Article rédigé par Pierre-Olivier Arduin*, le 21 juin 2011
Le 24 mai dernier, l'Assemblée nationale a réformé en première lecture la loi hospitalière du 21 juillet 2009. Parmi les mesures adoptées, l'expérimentation de l'IVG médicamenteuse par les sages-femmes.
La loi portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST) du 21 juillet 2009 avait initialement prévu une expérimentation régionale autorisant les sages-femmes à pratiquer des IVG dites médicamenteuses. Cette disposition, on s'en souvient, avait été annulée par le Conseil constitutionnel pour vice de forme, en l'occurrence parce que la durée de la phase expérimentale ne figurait pas dans le texte.
Avec le soutien appuyé de la gauche et contre l'avis du gouvernement de leur propre majorité – à croire que cela devient une habitude pour certains parlementaires de la droite ! –, les députés Bérengère Poletti et Valérie Boyer (UMP) sont parvenus à faire voter en première lecture un amendement qui réintroduit le même dispositif mais en prenant soin cette fois-ci de préciser que la période expérimentale s'étalera sur deux ans (nouvel article 17 ter insérant l'article L. 2212-10-1 au Code de la santé publique). Raison invoquée dans l'exposé des motifs : mettre à contribution de nouveaux professionnels de santé du fait du manque chronique de médecins pratiquant les IVG. Il faut dire que le nombre d'IVG par RU-486 explose en France, représentant désormais la moitié des 220 000 avortements annuels dans notre pays. Pour les promoteurs du droit à l'IVG , il est donc nécessaire de réquisitionner de nouveaux personnels pour satisfaire à la demande.
Si le texte est confirmé au Sénat, une région française qui connaît un taux important de recours à l'avortement sera choisie pour que les sages-femmes travaillant aussi bien en établissements de santé publics que privés participent à la mise en œuvre des IVG par voie médicamenteuse. Le dispositif maintient la clause de conscience au bénéfice de la sage-femme, en précisant cependant qu'il est de son devoir d'informer sans délai l'intéressée de son refus et de lui communiquer immédiatement le nom d'un praticien susceptible de réaliser l'acte. Ce qui revient à contraindre la sage-femme à coopérer à la préparation d'un acte que sa conscience réprouve sans parler des discriminations à l'embauche dont elle pourra éventuellement faire les frais.
L'essence de la profession des sages-femmes est de plus en plus menacée. La loi du 21 juillet 2009 les avait déjà habilitées à prescrire l'ensemble des contraceptifs hormonaux, à poser les implants et insérer les stérilets. La nouvelle loi de bioéthique en a fait les nouveaux prescripteurs des examens de diagnostic prénatal en les obligeant à informer systématiquement leurs patientes de l'existence de ces tests. En les autorisant à pratiquer des IVG, c'est toute une profession qu'on est en train de faire basculer dans le plus grand silence.
Depuis l'aube des temps, la vocation des sages-femmes est d'accompagner la grossesse et d'accueillir la vie. C'est d'ailleurs l'avis implicite d'une majorité de Français qui considèrent à 56% (contre 41%) que ce n'est pas le rôle des sages-femmes de pratiquer l'interruption volontaire de grossesse (sondage IFOP, septembre 2008).
Il est urgent de se mobiliser pour défendre une profession en grand danger.
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