Article rédigé par Jean-Germain Salvan*, le 12 mars 2010
Que n'avons-nous entendu lors de la campagne électorale de Barak Obama, puis de son élection à la présidence des États-Unis ! Et lors de notre retour dans l'OTAN ! Après dix ans d'efforts, le renoncement d'EADS à concourir pour l'obtention de l'énorme marché du renouvellement de la flotte d'avions ravitailleurs de l'armée américaine (179 appareils, pour un marché de 35 à 40 milliards de dollars) devrait pourtant nous ouvrir les yeux.
Trop de Français ont l'impression de connaître les Américains, parce que nous écoutons leurs musiques, que nous portons des jeans, que nous regardons leurs séries à la télévision. Fariboles : les États-Unis sont un pays complexe, mais où le mépris des Européens est une constante, depuis que les pères fondateurs ont quitté l'Europe, ses rois, ses turpitudes, pour fonder une nation à proposer en modèle au reste de l'univers, une nouvelle terre promise . Ils ne sont venus combattre et stationner en Europe qu'aux moments choisis par eux et d'abord pour des buts qui leur étaient propres.
Barak Obama est un Américain riche, avec de multiples racines, pour qui l'Asie, le Pacifique, l'Océan Indien ont bien plus d'importance qu'un continent peuplé d'assistés fatigués, le nôtre. Comme tout président des États-Unis, il fut élu pour défendre les intérêts américains, pas les nôtres. Il ne faut donc pas s'étonner s'il fait tout, en temps de crise, pour sauvegarder des emplois chez lui.
Nos naïvetés
Ceux qui furent surpris à Copenhague vont-ils enfin comprendre, après l'échec de la vente aux Américains d'un avion ravitailleur conçu en Europe, EADS et Northrop ayant dû jeté l'éponge le 8 mars 2010 ?
Or cet échec est d'abord la conséquence de nos naïvetés.
Lors de notre retour dans l'OTAN, j'avais demandé pourquoi on n'avait pas sollicité l'avis de ceux qui y servirent avant 1966, car il en reste. Non pour dire ce qu'il fallait faire, mais pour savoir ce qu'il fallait éviter.
Car notre retour dans l'OTAN intéressait depuis longtemps les États-Unis. D'abord pour nous faire payer : notre retour se traduit par des cotisations qui nous auraient permis d'acheter deux Rafale ou un escadron de chars Leclerc chaque année. Ensuite pour accroître notre participation militaire en Afghanistan.
Aurait-il été indécent d'exiger en contrepartie de nos engagements :
- Un accord pour l'achat des avions ravitailleurs conçus par EADS et Northrop-Grunman ?
- Une définition claire des politiques et stratégies en Afghanistan, avec, en autre 1/ le contrôle de la frontière entre Afghanistan et Pakistan, et 2/ une conférence internationale comportant, outre les Alliés de l'OTAN, la Chine, la Russie, le Pakistan et l'Iran, sans qui aucune solution à long terme n'est possible ?
Ou sommes-nous partis, une nouvelle fois, combattre pour le Roi de Prusse ?
*Jean-Germain Salvan est général (2e section), 10 mars 2010
[1] La fourniture de 179 appareils pour un montant estimé de 35 à 40 milliards de dollars.
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