Article rédigé par , le 11 septembre 2008
Reconnaissons le simplement, Thierry Wolton est meilleur journaliste d'investigation que penseur politique. Son dernier livre, qui tente dans la lignée prestigieuse des Arendt et des Koestler, de remettre en perspective la sinistre parenté des totalitarismes du XXe siècle, n'apporte pas grand chose en terme d'information historique et suscite même un certain scepticisme.
Sur le plan historique, depuis le magistral Passé d'une illusion de François Furet, nous ne nous faisons en effet plus d'illusion sur la philanthropie du " petit père des peuples " ou la pureté d'intention du Führer. Quand Wolton passe le tiers de son livre à broder autour des implications et origines secrètes du pacte germano-soviétique, pour en déduire que ce dernier scellait la collusion profonde du mal sous ses deux formes, on aurait plutôt envie de parler d'une entente de circonstance entre deux affreux cyniques, tellement de circonstance que l'opération Barbarossa de 1941 coupera court à cette idylle. On ajoutera que cette volonté de séduction entre les deux dictatures était plutôt unilatérale, l'Allemagne, par principe, étant allergique à toute collusion avec le " judéo-bolchevisme ". Et puis, après tout, les démocraties occidentales ont bien signé les accord de Münich, sans pour autant relever, elles mêmes, du totalitarisme ! Sur le fond, la thèse de Wolton voudrait que le communisme soit le stade ultime du nationalisme, dans cette étrange synthèse que l'on dénomme " national bolchevisme ". Après avoir congelé les peuples, le communisme new look leur permettrait aujourd'hui de se réchauffer dans les flammes du plus violent des nationalismes. Comme toute systématisation, cette thèse reste réductrice. Mettre dans le même sac un agrarien polonais catholique, un ancien combattant russe nostalgique de Staline, un skinhead est-allemand et un tcheknik serbe laisse songeur. Non, Jirinovski n'est pas Staline, pas plus que Milosevic n'est Hitler. Reprocher à des peuples sortis du Goulag de vouloir se ressourcer dans leurs racines historiques semble un peu rapide, surtout lorsque l'on voit la diversité, et la différence d'intensité entre les nationalismes (religieux, ethniques..) en présence sur cette partie du monde. En réalité, ce que Wolton est en droit de condamner, ce peut être le racisme, la violence gratuite, l'intolérance fondamentaliste ou la dictature politique, or cela existe depuis la plus haute Antiquité. Mais démontrer que le nationalisme ne peut aboutir qu'à la mort ou au chaos, c'est condamner les peuples entre Danube et Oural à ne voir d'avenir que dans la déliquescence et les injustices d'un libéralisme occidental peut être pas totalement assimilable chez eux.JEAN-DAVID MALNATIArticle paru dans "Liberté Politique" N°3
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