Etats généraux de Marseille : les bonnes questions
Article rédigé par Catherine Giner*, le 12 juin 2009

Le premier "forum citoyen" organisé par le gouvernement dans le cadre des états généraux de la bioéthique s'est tenu à Marseille mardi 9 juin. Nous sommes heureux de publier le discours d'introduction prononcé par la représentante du maire de Marseille, Catherine Giner, un discours qui pose les vraies questions posées par la révision des lois de 2004 sur la recherche embryonnaire et le DPI.

M. le député, président du comité de pilotage,
Mmes et MM. les membres du comité de pilotage,
MM. les grands témoins,
Mmes et MM. les membres du panel citoyen,
Mesdames, Messieurs, chers amis,
Permettez-moi tout d'abord, de vous exprimer les regrets de notre sénateur-maire de n'avoir pu être ici pour vous accueillir, mais il se devait d'être à Paris aujourd'hui, pour présider la séance du Sénat.
Je voudrais aussi remercier Nicolas Sarkozy d'avoir initié ces états généraux de la bioéthique. C'est une première ! Une démarche qui s'appuie sur les Espaces éthiques régionaux, et je salue particulièrement Jean-François Mattei, fondateur de l'Espace éthique méditerranéen.
Le chef de l'État a voulu faire du débat bioéthique, un débat citoyen, où toutes les sensibilités puissent s'exprimer, les expériences se faire connaître, les témoignages être entendus, une réflexion collective être menée, sur des questions fondamentales qui engagent notre avenir commun, et nous concerne tous.
Le prodigieux développement des sciences et des techniques de ces dernières années a donné aux hommes une puissance jamais égalée, une maîtrise grandissante de la vie humaine.
Pourtant, tout ce qui devient possible doit-il être réalisé ? Tout ce qui devient possible est-il bénéfique pour l'être humain ? Quelles limites fixer à l'intervention de l'homme sur sa propre nature, sur son espèce, sur son évolution ?
Au cours de cette journée, deux sujets seront abordés : la recherche sur les cellules-souches, et puis les diagnostics prénatal et pré-implantatoire.
La recherche sur les cellules souches
Une des questions fondamentales à l'ordre du jour concerne la recherche sur l'embryon.
Depuis plusieurs années, les recherches effectuées sur les cellules-souches embryonnaires, les premières cellules-souches connues, n'ont pas donné les résultats attendus. On ignore encore aujourd'hui si des thérapies avec ces cellules seront un jour possibles.
Depuis, d'autres cellules-souches, les cellules-souches adultes, plus prometteuses, qui elles, ne soulèvent pas de problème éthique, ont été découvertes dans le corps humain, notamment dans la moelle osseuse, et dans le sang du cordon. Le manque de banques de sang de cordon en France est un vrai problème. Pourrait-on y remédier ?
Enfin, depuis 2007, les chercheurs disposent de cellules-souches induites. Cette prouesse technologique permet à de simples cellules de peau de retrouver la mémoire, de redevenir des cellules-souches, et de produire de nombreux types de cellules. Cette découverte ouvre des perspectives sans précédent.
Avec la présence de cellules-souches adultes dans le corps humain, et la possibilité de travailler sur les cellules-souches induites, faut-il, rendre pérenne la recherche sur l'embryon ? La recherche sur les cellules-souches embryonnaires se justifiera-t-elle encore demain ?
Les diagnostics prénatal et pré-implantatoire
Second sujet abordé aujourd'hui, les diagnostics prénatal et pré-implantatoire qui soulèvent aussi de nombreuses questions :

  • La pratique actuelle du DPN et du DPI nous place-t-elle à l'abri d'une dérive eugéniste? Ou bien nous a-t-elle déjà amenés à pratiquer l'eugénisme dans notre pays?
  • Le risque du DPI systématique, dans le but de mettre au monde des enfants les plus performants possibles, est-il réel ?
  • Le tri des fœtus et embryons par le DPN et le DPI, qui suppriment les malades, laisse-t-il suffisamment de place à la médecine fœtale et embryonnaire ?
  • Saura-t-on éviter que les connaissances de plus en plus poussées de l'identité biologique soient utilisées à des fins discriminatoires ou commerciales ?
  • Ces progrès scientifiques et techniques ne sont-ils pas en train d'échapper à tout contrôle, en menaçant l'identité, sinon la dignité même de l'homme ?
  • Dans un monde où on a enfin pris conscience de la nécessité de préserver la nature, a-t-on toujours conscience des réalités de la nature humaine ?


Le devoir du législateur est de rester vigilant et de veiller à ce que notre société reste une société humaine. Quand l'intérêt des uns va à l'encontre de l'intérêt des autres, c'est souvent l'intérêt des plus faibles qui est sacrifié. Le rôle de la loi est de protéger le plus faible, comme elle l'a fait pour la veuve et l'orphelin.
L'homme, disait Jean Rostand, est devenu trop puissant pour se permettre de jouer avec le mal. L'excès de sa force le condamne à la vertu.
*Catherine Giner est conseillère municipale de Marseille déléguée à l'enseignement supérieur et à la recherche, conseillère régionale, diplômée de l'Espace éthique méditerranéen dont elle est membre de la commission Assistance médicale à la procréation.

 

 

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