Article rédigé par Philippe de Saint-Germain, le 29 mai 2009
La crise ? Les gouvernements ? Les peuples ? La Commission européenne est au-dessus de cela : la conception qu'elle a d'elle-même la dispense de prêter attention à cette écume politique . Donc elle poursuit sur sa lancée en dépit de tout. À preuve, ces trois exemples tirés de l'actualité la plus récente.
1/ La crise financière a révélé un besoin impérieux de régulation bancaire plus ferme et plus active ? La Commission se contente de proposer des mécanismes institutionnels peu engageants : un conseil européen du risque systémique qui fera des études et peut-être des propositions dans quelques années, un système européen des superviseurs financiers qui se contentera de coordonner les contrôleurs nationaux. On en reparlera lors de la prochaine crise...
2/ Il faut réguler les hedge funds et s'attaquer aux paradis fiscaux ? La Commission fait encore plus fort : elle légitime les deux ! En application de sa doctrine sur la libre circulation, elle publie un projet de directive régulant non les fonds eux-mêmes mais leurs gérants, avec une simple obligation d'immatriculation assortie d'un droit de commercialiser partout en Europe les fonds spéculatifs qu'ils gèrent, même domiciliés dans les paradis fiscaux.
3/ La fraude Madoff a été permise en partie grâce à une faille de la législation anglo-saxonne sur le régime de propriété des titres financiers ? Qu'à cela ne tienne : au nom du démantèlement des barrières la Commission ouvre une consultation qui a pour objectif de généraliser cette législation au détriment de celle qui est en vigueur dans tous les pays d'Europe continentale qui seule garantit la propriété des épargnants.
Ces initiatives ont deux points communs :
- Du point de vue financier : ménager les intérêts des banques d'affaires américaines qui se sont installées à Londres pour échapper à la tutelle de leurs autorités nationales et qui ont circonvenu la Commission depuis longtemps.
- D'une façon générale : officialiser le maximum de propositions avant la fin de son mandat pour lier le Conseil et le Parlement à l'avenir, quoi qu'il arrive ; ayant seule le droit d'initiative, elle bloque ainsi toute velléité politique contraire.
N'imaginons pas que le commissaire français s'y soit opposé : ces propositions ont été adoptées par la Commission à l'unanimité. Comme pour le vin rosé... Voilà qui relativise très sérieusement les discours électoraux et les postures politiques qui les accompagnent.
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