Article rédigé par Décryptage, le 14 octobre 2005
Le 5 juin dernier, des militants de l'association Act Up investissait la cathédrale Notre-Dame de Paris pour organiser un simulacre de mariage entre homosexuelles. Le recteur de la cathédrale, Mgr Patrick Jacquin, était molesté.
Indignés, 129 députés avaient demandé au Premier ministre une action publique. Dans sa réponse à une question écrite du député de Paris Claude Goasguen en date du 21 juin, le ministre de la Justice Pascal Clément informe le parlementaire du classement de l'affaire : l'infraction n'est pas caractérisée.
L'argumentation du garde des Sceaux laisse penser que la liberté religieuse en France est un droit dont les garanties laissent sérieusement à désirer. Manifester dans un lieu de culte, singer une cérémonie religieuse – en l'espèce un sacrement -, bousculer un prêtre, ne constituent pas un délit. Pour être poursuivis, les militants d'Act Up auraient dû : 1/ empêcher ou gêner l'exercice du culte (ils sont arrivés après la messe) ; 2/ profaner la mémoire d'un mort (ils se moquent des vivants) ; 3/ dégrader le mobilier religieux (ils n'ont rien cassé) et pour faire bonne mesure, dévoiler leur identité, puisque le ministre prétend que l'enquête n'a pas permis d'identifier les coupables (sic) !
Pour se consoler, les "plaignants peuvent se porter partie civile". Les catholiques apprécieront les scrupules du ministre à protéger la liberté d'expression.
Pour en savoir plus :
> LA REPONSE COMPLETE DE PASCAL CLEMENT A CLAUDE GOASGUEN
[Question publiée au JO le 21/06/2005, page 6218] "Le garde des Sceaux, ministre de la Justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que l'enquête diligentée sous le contrôle du procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris n'a pas permis de caractériser l'existence d'une infraction pénale susceptible d'être poursuivie. En effet, les investigations n'ont pas établi que les manifestants aient, par le désordre occasionné à la fin du service religieux, empêché, retardé ou interrompu l'exercice du culte, et, ainsi, commis la contravention prévue par l'article 32 de la loi du 9 décembre 1905.
"Or au cas d'espèce, seule cette infraction pénale était susceptible d'être applicable aux faits commis. En effet, l'article 225-17 du code pénal réprime la violation ou la profanation, par quelque moyen que ce soit, des tombeaux, sépultures ou monuments édifiés à la mémoire des morts. L'infraction est aggravée lorsqu'elle est commise à raison de l'appartenance ou de la non-appartenance, vraie ou supposée, des personnes décédées, à une nation, une race ou une religion déterminée, en application de l'article 225-18 du code pénal. Ces dispositions sanctionnent, de fait, l'atteinte portée au respect dû au mort, et ne protègent pas, en tant que tel, un lieu de culte d'une intrusion inopportune.
"Par ailleurs, si la loi n° 2003-83 du 3 février 2003 a introduit une circonstance aggravante dans les cas d'infractions commises à l'encontre d'un lieu de culte, force est de constater qu'au cas d'espèce, aucune dégradation par exemple n'a été occasionnée à l'édifice religieux.
"Enfin, malgré les diligences accomplies par les fonctionnaires de police, les auteurs des violences commises n'ont pu être identifiés, et la procédure ne pourra, en conséquence, qu'être classée sans suite par le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris.
"La décision de classement n'éteint pas toutefois l'action publique, et l'enquête serait reprise si des éléments nouveaux étaient portés à la connaissance des autorités de poursuites.
"Les plaignants peuvent également se constituer partie civile auprès du doyen des juges d'instruction. En tout état de cause, depuis 2002, en exécution des priorités gouvernementales définies, plusieurs circulaires d'action publique ont invité les magistrats des parquets généraux et des parquets à veiller à la fermeté et la célérité des réponses judiciaires apportées aux infractions motivées notamment par l'appartenance réelle ou supposée de la victime à une nation, une ethnie, une religion déterminée : il va de soi que dans ce cadre tous les cultes sont protégés."
> LA QUESTION ECRITE DE CLAUDE GOASGUEN
[Réponse publiée au JO le 27/09/2005, page 9007] "M. Claude Goasguen attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la manifestation organisée par l'association Act up à Notre-Dame-de-Paris le 5 juin dernier. Un certain nombre de militants de cette association a décidé de fêter le premier anniversaire du faux mariage de Bègles en simulant une célébration religieuse mariant un couple homosexuel dans la cathédrale de Notre-Dame. Ce simulacre a profondément bouleversé une cérémonie religieuse, constituant ainsi une profanation de ce lieu de culte.
"Á la suite de cette intrusion dans la cathédrale, les militants, les fidèles et les forces de sécurité de l'édifice se sont verbalement puis physiquement affrontés. L'archiprêtre de Notre-Dame a d'ailleurs été blessé à cette occasion par des militants de l'association organisatrice.
"L'État doit certes entendre et étudier les revendications, quelles qu'elles soient, mais il ne peut tolérer une atteinte au principe fondamental inscrit dans notre Constitution qu'est la liberté religieuse, ainsi qu'au libre exercice du culte qui en découle. Une action forte doit donc être entreprise au nom de l'intérêt général, afin que la foi de millions de nos concitoyens, choqués par de telles pratiques, ne soit pas publiquement bafouée en toute impunité. Il n'est aucune profanation religieuse, qu'il s'agisse de la religion musulmane ou de la religion juive, qui ne soit sévèrement condamnée.
"C'est pourquoi il souhaiterait savoir si une action publique a été ouverte à l'encontre des responsables de cette manifestation, qui n'ont pas respecté les principes de notre République et qui doivent être pour cela punis."
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