Article rédigé par Le Figaro, le 15 juin 2021
Source [Le Figaro] Le plus prestigieux hôpital de Suède revoit son protocole et ne donne plus d’hormones aux mineurs. Le premier pays au monde à avoir reconnu le droit des transgenres va-t-il faire marche arrière?
Pour raconter ce qui est arrivé à sa fille, Asa préfère montrer l’album où elle l’a prise en photo, chaque mois, à partir de ses 14 ans. «Voilà l’époque où Johanna s’est mise à couper ses cheveux très court, à mettre un bandage de poitrine pour l’aplatir», commence-t-elle. Les clichés se succèdent, le sourire disparaît, le visage s’émacie: «Elle est tombée malade, l’anorexie. À l’hôpital, j’ai remarqué qu’elle suivait des comptes transgenres sur les réseaux sociaux. Elle m’a annoncé qu’elle souffrait de dysphorie de genre, qu’elle ne supportait plus son corps… Elle a décidé de devenir Kasper, un garçon.»
Son visage alors apparaît plus affirmé, cheveux teints, air viril. Et puis, à 19 ans, Johanna réapparaît en fille, lueur énigmatique dans le regard: «C’est un voyage qui a duré deux longues années, s’émeut Asa. Ma fille a changé de genre, d’identité, mais elle a ensuite eu l’immense courage d’avouer son erreur. Je suis très fière d’elle.»
Ce «voyage», comme le dit Asa, de nombreux adolescents suédois l’ont fait. Le pays a été le premier au monde, en 1972, à reconnaître la dysphorie de genre, ce mal-être provoqué par l’inadéquation entre son sexe biologique et son identité de genre, et à donner la possibilité d’officialiser cette transition à l’état-civil. Le premier, aussi, à offrir des soins pour conforter les transgenres dans leur démarche: devenir un homme quand ils sont nés femmes, ou l’inverse.
Tous les traitements sont pris en charge dans des cliniques publiques, dès 16 ans: bloqueurs de puberté pour les plus jeunes, injections de testostérone ou d’œstrogènes, opération de la poitrine, orthophonistes pour changer sa voix, épilation, greffe de barbe, etc. À partir de 18 ans, l’administration autorise enfin l’opération des parties génitales, créant un pénis à partir du clitoris ou avec de la peau, modelant un vagin par inversion de la verge ou avec un morceau d’intestin.
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