Article rédigé par , le 11 septembre 2008
L'auteur, docteur en philosophie et en théologie, veut examiner la pensée de l'Aquinate sur la " doctrine sacrée " : les interprètes passés et présents ont-ils suffisamment compris que l'Écriture canonique est la seule règle de foi (p.
20 citant la Somme de théologie II. n. 1.9, et le Commentaire sur l'Évangile de Jean, § 2656) ? Selon Gaboriau, un grand nombre de commentateurs anciens et modernes (Cano, Marin Sola, Gagnebet, Labourdette, Journet, Maritain) n'ont pas flairé sous le terme de doctrina sacra la présence de scriptura sacra.Gaboriau nous présente une certaine identité entre Écriture sainte et " doctrine sacrée " chez l'Aquinate. Mais il ne nous dit pas si, selon lui, cette identité est pure et simple ou plutôt relative, simpliciter ou secundum quid. Conformément à la Question 1re de la Somme, souvent citée par Gaboriau, Thomas, en épousant exclusivement la doctrine de l'Écriture comme doctrine sacrée, suit l'exemple d'Augustin (a. 8 ; cf. la Lettre 19 à Jérôme) reconnaissant aux auteurs des Écritures canoniques une infaillibilité habituelle et distincte d'une absence d'erreur charismatique mais occasionnelle chez les Pères (Quod. 12, 17, 1 ; cf. Somme de th., I.1. 8 ad zm).Le sujet avait été considéré par un auteur non cité par Gaboriau, R. Bellemare, O.M.I., (" La Somme de théologie et la lecture de la Bible ", Église et Théologie 5, 1974, 257-270). Pour Bellemare, Thomas dans la Somme ne fait pas état du témoignage comme condition de la foi. Il le mentionne ailleurs. Il n'y a donc pas identité pure et simple entre doctrine sacrée et Écriture. Pourquoi ? Parce qu'il s'agit, avant tout, pour le théologien novice, de s'attacher à la raison formelle de l'acte de foi : la Vérité première. La théologie pratiquée par Thomas dans la Somme est un préambule à son interprétation de la Bible. Elle présuppose le mystère de l'Église, le fait historique de l'Église, que l'Écriture canonique implique. Pas de Canon sans Église !Ce qui nous amène à une constatation importante sur le plan œcuménique : 1'Écriture qui doit être 1'âme de la théologie suivant Vatican II (Dei Verbum, § 24), c'est l'Écriture canonique, l'Écriture reconnue par l'Église pendant le premier millénaire et à Trente. En fait les communautés ecclésiales encore séparées de l'Église universelle sont déjà en communion partielle avec elle, dans la mesure où elles reconnaissent avec elle (et grâce à elle) le Canon qu'elle a reçu la grâce de fixer (1).L'Écriture canonique suppose les charismes du Siège apostolique ! L'Écriture canonique n'est donc pas l'Écriture " nue ", mais 1'Écriture composée par l'Église prophétique et apostolique, comme son image et son reflet : l'Église de l'Ancienne et de la Nouvelle Alliance. D'où résulte une conséquence : les différents aspects, vus par les différents auteurs cités plus haut, dans la doctrine sacrée, selon saint Thomas, peuvent s'y trouver à ses yeux, en tant qu'éléments de l'Église, présupposés dans le Canon des Écritures.Il y a donc moyen, sans nier l'opportunité du " coup de barre " de Florent Gaboriau, de récupérer comme authentiques les interprétations critiquées - ou du moins plusieurs d'entre elles - par l'auteur, qui a eu le grand mérite d'attirer nos attentions sur un problème important et délicat dans l'exégèse de la Somme et pour la réflexion théologique.BERTRAND DE MARGERIE, SJ
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