Le Liban en otage, une fois de plus
Article rédigé par Gérard Leclerc*, le 18 juillet 2006

Le brusque embrasement du Proche-Orient relève d'une fatalité dont les malheureuses populations de la région sont souvent les témoins impuissants et les victimes innocentes. La façon dont les événements semblent se répéter plaide pour le seul rapport de forces avec, pour Israël, l'obscur espoir et le pari hasardeux que sa supériorité militaire et le soutien américain inconditionnel garantiront sa sauvegarde, faute qu'aucun compromis négocié ne soit crédible.

 

Le gouvernement d'Ehud Olmert, dans la logique du général Sharon, n'a consenti de concessions à l'adversaire que dans le cadre d'une méfiance armée qui étouffait de facto toute possibilité d'élargissement d'une négociation. N'accordant que peu de crédit à l'Autorité palestinienne antérieure, comment aurait-il pu accepter la prise de pouvoir démocratique de la faction la plus irréductible même lorsque celle-ci était sur le point de reconnaître l'impasse de son extrémisme ?

Tant que la mouvance palestinienne n'aura pas à sa tête l'équivalent d'une personnalité comme Anouar el Sadate, rien de décisif ne se produira capable de changer radicalement la donne.

Dans ces conditions, Israël fait prévaloir sa supériorité militaire, sans que les grandes puissances sachent modérer ses ambitions. La France a beau déclarer excessives les représailles sur le Liban, personne n'est en mesure d'arrêter le pilonnage de Beyrouth et une éventuelle opération d'envergure dans l'ensemble du pays. Chacun évacue ses ressortissants, laissant le soin à l'armée israélienne de faire la preuve de sa maîtrise absolue en anéantissant les bases et l'arsenal du Hezbollah.

Est-ce vraiment raisonnable ? C'est le Liban qui paie le prix du "fracas des armes et du sang versé". C'est sa population civile qui se trouve injustement frappée, ainsi que ses infrastructures économiques, qui sont anéanties, après quinze années d'efforts pour renaître des ruines de la guerre civile.

Un tel engrenage n'est pas acceptable. La population, notamment chrétienne, ne peut être prise à nouveau en otage, sans compter que la seule supériorité militaire est impuissante à rétablir la paix durablement, dès lors que renaissent sans cesse les rébellions et que les haines entretenues suscitent guérillas et terrorisme. Les Américains l'ont appris à leur détriment en Irak.

Benoît XVI a mis son autorité morale dans la balance pour arrêter ce processus inacceptable (cf. infra). Il importe au plus tôt que les États-Unis et l'Europe, avec l'aide éventuelle de toutes les autres puissances résolues à la paix [1], imposent un compromis. La suspension des représailles, l'échange des otages et des prisonniers, la sécurisation des populations sont les préalables à la reprise de pourparlers entre Israéliens et Palestiniens. C'est la seule issue pour déboucher, dans l'horizon le moins incertain, sur la coopération de deux États partenaires pour un avenir commun.

[1] Mais il ne faut pas trop y compter, comme on l'a vu à l'ONU ou au G8 : la Russie de Poutine est plus intéressée à peser les avantages qu'elle peut espérer d'une médiation avec l'Iran d'une part et d'une hausse du prix du pétrole d'autre part, et la Chine fait d'autres calculs du même genre où le désir de paix au Proche-Orient est bien secondaire.

L'appel de Benoît XVI pour la paix

 

CITE DU VATICAN, 16 juillet 2006 (VIS). Après l'angélus récité depuis son chalet du Val d'Aoste (Italie), Benoît XVI a prié pour la paix en Terre Sainte.

 

Le pape a dit que la dégradation de la situation proche-orientale est pour tous "un motif de profonde préoccupation, notamment l'accentuation des actes de guerre au Liban, qui entraînent de nombreuses victimes civiles. Cette violente confrontation a pour origine un état de violation du droit et de la justice. Ni les agressions terroristes ni les représailles, surtout lorsqu'elles ont de tragiques conséquences pour la population, ne peuvent être justifiées car elles ne portent à aucun progrès, comme l'expérience le prouve".

 

"Ce jour est consacré à Notre-Dame du Carmel, du nom du massif de Terre Sainte peu distant du Liban et qui domine la ville israélienne d'Haïfa, récemment bombardée".

 

Puis le Saint-Père a demandé à "la Reine de la paix d'implorer Dieu afin de rétablir la concorde et pour que les responsables politiques s'engagent dans la voie de la raison en ouvrant de nouvelles possibilités de dialogue et d'accord. Dans ce but — a-t-il ajouté — j'invite les Églises locales à prier tout spécialement pour la paix en Terre Sainte et au Moyen-Orient".

 

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*Editorial à paraître dans le prochain n° de France catholique

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