Article rédigé par Renaissance catholique, le 15 juin 2021
Source [Renaissance catholique] Entretien avec Jacques Chanard, ancien maire de Chevannes, porte-parole d’un groupe d’élus locaux de la région d’Auxerre. (propos recueillis par Jean-Pierre Maugendre)
I Quelle est l’histoire de l’abbaye de Pontigny ?
L’Abbaye de Pontigny, édifiée au XIIè siècle par les moines cisterciens, est la 2è fille de Citeaux. C’est la plus grande abbaye cistercienne au monde qui existe encore dans son état d’origine.
Au siècle dernier (1910 -1930), elle accueille les « Décades de Pontigny », point de rencontres des plus grands écrivains français (André Gide, Roger Martin du Gard, André Maurois, François Mauriac, etc.)
Le site de l’abbaye comprend l’église abbatiale, cathédrale de la Mission de France, propriété de la commune, et des bâtiments abbatiaux (5000 M 2) sur un parc de 10 hectares.
Par volonté de Jean Pierre Soisson, président de la Région, les bâtiments et le parc sont devenus en 2001 propriété de la Région Bourgogne-Franche-Comté (succédant au département).
En avril 2019, la Région, présidée par la socialiste Marie-Guite Dufay, a décidé de mettre en vente les bâtiments et le parc, l’église abbatiale demeurant, bien entendu, propriété de la commune de Pontigny.
II Quelle est l’origine du conflit actuel ?
Deux offres d’achat ont été déposées :
- La première émanant de la Fondation François Schneider (en vue d’assurer la promotion de l’art dit « contemporain ») pour la somme de 1,8 M€, dont seulement 5% payables à la promesse de vente, le solde payable sous un an après inventaire de l’état des bâtiments et obtention d’un partenariat avec un groupe hôtelier.
- La seconde émanant de la Fraternité Sacerdotale Saint Pierre, pour la somme de 2,1 M€, payables sans délai, en vue d’y installer un séminaire pour former une cinquantaine de prêtres francophones, séminaire complétant le maillage existant de séminaires germanophone et anglophone.
III Quel a été le processus de la vente en novembre et décembre 2020 ?
La Présidente, adossée à une majorité socialiste / LREM, et soutenue par les réseaux maçonniques, très influents dans la Région, l’ancien ministre Jean-Pierre Soisson gardant son rôle de « vieux cacique », a décidé d’attribuer l’Abbaye à François Schneider, en dépit de la différence de prix avec l’offre de la Fraternité Saint Pierre.
Pour justifier son choix, madame Dufay s’est référée au fait que la FSSP mentionnait la nécessité de bénéficier d’un « commodat » de l’archevêque pour utiliser l’église abbatiale.
- L’hostilité de Mgr Giraud vis-à-vis d’un projet porté par une congrégation considérée comme « traditionaliste » a été l’argument central du discours de la Présidente lors du vote du 10 Décembre 2020.
IV Que s’est-il passé depuis ?
Depuis le vote attribuant l’abbaye à François Schneider, la Région, qui avait délaissé ces bâtiments au cours des vingt dernières années, a lancé un ambitieux programme de restauration des toitures.
Il semblerait que plus d’1 Million € aient été déjà engagés.
V Quelle est la situation actuelle ?
A notre connaissance, la promesse de vente n’a pas encore été signée, et c’est à bon droit que les travaux se poursuivent, la Région demeurant propriétaire.
Toutefois, c’est une façon détournée de faire un « cadeau » à M Schneider, puisque la moitié du prix de vente sera absorbée par les travaux déjà réalisés.
Par ailleurs, il semblerait qu’aucun groupe hôtelier « sérieux » ne soit disposé à investir 6 à 7 Millions € pour agencer un hôtel restaurant de luxe dans le petit village de Pontigny.
Rappelons, enfin que la précédente opération immobilière pilotée par François Schneider (hôtel / restaurant / golf de Roncemay, au nord de l’Yonne) s’est soldée par un cuisant échec.
Le domaine est à l’abandon, envahi par les ronces …
VI Quelle est la position de l’archevêque de Sens-Auxerre, Mgr Hervé Giraud, prélat de la Mission de France ?
Notons d’abord que les membres du Groupe de Soutien à la FSSP pour le rachat de l’Abbaye de Pontigny, élus locaux en exercice et anciens élus, sont convaincus que le projet Schneider est voué à l’échec, et que fin 2021, la nouvelle majorité du Conseil Régional sera conduite à réexaminer le dossier.
La proposition de la FSSP sera, alors, probablement réétudiée.
Toutefois, sauf évolution de sa position, nous nous heurterons, à nouveau, au refus de l’archevêque d’accorder un « commodat » permettant de faire coexister le rite dit « ordinaire » (Mission de France) et le rite dit « extraordinaire » (Fraternité Saint Pierre).
VII Existe-t-il des recours ?
Le cardinal Robert Sarah, à l’époque préfet de la Congrégation pour le culte divin, Monseigneur Eric de Moulins Beaufort, Président de la Conférence des Evêques de France, et Monseigneur Migliore, Nonce Apostolique à Paris, ont été sensibilisés au sujet début 2021.
Ils ont tous les trois répondus que l’archevêque est souverain en son diocèse.