Otan, ne leur ont pas permis de faire le poids. Leur demande d'obtenir d'autres livraisons s'est heurté à un refus poli de l'Elysée : cette initiative française avait été critiquée jusque dans les rangs des alliés qui n'avaient pas du tout apprécié d'en avoir été avertis a posteriori , comme l'a reconnu le 20 juillet le ministre de la Défense, Gérard Longuet. Dans cet entretien avec des journalistes, le ministre n'a d'ailleurs pas caché ses doutes devant la capacité des forces rebelles à investir Tripoli, la solution devant venir à son avis d'un soulèvement des habitants de la capitale libyenne. Une réponse à Bernard-Henri Lévy, mentor de la révolution libyenne, qui venait d'accompagner à l'Elysée la délégation de la rébellion, ce même mercredi 20 juillet. Dans une conférence de presse, BHL n'avait pas lésiné dans la comparaison historique : Les commandants insurgés sont venus expliquer au chef de l'Etat que les clés de Tripoli sont à Misrata parce que ses combattants sont disciplinés, aguerris aux combats de ville et qu'ils ont en eux l'expérience d'une victoire militaire déjà obtenue , a-t-il expliqué. Et de renchérir : J'ai la conviction que s'il y a des hommes capables de marcher sur Tripoli et de la libérer, ce sont eux. La 2ème DB de la libération de Tripoli sera en grande partie composée de ces hommes .
Apparemment, les rebelles attendent encore leur Leclerc. Le blocage est tel qu'ils en sont réduits à feindre d'accepter la proposition française de permettre au dictateur de couler des jours paisibles en Libye à condition d'avoir quitté le pouvoir. Toutes les options pour se débarrasser de Kadhafi mort ou vif ont été avancées par la diplomatie française, la dernière en date -une paisible retraite du dictateur dans son pays- ayant tout l'air d'un pis-aller après cinq mois de déconvenues sur les capacités des rebelles et les défections qu'on escomptait massives dans les rangs kadhafistes. Faute d'offensive décisive sur le terrain, reste donc à convaincre ce dernier et ces adversaires d'un gentleman agreement offrant une honorable porte de sortie.
Que de tâtonnements, d'approximations et de volte-face pour en arriver à une solution aussi peu crédible ! Il y a peu de temps encore, notre ministre de la Défense, Gérard Longuet proposait au grand dam des rebelles que Kadhafi puisse demeurer dans une autre pièce de son palais, avec un autre titre , autrement dit se maintenir avec un bout de pouvoir. Il était aussitôt démenti par le porte-parole du gouvernement et Alain Juppé, ministre des Affaires étrangères, martelait qu'il fallait en finir avec le dictateur. Mais les semaines passant, Alain Juppé lui-même a mis de l'eau dans son vin : L'une des hypothèses envisagées, c'est qu'il (Kadhafi) séjourne en Libye à une condition : qu'il se mette à l'écart de la vie politique libyenne a-t-il déclaré sur LCI. Plus de palais donc, mais une résidence (surveillée ?) sur le territoire libyen. Et tant pis pour le mandat d'arrêt du Tribunal pénal international !
Ces palinodies n'échappent pas aux Chinois, chassés de Libye par l'offensive de l'Otan. Le président chinois Hu Jintao a informé par téléphone son homologue sud-africain Jacob Zuma que Pékin travaillerait avec l'Union africaine (UA) pour trouver une solution à la crise libyenne.
Sources : RFI, Le Figaro, Le Nouvel Observateur
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