Article rédigé par L'Opinion, le 16 mars 2021
Source [L'Opinon] Le député LR du Vaucluse explique pourquoi il a décidé, avec ses collègues, de s’abstenir sur le projet de loi inscrivant le climat à l’article 1er de la Constitution
La semaine dernière s’est discuté à l’Assemblée nationale le projet de loi portant réforme constitutionnelle afin de modifier l’article premier de la Constitution en y inscrivant que la France « garantit la préservation de l’environnement et de la diversité biologique et lutte contre le dérèglement climatique ».
Une telle formulation est inutile, car la charte de l’environnement annexée à la Constitution a déjà hissé dans notre « bloc de constitutionnalité » les préceptes environnementaux. Certes, la lutte contre le réchauffement climatique n’y est pas explicitement mentionnée mais une adjonction à la charte suffirait. C’est d’ailleurs ce qui a été proposé en séance... mais rejeté par la majorité !
Cette formulation est surtout potentiellement dangereuse. En effet, le Conseil d’Etat a spécifié dans son avis sur le texte que le mot « garantir » induisait une responsabilité de l’Etat sur l’atteinte des objectifs, la porte ouverte à une judiciarisation supplémentaire de la société, sur le modèle de l’« affaire du Siècle ». Le ministre de la Justice a dit « assumer » ces dix-sept mots supplémentaires, car il revendique la nécessité de graver dans le marbre une « quasi » obligation de résultat.
En réalité, toute la subtilité est dans le « quasi » car par sa formulation, le gouvernement s’est bien gardé de garantir une baisse des émissions de Co2 : la garantie ne porte que sur la préservation environnementale, la partie « réchauffement » n’étant concernée que par une obligation de moyens (la France « lutte contre le dérèglement climatique »). Emmanuel Macron prend donc pour des imbéciles tous ceux qui croient qu’il y aura un grand pas en avant vers des résultats. Il n’y aura au contraire qu’une augmentation des contentieux portés par des groupes de pression qui pourront jouer sur l’ambiguïté de la formulation requise.
«Notre choix est clair: nous ne nous mettrons pas entre le peuple et ce texte, en faisant dérailler le processus référendaire, ce qui permettrait au Président de sortir de cette affaire comme Ponce Pilate»
Fort cyniquement, le gouvernement a refusé d’amender son texte – rejetant les 400 amendements présentés – au motif qu’il fallait respecter « l’engagement » pris à l’égard des 150 « conventionnels du climat ». Eux-aussi sont pris pour des imbéciles car dès 2019, un projet de loi constitutionnelle prévoyait cette modification de l’article 1er, quasiment dans les mêmes termes. La seule différence entre 2019 et 2021 est le verbe « garantir », dont on a vu les limites juridiques. Les 150 citoyens ont donc avalisé ce que le gouvernement avait déjà rédigé, une preuve éclatante de la manipulation de cette instance ad hoc.
Piège. Emmanuel Macron espère à bon compte se verdir avec une réforme mal calibrée et ceux qui pointeraient la faiblesse juridique du texte seraient ainsi caricaturés en adversaires de la lutte contre le réchauffement climatique. Nous ne tomberons pas dans ce piège. Même si nous sommes convaincus que ce texte est mauvais, la question est de savoir qui doit trancher : le Parlement ou le peuple. Notre choix est clair : nous ne nous mettrons pas entre le peuple et ce texte, en faisant dérailler le processus référendaire, ce qui permettrait au Président de sortir de cette affaire comme Ponce Pilate.
En nous abstenant, nous ne bloquerons donc pas ce texte et le laisserons aller au référendum, si le Sénat l’accepte également. En revanche, si référendum il y a, nous ferons ardemment campagne pour le « non » en dénonçant ces manœuvres politiciennes qui instrumentalisent la cause environnementale.
Président Macron, vous qui aimez « garantir », irez-vous jusqu’à engager votre responsabilité sur ce texte, en cas d’échec référendaire ?
Julien Aubert est député LR du Vaucluse. Cette tribune est cosignée par Emmanuelle Anthoine, députée LR de la Drôme, Jean Bacci, sénateur LR du Var, Thibault Bazin, député LR de Meurthe-et-Moselle, Valérie Bazin-Malgras, députée LR de l’Aube, Bernard Bouley, député LR de l’Essonne, Valérie Boyer, sénatrice LR des Bouches-du-Rhône, Jacques Cattin, député LR du Haut-Rhin, Dino Cinieri, député LR de la Loire, Pierre Cordier, député LR des Ardennes, Bernard Deflesselles, député LR des Bouches-du-Rhône, Pierre-Henri Dumont, député LR du Pas-de-Calais, Yves Hemedinger, député LR du Haut-Rhin, Else Joseph, sénatrice LR des Ardennes, Henri Leroy, sénateur LR des Alpes-Maritimes, Emmanuel Maquet, député LR de la Somme, Gérard Menuel, député LR de l’Aube, Sébastien Meurant, sénateur LR du Val-d’Oise, Louis-Jean de Nicolaÿ, sénateur LR de la Sarthe, Bérengère Poletti, députée LR des Ardennes, Didier Quentin, député LR de Charente-Maritime, Stéphane Sautarel, sénateur LR du Cantal, Laurence Trastour-Isnart, députée LR des Alpes-Maritimes et Arnaud Viala, député LR de l’Aveyron.
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