Article rédigé par Le Salon Beige, le 17 novembre 2020
Source [Le Salon Beige] Certaines préfectures exigent que les manifestations déclarées soient “revendicatives” et non “cultuelles”. Mais en ont-elles le droit ? Voici un article du mois de juin dernier :
Il n’existe pas de réglementation spécifique aux manifestations religieuses dans l’espace public où rien ne s’oppose aux processions, prières de rue et autres commémorations religieuses, à la condition que leur déclaration préalable ait été faite et que l’ordre public ne soit pas troublé. Quant au maire, lorsque qu’il use de ses pouvoirs de police pour les autoriser, il doit tenir compte des libertés de religion, de réunion et de manifester.
L’article 27 de la loi du 9 décembre 1905 prévoit que :
« Les cérémonies, processions et autres manifestations extérieures d’un culte, sont réglées en conformité de l’article L2212-2 du code général des collectivités territoriales. ».
Un article L2212-2 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) qui rappelle les différents pouvoirs de police dévolus au maire qui doit assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publique.
Ainsi, conformément au régime général réglementant les manifestations sur la voie publique, les manifestations religieuses sont en principe soumises à déclaration préalable. En sont dispensées les manifestations extérieures du culte conforme aux traditions et aux usages locaux [1]. Pour qu’un refus soit opposé aux manifestations religieuses [2], il faut que :
- l’ordre public soit menacé [3] ;
- les limitations à la liberté de réunion et de manifestation soient proportionnées aux risques d’atteinte à l’ordre public.
- le refus soit justifié par l’impossibilité d’encadrer par des mesures préventives les risques de débordement ;
Il est évidemment possible pour le maire d’imposer un itinéraire ou un espace à ces manifestations religieuses pour des raisons de sécurité ou de bon déroulement de la circulation (Conseil d’État, 21 janvier 1966, Sieur Legastebois, recueil p. 806).
[…]
Clichy-la-Garenne (Hauts-de-Seine), novembre 2017, les musulmans prient dans la rue pendant huit mois, pour protester contre la fermeture de la salle de la rue d’Estienne d’Orves. Le 10 novembre, à l’appel de Rémi Muzeau, le maire de l’époque, une centaine d’élus manifeste en écharpe pour protester contre les prières de rue hebdomadaires. Le 15, le ministre de l’Intérieur, Gérard Collomb décide d’interdire les prières de rue pour « trouble à l’ordre public » et le 16 novembre 2017, lors de la réunion de médiation en marie de Clichy avec les associations, le préfet des Hauts-de-Seine leur notifie l’interdiction des prières de rue. Aujourd’hui, même s’il existe encore des prières de rue, le phénomène est devenu très minoritaire grâce à la construction de nouvelles mosquées, aujourd’hui plus de 2500 en France.
Cependant, il faut préciser qu’il n’existe aucune législation spécifique à la prière de rue. La Déclaration des droits de l’homme de 1789 rappelle que « nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public ». Au nom de la liberté de conscience, les croyants peuvent donc célébrer leur culte dans la rue sauf si le rassemblement occasionne l’obstruction non autorisée d’une voie de passage ou risque de provoquer des affrontements. Ce qui fut craint à Clichy. En revanche toute manifestation à caractère religieux sur la voie publique doit généralement être soumises à déclaration préalable en mairie ou en préfecture. Il en va ainsi des cérémonies et processions religieuses chrétiennes qui se tiendraient dans la rue (pas sur les parvis des églises, car ils sont souvent du domaine de la paroisse, l’affectataire). Pour ce qui concerne les mosquées et salles de prières qui manquent de place, peu le font. Mais pour autant, dans bien des cas cela ne rend pas le rassemblement illégal en lui-même. Le trouble doit être « caractérisé » pour déclencher un usage de la force publique. En revanche, le seul appel à la prière toléré en France dans l’espace public est celui des cloches qui est réglementé par l’article 27 de la loi de 1905. […]