Article rédigé par La Fondation de service politique, le 04 octobre 2002
La clinique des Franciscaines de Versailles est une institution. Depuis 1941, sa maternité a vu naître 37.000 bébés. Bloquées par la vétusté de leurs locaux, marquées par la diminution de leurs propres effectifs, les religieuses n'ont pas fait le choix de renoncer à leur vocation médicale.
Elles ont relevé un défi courageux : reconstruire une nouvelle clinique aux portes de la ville, immense, ultra-moderne. À l'entrée, la chapelle grande ouverte accueille les visiteurs. C'était ce samedi 28 septembre l'inauguration officielle, en présence des autorités civiles. L'évêque de Versailles, Mgr Eric Aumonier, n'a pas attendu la bénédiction des bâtiments pour dire son " souhait ardent " que la référence chrétienne de la clinique soit pour tous une garantie de " respect inconditionnel de la vie " et d'accompagnement de toutes détresses. Un message de vérité et de confiance. Extraits.
[Document] " [...] En remerciant ici tous ceux qui, à des titres divers, ont contribué à l'installation nouvelle [de cette clinique], je voudrais rendre un hommage au courage et à la fidélité de nos Sœurs qui ont eu l'audace de mener à bien le projet : le titre même de la clinique, dont leur congrégation est propriétaire, est et restera, je l'espère de tout cœur, le signe d'un accueil et de soins marqués par le sourire et l'attention fraternelle de François d'Assise, dont la "manière" est pour ainsi dire... contagieuse ! La présence de nos Sœurs ici même, la porte ouverte de la chapelle, constituent des signes très concrets et des invitations de celui qui nous rejoint au cœur de l'angoisse :
" Venez à moi, vous qui ployez sous le poids du fardeau, et moi, je vous procurerai le repos " (Mt 11, 28).
Je souhaite ardemment que la référence chrétienne de cet établissement soit pour tous ceux qui s'adressent à lui ou y travaillent, garante d'une certaine éthique de la personne. Les hôtes de cette maison, les médecins et le personnel, quelles que soient leurs croyances ou leurs convictions, doivent pouvoir compter sur la clarté de choix réfléchis sur la base de cette éthique qui a pour signe distinctif " le respect inconditionnel de la vie et de la dignité humaine " (1), depuis la conception jusqu'à la mort naturelle.
Cet engagement absolu (2) est une limite à notre volonté de puissance et nous interdit de définir pour les autres, ou même pour nous-mêmes, des seuils d'humanité (3), en deçà ou au-delà desquels nous décrèterions que quelqu'un est digne ou non de vivre. Le respect de la vie va de pair avec une attention extrême à toutes les situations de détresse et avec un engagement inconditionnel à accompagner les personnes conformément à leur dignité native : personnes en fin de vie (terrestre), enfants à naître, femmes à aider dans leur décision de garder l'enfant qu'elles ont conçu, ou à accompagner dans l'accueil de leur enfant. Une telle éthique contribue à faire grandir en humanité notre société (4) et constitue la base de la confiance qui doit s'établir entre les malades et ceux qui les soignent, les femmes enceintes et ceux qui les accompagnent jusqu'à l'accouchement.
En parlant ainsi, j'évoque la responsabilité particulière des médecins et du personnel soignant qui sont, directement et quotidiennement, confrontés à des questions redoutables.
Comment ne pas citer ici celles qui adviennent à l'occasion du diagnostic prénatal ou celles que posent l'accompagnement et les soins donnés à un patient au cours de la phase terminale de sa maladie mortelle. Par expérience, ils se méfient des discours trop généraux, en même temps qu'ils cherchent un éclairage spirituel sur ce qu'ils font, qui renvoie à ce qu'est l'homme, sa liberté, son bien, son bonheur. Ils se méfient – et ils ont raison ! – de ces amis de Job – faux amis, en vérité, – qui veulent expliquer à Job pourquoi il souffre. Ils ont plus de sympathie pour le philosophe Qohélet, faussement désabusé, mais en réalité plein de respect pour l'homme qui vit et qui meurt. Ils savent bien que nos instruments de mesure, si pointus soient-ils, n'atteignent pas le tout de l'homme, mais qu'ils sont pourtant indispensables.
Ils savent bien que la relation patient-soignant est une relation entre des personnes et non pas entre des organes et une technique. Ils connaissent enfin leur responsabilité, qui ne remplace ni celle des patients ni celle des familles. Car tout homme, l'homme et la femme ordinaires, au nom même de son humanité et de sa conscience libre, est responsable. Ayant droit d'être éclairé, il peut et doit prendre part aux décisions qui le concernent. C'est pourquoi aussi, je souhaite que ce lieu puisse favoriser la réflexion, l'éclairage de la conscience de chacun, dans l'écoute et la recherche du bien réel et complet du patient, sans se laisser dicter des décisions par l'opinion.
De telles exigences interpellent vigoureusement l'Église et l'évêque. C'est pourquoi je souhaite promouvoir aussi rapidement que possible la création d'une équipe d'aumônerie, en lien avec les religieuses et le Service diocésain de la pastorale de la santé, afin qu'elle soit en mesure de répondre aux besoins spirituels et religieux des malades et de leurs familles, et d'être associée à la réflexion éthique des médecins et du personnel soignant. Cette aumônerie sera à la disposition de tous et chacun, en ce lieu où cohabitent à la fois la joie de la vie naissante, la souffrance des malades et des opérés, l'angoisse des mourants et de leurs familles, le dévouement des soignants. "
+ Éric Aumonier, évêque de Versailles.
Texte intégral sur : http://catholique-versailles.cef.fr/actu.html
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(1) Déclaration du Conseil permanent de la Conférence des Évêques de France sur le projet de loi relatif à l'IVG, 11 octobre 2000. cf. Documentation Catholique 2000, n° 2235, p. 931-932.
(2) Déclaration du Conseil permanent pour le 20e anniversaire de la loi sur l'avortement, DC 1995, n° 2109, p. 122.
(3) Déclaration du Conseil permanent sur le statut de l'embryon, 25 juin 2001. DC 2001, pp. 704-705.
(4) Cardinal Decourtray, Discours d'ouverture de l'assemblée plénière de l'épiscopat, Lourdes, 22 septembre 1988, DC 1988, n° 1973, p. 1124.